Attentats islamistes : veut-on vraiment faire la guerre ?

Au fond, on peut se demander si les Européens y croient vraiment. Je veux dire, s’ils croient que notre Vieux Continent est en guerre contre un ennemi implacable. Et, s’ils y croient, veulent-ils mener cette guerre ? Ces questions se posent, quand on lit ou voit certaines réactions après les attentats islamistes qui ont frappé la Catalogne.

Tenez, je vous cite ce lecteur, sans doute averti, qui réagissait ce matin, peut-être confortablement assis dans sa maison du Luberon ou bien sur la terrasse de son appartement de Saint-Cast, à l’éditorial du Monde, intitulé "Attentats en Catalogne : la tragique litanie djihadiste", une tribune somme toute dans le ton du journal, plutôt factuelle et objective. "Il faut lutter contre les prêcheurs de haine, mais aussi raison garder. À lire la presse on croirait l’Europe à feu et à sang. Or le terrorisme y est moins meurtrier que les accidents domestiques, de la route, du travail, ou même les intoxications alimentaires. Le risque reste objectivement faible, les réactions y sont démesurées, irrationnelles. Voulons-nous apprendre à nos enfants à vivre dans un monde où, fouillés à chaque pas, ils se méfient de tout et de tous ? À qui cela profiterait-il ?" Vu comme ça, effectivement. Prenez la Grande Guerre : elle fit moins de vingt millions de morts, militaires et civils, alors que la grippe espagnole, entre 1918 et 1919, aurait tué cinquante millions de personnes selon l’Institut Pasteur. On parle même, aujourd’hui, de cent millions de victimes. L’Europe n’est pas à feu et à sang mais il ne se passe pas une semaine sans qu’un pays soit frappé par le terrorisme islamiste. "Ça vaut mieux que d’attraper la scarlatine", chantait Ray Ventura et ses Collégiens en 1936 !

Et puis ce titre dans Libération : "Qu’un crime pareil puisse se dérouler dans cette ville si ouverte, ça me dépasse", reprenant les propos d’un touriste. Symptomatique, cette exclamation pleine de désarroi : le cosmopolitisme, l’ouverture, le sans-frontiérisme immuniseraient donc contre le terrorisme. Parce que Paris, Londres, Bruxelles et tant d’autres en Europe sont des villes fermées ! Du reste, qu’est-ce qu’une ville ouverte ? Selon les lois de la guerre, une ville ouverte est une "localité habitée située à proximité ou dans la zone des combats et ouverte à l’occupation de l’ennemi pour éviter les combats et les destructions". Et c’est là, quand on y songe, que les deux acceptions de l’expression « ville ouverte » se rejoignent. En 40, les maires revêtaient leur écharpe pour demander que leur bourgade soit épargnée. Aujourd’hui, on brandit des bougies et l’on multiplie les minutes de silence…

Et ces antifas dans les rues de Barcelone, hier, pour s’opposer à une « manifestation d’extrême droite » ? Avec pour slogan "No Pasaran". Qui ça, les terroristes islamistes ? Non : les fascistes… "¡Barcelona antifascista!"

Et enfin, le roi d’Espagne lui-même, dans les veines duquel coule le sang de Saint Louis, de Blanche de Castille et du Cid Campeador, nous sert ce jus de boudin qu’un obscur ministre social-démocrate aurait pu pondre : "Ce sont des assassins, simplement des criminels, qui ne vont pas nous terroriser."

« Même pas peur », scandait une foule de grands enfants, hier, dans les rues de Barcelone. Voire. "Quand on n’a pas peur de ses ennemis, on se résout difficilement à s’en défier" (Émile de Girardin).

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

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