Vous n’aurez pas ma haine : belle histoire, mauvais message

vous n'aurez pas ma haine

Le soir du 13 novembre, Hélène Muyal-Leiris était au concert du Bataclan. Son mari Antoine était à la maison, avec leur fils Melvil, 17 mois. Hélène a été abattue par une équipe d'abrutis sanguinaires. Elle a été arrachée à tout jamais à son mari, amoureux fou, à son fils, qui demandera longtemps sa maman. Cette histoire, comme celle de toutes les victimes de la nuit du 13 novembre, brise le cœur. Antoine Leiris, lui, a publié un texte sur Facebook pour s'adresser aux terroristes - un texte bref et émouvant, digne et plutôt bien écrit. L'une des phrases de ce texte a dépassé son auteur : « Vous n'aurez pas ma haine. » Ce qu'Antoine Leiris voulait dire, c'est que, face à ce déferlement de stupidité moyenâgeuse, il avait fait le choix de vivre, d'élever son fils, de continuer à avancer. On ne peut que le comprendre et l'admirer.

Pourtant, ce « vous n'aurez pas ma haine » résonne curieusement depuis sept ans. Cette dignité est devenue, dans l'opinion publique, un étrange éloge de la faiblesse et de la passivité. C'est au nom de cette phrase, si mal interprétée, que des nuées de bobos se sont rendus en terrasse pour « résister » en buvant des pintes d'IPA pour, croyaient-ils, narguer courageusement les terroristes. C'est pour ne pas donner leur haine que les hommes et femmes politiques de tout bord ont rapatrié, très récemment, les femmes de djihadistes et leurs enfants. C'est pour ne pas être accusés de cette « haine » que tant de Français persistent à s'aveugler sur les véritables buts de guerre de l'islam politique et de son bras armé, le terrorisme low cost.

Comment, dès lors, s'étonner que le premier film français sur le Bataclan porte le titre de cette lettre et soit l'adaptation du livre éponyme du même Antoine Leiris ? On n'allait quand même pas donner sa haine. Voici donc une adaptation à la française, que l'on peut découvrir dans la bande-annonce, visible dès aujourd'hui. L'adaptation a l'air fidèle. L'histoire est nécessairement bouleversante. Mais allons un peu plus loin. Au-delà de l'émotion provoquée, légitimement, par ce cas individuel, quelles conclusions la société peut-elle tirer de la projection d'un tel film ?

Je voudrais que l'on me comprenne bien. Ne pas rester muré dans la colère est, pour un individu, le signe d'un esprit en bonne santé. À l'échelle d'un pays, refuser d'exercer la violence légitime que l'on nomme justice relève de la pulsion morbide. Se voiler la face, baisser les yeux, croire que ça ira mieux demain alors qu'on ne change rien, c'est rechercher l'échec. Entretenir le peuple de France, déjà fatigué et pacifiste, dans l'idée que les attentats doivent être combattus par l'absence de haine, voilà qui engage, selon la formule, notre pronostic vital. Ils n'auront pas notre haine, soit. Auront-ils seulement quelque chose de notre part, à l'exception d'une soumission résignée. Les moutons, eux aussi, sont incapables de haine.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

4 commentaires

  1. Quand est ce que les Français vont comprendre que ces assassins ne veulent pas de leurs haine puisque c’est leurs peau qu’ils veulent. Il serait temps d’atterrir.

  2. Dans le même registre, à peu près aussi volontaire et combatif, on avait aussi la vieille formule du « même pas mal ! » Mais ça c’était la version cour d’école. Certains n’ont pas beaucoup évolué depuis.

  3. Rachel Guerido a même souhaité une réconciliation avec les terroristes. Il fut un temps, c’était qualifié de trahison.

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