L’état des ponts de France en dit long sur notre pays
La France est le pays champion du monde libre du prélèvement fiscal (avec le Danemark) selon l’OCDE, mais des pans entiers de ce qui est géré par cet État obèse… tombent en ruine. Il fut un temps où nos ponts faisaient la fierté de nos ingénieurs, passés parfois par la prestigieuse école des Ponts et Chaussées. L’état des routes et des ponts est considéré à raison comme un critère de développement des différents pays du monde.
À cette aune, la cinquième puissance économique mondiale a du souci à se faire et c’est le Sénat qui le dit dans un rapport sorti le 26 juin, signé par les sénateurs Patrick Chaize et Michel Dagbert et réalisé au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Le titre de ce rapport est sans ambiguïté : Sécurité des ponts, éviter un drame. Sur 200.000 à 250.000 ponts routiers de l’Hexagone (on ne connaît pas leur nombre exact, faute de recensement…), 30.000 à 35.000, soit à peine moins de 15 % de ces ouvrages, menacent ruine. Dans les communes, le constat est pire encore : 23 % des ponts communaux seraient menacés, soit près d’un sur quatre. La sécurité des usagers est donc précaire et la situation ne s’améliore pas. En 2019, le Sénat avait déjà produit un rapport sur l’état critique des ponts en France. À l’époque, plus de 25.000 étaient déjà en mauvais état structurel. Et il ne s’agit pas d’un coup de pinceau !
Le ministère chargé des Transports indique que « dans 7 % des cas, les dommages sont plus sérieux, présentant à terme un risque d'effondrement et donc la forte probabilité de fermer préventivement ces ponts à la circulation des poids lourds ou de tous les véhicules ».
L’état des ponts est parfois à l’origine de drames. Un événement a été déclencheur de ce rapport : la catastrophe de l’incendie du tunnel du Mont-Blanc qui entraîna la mort de 39 personnes. Ce drame a eu lieu en 1999 et il aura fallu attendre vingt ans pour qu’on fixe des objectifs pour l’entretien de nos ouvrages d’art.
Mais comment en est-on arrivé là ? Les matériaux utilisés pour la construction des ponts se dégradent. Responsables, les conditions environnementales (corrosion, carbonisation), les conditions d’usage (trafic routier : intensité et répétition de la charge sur le pont) mais également la multiplication d'événements météorologiques exceptionnels pour lesquels les ponts n’ont pas été conçus. Ainsi, quatre ponts ont été détruits par les inondations survenues dans l'Aude, en octobre 2018. De plus, environ 2.800 ponts de l'État ont été construits entre 1951 et 1975. Or, les ponts ont une durée de vie théorique de 100 ans qui se réduit, dans la réalité, statistiquement à… 70 ans. L’État n’a pas débloqué les fonds à temps.
Face à cette situation critique, le Sénat propose la mise en place d’un « plan Marshall ». Le budget lié aux infrastructures doit être doublé (de 60 à 120 millions d'euros) à compter de 2020 et pendant dix an un fonds d’aide aux collectivités territoriales de 130 millions d’euros par an.
L’État a déployé 40 millions d’euros pour le programme national des ponts (PNP) sur trois ans, une goutte d’eau. Par rapport aux recommandations de 2019, le retard accumulé depuis 2020 s’élève à 350 millions d’euros. Ainsi, l’État a encore une fois fixé des objectifs spectaculaires mais ne les tient pas. Seulement 3 % des ponts les plus dégradés, soit 300 à 500 ponts, suivront la phase d’analyse approfondie. Là encore, une goutte d’eau, vu le travail nécessaire. Sur l’entretien et la réparation des ouvrages d’art du RRNNC (réseau routier national non concédé), ce retard atteint déjà 89 millions par rapport aux objectifs de 2019. Car les collectivités ne reçoivent pas d’aide pour les travaux de réparation et de reconstruction de leurs ponts routiers. Le laisser-aller des gouvernements depuis plusieurs décennies est manifeste. La situation ne devrait pas s’améliorer avant longtemps et la France devra engloutir des fortunes dans la réparation de ses ponts routiers si elle veut éviter les accidents dramatiques et irriguer l’économie de ses campagnes, toujours abandonnées au profit des banlieues dites « populaires ». De quoi serrer les dents au moment de passer sur ou sous un pont de notre beau pays durant les vacances…
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Un commentaire
On ne peut pas entretenir généreusement tous les assistés de la terre et entretenir en même temps notre réseau routier malgré le montant astronomique des impôts et taxes en tous genres prélevés sur le travail de ceux qui se lèvent le matin. La sécurité devrait être une priorité mais seuls des accidents dus à l’éffondrement de quelques ponts réveilleront nos politiques plus attachés à leurs voix électorales qu’à l’entretien des infrastructures pourtant indispensables.