Valérie Pécresse, atteinte du syndrome Juppé, veut le beurre et l’argent du beurre
Difficile d'être militant politique par les temps qui courent, et encore plus difficile quand on est militant LR.
Dimanche dernier, les adhérents du parti ont voté à 75 % pour Laurent Wauquiez. Ils auraient dû savourer ce score net, cette démonstration d'unité et de force (plus de 100.000 votants, tout de même, ce qu'aucun autre parti, ni le FN, ni un PS en voie de liquidation, ni même La France insoumise ou LREM ne sont en mesure de faire. Sans parler des troupes fantomatiques du MoDem, de l'UDI ou d'Agir) : au moins, avec une telle ligne (« de droite ») validée par les trois quarts des militants, on ne viendrait plus leur chercher querelle sur la division du parti, on ne parlerait plus de lutte fratricide à la Copé-Fillon, de parti fracturé, etc.
Avec ce vote, ce sont les pages de tous ces mauvais souvenirs, de tout ce monde d'avant que les militants ont voulu tourner en envoyant, une fois de plus, comme l'analysait Guillaume Bernard, ce message tout simple : le peuple de droite est vraiment « de droite » et veut de la cohérence à tous les étages de la maison.
Mais voilà que le monde d'avant, à droite, repointe le bout de son nez.
Il y eut les états d'âme de M. Juppé, qui souhaite, pour les européennes, rejoindre le parti du Président. Il a néanmoins voté pour son champion, M. de Calan. 9 %. Nouvelle humiliation. 9 % : voilà ce qu'il reste de juppéistes dans le parti. À vrai-dire, après l'élimination de la primaire, il y a un an (et, là, sur un vivier de plus de quatre millions de sympathisants), M. Juppé aurait dû comprendre...
Et puis lundi, à peine M. Wauquiez sacré, c'est Xavier Bertrand qui quittait le parti. Pas très courageux, M. Bertrand, puisqu'il s'était bien abstenu de se présenter à la présidence, ou de partir avant. Mais logique : en décembre 2015, aux régionales, il fut un Macron avant l'heure, ralliant socialistes et Républicains pour battre Marine Le Pen. Il se met enfin en cohérence avec ses choix. Les militants LR du Nord et d'ailleurs apprécieront.
Et ce week-end, c'est au tour de Mme Pécresse, autre poids lourd LR, autre présidente de région qui n'a surtout pas pris le risque de se présenter pour diriger son parti, de faire entendre ses exigences : elle a demandé à M. Wauquiez, selon Le Journal du dimanche, que son mouvement Libres ! devienne "un mouvement associé au sein des Républicains".
Nous voulons ainsi nous ancrer dans notre famille politique, tout en ayant la possibilité d'avoir des adhérents qui ne soient pas forcément membres de LR. Avec son élection, nous assistons au départ de militants et d'élus et je leur dis: “Restez. Restez avec nous dans Libres !”
Comme cela est joliment dit : « Laurent, avec ta ligne de droite, tu es un véritable répulsif ! Et moi, avec mon mouvement “Un pied dedans, un pied dehors” et mon charisme naturel, je vais les retenir ! »
Que de généreuses pensées chez cette concierge qui veut filtrer les départs !
En fait, Mme Pécresse est atteinte du syndrome Juppé et elle est en train de nous refaire le coup des "primaires ouvertes" ! En décalage idéologique total avec leur base militante au point qu'ils ne prennent plus le risque de concourir lors des élections internes, ils hésitent à quitter ce parti grâce auquel ils ont fait toute leur carrière, à qui ils doivent encore leurs mandats actuels et qui - sait-on jamais - pourrait encore être utile... S'asseoir sur ses convictions, surtout quand elles sont très molles, c'est facile, mais se passer d'une étiquette, d'un vivier de militants, d'habitudes électorales, c'est déjà plus risqué. On comprend ses hésitations, ses envies de libération limitée, son désir d'« en même temps ».
Mme Pécresse voudrait le beurre et l'argent du beurre. Pas sûr que les militants, eux, veuillent d'une telle crémière !
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