[UNE PROF EN FRANCE] Le brevet : comment mettre de l’huile sur le feu ?

Nous sommes entrés, depuis quelques semaines, dans la glorieuse période des examens qui sanctionnent le travail acharné des petits Français au cours de leur scolarité secondaire. Avez-vous eu la curiosité de regarder les sujets du brevet ? Comme je suis d’astreinte de surveillance comme de correction, j’ai jeté un œil au sujet d’histoire-géographie. C’est toujours intéressant, l’histoire-géographie, car c’est la discipline qui subit, avec les lettres et la SVT, le plus fortement la pression idéologique de nos bienveillants dirigeants.
Évidemment, l'égalité femmes-hommes
On demandait bien évidemment aux candidats de « rédiger un discours à l’occasion du 8 mars, journée internationale des droits des femmes. Vous montrez (ils ne maîtrisent visiblement plus le futur…) que les inégalités femmes-hommes, contraires aux valeurs de la République, existent encore et vous présentez deux idées concrètes pour sensibiliser les élèves de votre collège à ce problème. » Alors ça, c’est de bonne guerre. Évidemment, le problème le plus urgent dans la formation intellectuelle et culturelle des jeunes, c’est qu’ils soient au point sur la défense du droit des femmes. Est-ce cela qui nous permettra d’évaluer leurs connaissances en histoire ? Ils seront surtout évalués sur la conformité idéologique de leur copie. Ils le savent, on le leur a expliqué - enfin, s’ils ont des parents un peu lucides - et, finalement, cela ne porte pas vraiment à conséquence.
Là où les choses prennent un tout autre tour, c’est quand on aborde la question du développement construit. C’est le nouveau nom de la petite composition (attention, vingt lignes, on ne va pas leur demander d’écrire trois pages…) qu’on leur demande de rédiger à partir d’un point du programme.
Évidemment, encore, la décolonisation
Voyons le sujet, sur lequel ils jouent une partie de leur note d’histoire : « Le monde depuis 1945. Dans un développement construit d’une vingtaine de lignes, expliquez l’accès à l’indépendance d’une colonie de votre choix. Vous préciserez les principaux acteurs, les étapes et les conséquences. »
Quel pays auriez-vous choisi, vous ? Les colonies italiennes comme la Somalie ou la Libye ? Le Mali ou Chypre ? Peut-être les Philippines ? La Corée ou Bornéo ? Le choix est vaste. Et puis, il y a des pays plus sympa. Des pays dans lesquels tout se passe bien, comme les Comores, le Timor, le Liban ou la Syrie… Ou des pays au sujet desquels le débat est serein et décontracté, comme le Maroc, la Tunisie, l’Algérie, la Palestine…
Encore faut-il que le professeur ait traité ce point du programme (mais comment ?) ou que l’élève se soit renseigné de son côté… auprès de sa famille, par exemple, ou des réseaux sociaux, où il aura trouvé un récit évidemment neutre et dépassionné de la guerre d’Algérie ou de l’histoire de la bande de Gaza.
Les perles du brevet sont toujours drôles. Cette année, je ne sais pas si les perles des copies d’histoire seront drôles, ou préoccupantes. Dans tous les cas, nous sommes reconnaissants au service du ministère qui élabore les sujets de remettre ainsi, sereinement et en conscience, une pièce dans la machine…
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Bien vu, bien résumé. Et ainsi va la France…