M. Blanquer effectue sa deuxième rentrée scolaire. En un an, beaucoup de chantiers ont été ouverts, et pas des moindres : dédoublement des CP en REP+, retour sur les rythmes scolaires, détricotage de la catastrophique réforme Belkacem du collège, réforme du baccalauréat et du lycée, refonte des programmes, etc. Toutes réformes plutôt bien accueillies par les parents comme par les enseignants. L’année qui s’ouvre devrait voir le rythme des réformes se maintenir, mais il n’est pas certain qu’elles soient aussi bien accueillies. Si la poursuite du dédoublement des CP de REP et des CE1 de REP+ devrait rencontrer un assentiment assez large, d’autres points sont plus conflictuels.

C’est d’abord la réforme de la voie professionnelle qui suscite l’inquiétude. Bien que peu d’éléments concrets soient connus, il semble qu’on s’oriente vers une fusion entre les élèves en lycée professionnel (LP) et les apprentis. La culture entre ces deux modes de formation, l’un dépendant de l’Éducation nationale, l’autre des branches professionnelles et de la région, est très différente, les modes de fonctionnement aussi. Les enseignants de LP craignent que ce ne soit, au final, les régions, responsables de la formation professionnelle, et qui financent aussi les lycées, qui se voient attribuer l’ensemble de cette formation. Les LP passant sous leur coupe ou disparaissant. La régionalisation de l’enseignement professionnel est une option possible ; encore faudrait-il l’annoncer clairement (ce qui permettrait d’en débattre).

C’est ensuite le projet de fusion des académies pour que leurs limites correspondent à celles des nouvelles régions. Sous prétexte de rationalisation et d’économies (sans doute illusoires), la gestion des établissements, des enseignants et les rapports des parents avec l’administration deviendront beaucoup plus compliqués. Un enseignant désirant un poste à Aurillac pourrait aussi bien se retrouver à Thonon-les-Bains, soit à plus de 450 kilomètres… Il n’est pas certain que cela rende le métier de professeur plus attractif !

L’attractivité du métier d’enseignant est aussi un chantier auquel le ministre dit vouloir s’attaquer. Le moyen le plus simple et le plus efficace pour cela serait de revaloriser le salaire des enseignants, actuellement un des plus faibles des pays de l’OCDE. Mais cette décision ne dépend pas de la rue de Grenelle mais de Bercy. À tel point que même la promesse de Macron d’une prime annuelle de 3.000 euros pour les enseignants de REP+ a été rabotée à 1.000. Le reste étant soumis au « mérite ». Apparemment, enseigner dans des quartiers désertés par les commerçants et où la police elle-même hésite à entrer n’est pas un mérite suffisant. Autant dire qu’on se contentera de rustines. Comme les pré-recrutements. Dispositif qui, s’il peut être intéressant, ne suffira pas à attirer vers l’enseignement les meilleurs étudiants.

Le ministre de l’Éducation nationale a, d’une certaine façon, mangé son pain blanc. Les décisions qu’il a prises l’an dernier, si elles étaient courageuses, car en rupture avec l’idéologie pédagogiste régnant au ministère, et nécessaires, étaient aussi les plus faciles. Il reste à prendre celles qui demandent de vrais choix, que ce soit de structures ou économiques. Mais ces décisions ne dépendent pas que de lui. L’Éducation est-elle une vraie priorité pour Emmanuel Macron ? Jean-Michel Blanquer aura-t-il les moyens de mener une véritable rénovation de l’école ? Et sinon, osera-t-il suivre le chemin de Nicolas Hulot ? L’année qui s’ouvre apportera des réponses.

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03 septembre 2018 à 14:05

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