[TRIBUNE] Sarkozy/Retailleau : un périlleux parallélisme

Pour Bruno Retailleau, le passé et le passif de sa famille politique pèsent comme un boulet au pied.
Capture écran TF1
Capture écran TF1

À peine Bruno Retailleau avait-il emporté sans coup férir la présidence de LR que nombre de journalistes et de commentateurs s’empressèrent de faire le parallèle entre la destinée politique de Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur et président de l’UMP, et Bruno Retailleau, lui aussi ministre de l’Intérieur et président de LR. Chacun le sait, comparaison n’et pas raison et, en dehors des similitudes dans les responsabilités exercées, rien n’est comparable.

Les limites d'un parallèle

Nicolas Sarkozy était ministre de l’Intérieur d’un président de la République (Jacques Chirac) qui appartenait à la même famille politique, même s'ils ne s’aimaient guère. Il présidait un parti puissant sur le plan électoral, à défaut de l’être sur le plan de la pensée politique.

Bruno Retailleau est ministre d’un Président qui, non seulement n’appartient pas à sa famille politique, mais encore est un adversaire ou est supposé l’être. Situation ambiguë s’il en est, puisque le ministre de l’Intérieur apporte une caution « régalienne » à un gouvernement de centre et de centre gauche, nommé par Emmanuel Macron qu’il combat. De surcroît, le mouvement qu’il préside est faible et s’apparente plus à un syndicat de défense d’élus qu’à une machine de guerre.

Enfin, le Rassemblement national de Marine Le Pen est autrement plus puissant que ne l’était le Front national de son père et dispose du plus important groupe de l’Assemblée nationale et d’un allié avec l’UDR d’Éric Ciotti.

Si, donc, la comparaison est superficielle, elle peut néanmoins être périlleuse pour l’intéressé. En effet, les électeurs de droite, et notamment de la droite nationale, n’ont nullement oublié qu’après avoir mené une campagne droitière inspirée par Patrick Buisson, qui avait permis d’attirer des électeurs du Front national (en 2007, Jean-Marie Le Pen n’avait obtenu que 10,44 % des suffrages au premier tour, alors qu’en 2002, il avait obtenu 16,86 %, ce qui l’avait qualifié pour le second tour), « Sarko » s’était empressé de s’engager dans une illusoire ouverture à gauche. Le sentiment de trahison avait été violent, et tout cela pour rien, car ladite ouverture n’avait séduit que des personnages « par l’odeur du maroquin alléchés » sans rallier en aucune façon les électeurs de gauche.

De plus, malgré des discours martiaux (le « Kärcher™ », 19 juin 2005), l’immigration avait considérablement augmenté, durant les trois premières années du quinquennat. La courbe s’était infléchie dans la dernière partie du mandat, mais le bilan restait mauvais : 172.000 entrées en 2007, 193.000 en 2012 (Le Figaro du 18 avril 2017).

Enfin - et ce fut le comble -, le président de la République fit adopter, par voie parlementaire, le traité de Lisbonne qui était la copie presque conforme du projet de Constitution européenne rejeté par référendum en 2005, manœuvre qui a dégradé de façon profonde la confiance des électeurs dans le personnel politique et dans la démocratie représentative. À quoi bon voter, puisque l’oligarchie n’en fait qu’à sa tête ?

Trahison et insincérité

Le parallèle fait entre Bruno Retailleau et Nicolas Sarkozy est dangereux pour le Vendéen, tant la trahison de ses électeurs par le parti pseudo-gaulliste semble être génétique. Il pèse un soupçon permanent sur la sincérité du discours des Républicains. Au demeurant, les personnalités qui entouraient le nouveau président, au soir de sa victoire, n’avaient rien pour rassurer l’électeur de droite : de Xavier Bertrand à Jean-François Copé, en passant par Gérard Larcher et Michel Barnier, nous avions sous les yeux tout ce qui incarne le vieux centre droit soumis aux oukases idéologiques de la gauche bien-pensante et confit dans la niaiserie européiste. Décidément, il faut que « tout change pour que rien ne change »...

Le discours de Bruno Retailleau est fort et lucide, mais les Français attendent des actes. De surcroît, si les questions de rétablissement de l’ordre public, de lutte contre l’islamisme, de réduction de l’immigration sont évidemment cruciales, elles ne peuvent constituer à elles seules les objectifs d’une politique pour la France. Quelles sont les vues du président de LR en matière européenne ? Rester au très fédéraliste groupe PPE comme M. Bellamy et ses faibles troupes ? Et cet ex-sénateur serait-il décidé à mettre à bas le mille-feuille administratif et à sortir du lénifiant discours sur les collectivités locales qui sont d’une intempérance notoire en matière de bureaucratie ? Serait-il prêt au bras de fer idéologique pour sortir de la logique administrative et nivelante qui condamne ceux qui entreprennent, travaillent et réussissent à un enfer fiscal et redistributif ? Le sujet n’est pas une énième alternance mais le renversement de tout un système de gouvernement et d’action politique.

Pour le Vendéen, le passé et le passif de sa famille politique pèsent comme un boulet au pied. Est-il prêt à scier la chaîne et à oser coopérer avec toutes les familles de la droite ? « Voilà la question. »

Picture of Stéphane Buffetaut
Stéphane Buffetaut
Chroniqueur à BV, élu de Vendée, ancien député européen

Vos commentaires

43 commentaires

  1. Je ne suis pas pour Retailleau, je ne suis pas pour Le Pen (qui perdra[it] dans tous les cas son troisième débat de l’entre-deux-tours des présidentielles), mais je suis frappé par la hargne et la faiblesse des arguments opposés à l’élu vendéen. Côté R.N., on n’est décidément pas prêt à l’union des droites… alors que les municipales en 2026 devraient fournir un magnifique tremplin à cette (nécessaire) union.

  2. Certes, mais il faut hélas constater que, de leur côté sauf quelques rares exceptions, les autres droites, et le RN en premier lieu, ne font rien pour le moment pour présenter une unité de vue sur les points essentiels, alors que c’est à l’évidence la seule solution pour sortir d’un macronisme bis qui se dessine avec E. Philippe (qui, ne pas l’oublier ,, préconisait s’il n’y avait pas d’alternative, à voter communiste plutôt que RN). Pendant 40 ans, les électeurs de droite ont été cocufiés et LR ne peut en effet s’en prendre qu’à lui même s’il n’est guère crédible. Mais il est non moins certain qu’il faudrait sortir du syndrôme de droite la plus bête du monde, car la gauche n’aura aucun scrupule à renier tous les discours anti Mélenchon pour se rallier à lui avec un bel ensemble si nécessaire..

  3. Un nouveau « décapeur » » » à haute pression », ?……..à droate ?……….
    (car le mot utilisé par le tout nouveau Français issu de Hongrie conseillé par un mentor aux ailes douteuses ,était comme le frigidaire une marque de pub. ) MAIS ,sans eau, ni électricité ni pression !
    « EST instauré  » à l’aide d’idées copiées au et du RN ,ce nouveau « zoo « rot » . cette nouvelle arche , de bric et broc, tel les « gachistes » issues de minorités minoritaires ,et tribus divergentes prêtes à touts pour continuer à bouffer du caviar au miel en toutes libertés et trahisons.
    Mais de quiriton ?encore une foutaise pour gêner le retour à la « salubrité de notre pays » ?
    IL FAUT un décapage par « grenaillage » …. en profondeur tant les calamines sont profondément ancrées ?
    Bon courage au « sableur-décapeur  » RN ! si les magouilles et magouillages , permettent son avenue.

  4. Mr Buffetaut , comment se porte Véolia ?, pour avoir tant de marchés , comment cette société s’y prend elle ?? le passé de Sarkozy ? parlez vous de la crise monétaire de 2009 pour laquelle aucun français n’a perdu ses avoirs , ou de sa condamnation sans preuve et sans enrichissement perso ? vous devriez regarder tous les chiffres de 2011 imigration déficit etc.. vous savez les graphiques de Bayrou lors de sa conférence de presse et comparez les maintenant,regardez bien l’aggravation des chiffres des 13 dernières années ? Après vous pourrez critiquer !! La critique est facile mais l’art est difficile , méditez !!

  5. Retailleau est il souverainiste où fédéraliste , je pencherai plutôt pour le deuxième et si c’est le cas , n’attendons pas grand chose où si peu bridé qu’il sera et dans le premier cas , est il prêt à prendre toutes les mesures citées hier soir par Philippe de Villiers sur Cnew , j’en suis pas sur non plus .

  6. Monsieur Retailleau devrait s’inspirer d’un sage proverbe africain livré à sa réflexion: « Lorsque l’on passe la nuit dans la mare, on se réveille crapaud ». S’il ambitionne de relever la France, il doit avoir l’audace de s’extirper du marécage politique régnant et renouer avec la philosophie gaulliste du « Rassemblement du Peuple Français ».

  7. Stop avec retailleau, comment pourrait il être crédible en étant ministre de macron et du gouvernement bayrou où il y a des ministres socialistes et du modem entre autre. Président des LR, le parti qui a le plus trahi. Il suffit de voir qui l’entourait leur de son élection à la tête de ce parti, non il est impossible de lui faire confiance. Tous ceux ou qui ont été ministre de macron sont à bannir. Macron est le fossoyeur de la France, c’est lui le responsable du déclin du pays. Accepter d’être son ministre c’est l’approuver et le soutenir, c’est un fait .

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

La priorité devrait être la protection de la société, pas la rédemption du coupable
Gabrielle Cluzel sur CNews

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois