[Tribune] La face cachée du bilan d’Emmanuel Macron pour les personnes en situation de handicap

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Il y a une semaine, le 3 décembre, avait lieu la Journée mondiale des personnes en situation de handicap. Nul n’est à l’abri du handicap : accidents de la vie, de la route, du travail, maladies génétiques, chroniques, la liste est longue… Le vécu d’un handicap lourd (reconnu à plus de 80 %) n’est souvent qu’indifférence, solitude ou dépendance, non-accessibilité, chômage et pauvreté, douleurs physiques ou morales, agressions, absence de vie sexuelle voire suicide. Le problème n’est pas tant la différence entre une personne valide et une personne invalide mais l’acceptation de la différence par notre société. Je suis moi-même handicapé (reconnaissance à 95 %), atteint d’une maladie génétique (rétinite pigmentaire) qui entraîne inéluctablement la cécité.

Depuis 2017, le handicap est la première cause de discriminations (emploi, logement, transport, école…). Bien avant le racisme, l’inégalité hommes/femmes et ce, même si la sensibilisation du grand public sur le handicap progresse. Profitons-en pour faire le point sur le premier quinquennat d’Emmanuel Macron. À la fin du débat du second tour en 2017, il avait dédié sa « carte blanche » au handicap. Mais qu’en est-il, cinq ans après ?

On peut reconnaître quelques timides pas en avant : le droit de vote pour les personnes handicapées sans l’accord d’un juge, les droits à vie pour les personnes à handicap irréversible : plus besoin de renouveler son dossier auprès de la maison départementale de l’autonomie (MDA) et augmentation de l'allocation adulte handicapé (AAH).

Cette augmentation est toutefois une « vraie-fausse » augmentation. Car, n’étant pas calculée sur l’inflation, elle a fondu comme neige au soleil et, conséquence, la différence entre l’AAH et le seuil de pauvreté sera encore plus importante en 2023 qu’en 2017 !

Mais la présidence Macron est aussi à l'origine de pas en arrière :

- Le candidat Emmanuel Macron de 2017 avait promis de passer l’AAH au-dessus du seuil de pauvreté. Malgré la « fausse-vraie » augmentation : une promesse non tenue !

- La baisse en novembre 2019 du plafond de ressources d’environ 1.000 euros.

- La suppression de l’allocation « complément de ressources » accordée aux personnes à handicap lourd (-75 euros).

- La loi ELAN (évolution du logement, de l'aménagement et du numérique) de 2018 : 20 % de logements pour les personnes à mobilité réduite, contre 100 % auparavant.

- Le refus catégorique d’Emmanuel Macron et de Mme Sophie Cluzel (ex-secrétaire d’État au Handicap) de déconjugaliser les revenus du conjoint pour le calcul au droit de l’AAH. La majorité bloque la loi le 17 juin 2021 à l’Assemblée nationale : en réaction, une centaine de députés, dont Nicolas Dupont-Aignan, quittèrent l’Hémicycle (*).

Résultat ! le handicap est toujours, et pour la cinquième année consécutive, la première cause de discrimination et le taux de chômage des handicapés reste toujours deux fois supérieur à celui des personnes valides. À défaut de « carte blanche », le bilan de M. Macron est plus proche de la « copie blanche ». C'est un tiers de communication, un bon tiers de contre-vérités, un gros tiers d’autosatisfaction et un petit tiers de mesurettes. Oui, ça fait quatre tiers… comme dans Marius, de Pagnol.

(*) Un an après, n’ayant plus la majorité absolue à l’Assemblée nationale, le nouveau gouvernement a proposé ce qui avait été refusé vigoureusement pendant cinq ans. Hypocrisie ?

Picture of Erick Damaisin
Erick Damaisin
Délégué national pour la dignité des personnes en situation de handicap de Debout La France

Vos commentaires

14 commentaires

  1. Quand certains vont’ils comprendre qu’il n’y a absolument rien à attendre de Macron pour les français qu’il méprise au plus haut point!. C’est ignoble de ne pas tout faire pour les personnes handicapées.

  2. Macron a macronné comme disent les Ukrainiens.
    Combien coûterait la politique qu’il avait promise en 2017 comparée à l’AME ? Une goutte d’eau !
    Mettre de simples normes en place, comme l’obligation pour les logements neufs et les rénovations de mettre des portes de 83cm de large au minimum. Mais des portes en 73cm dans lesquelles un fauteuil ne passe pas sont toujours installées. Hors sans handicap définitif, il peut arriver à tout un chacun d’avoir besoin d’un fauteuil pendant quelques mois. Ça ne ferait pas tout, mais ça améliore la vie de celui qui souffre de ce handicap et de sa famille.
    Et comme les media s’intéressent plus à la couleur et peau et à la « bonne religion » (l’Islam en l’occurrence), les handicapés passent au dernier plan.
    Et certains enfants n’ont pas d’AESH, d’autres qui ne peuvent aller à l’école n’ont pas de place en centre spécialisé (beaucoup d’autistes notamment).
    La « politique » de Macron, c’est la com et la com. Si les « résultats » sont mauvais, ça n’est pas de sa faute. C’est que les autres n’ont pas compris et ne font pas ce qu’ils font pour reconnaître ses « grand efforts » et ne savent pas voir ses résultats. Ce sophiste qui fait dire au chiffres ce qu’il désire qu’ils disent disqualifie ceux qui lui montre qu’il a tort.
    Il est bien de gauche, il n’y a que la mauvaise fois qui compte !

  3. Dans le domaine des handicapés macron est aussi, voire plus mauvais que dans tous les autres domaines. La vie des français ne l’intéresse pas, seule son aura compte pour lui. Vivre handicapé dans notre pays c’est faire face à la précarité dans l’indifférence quasi générale, faire face aux trottoirs non sécurisés, aux marches non accessibles aux fauteuils, aux appartements non aménagés….c’est triste!

  4. Les handicapés ne sont pas une préoccupation pour les gouvernements successifs qui ne prennent aucune mesure pour améliorer leur situation matérielle. J’ai un fils handicapé de catégorie 2 qui a, durant ses années d’activité, cotisé à une caisse de prévoyance. Il s’agit d’un organisme privé qui ne bénéficie pas de financement de l’Etat. Il perçoit une pension d’invalidité de cette caisse de prévoyance privée, pension soumise à l’impôt. L’Etat se comporte d’une manière abjecte envers cette catégorie de personnes handicapées surtout quand on voit que ce même Etat est généreux en distribuant des millions d’euros à toutes sortes de causes ou d’associations. Il se montre fort avec les faibles qui considèrent à juste titre que c’est de l’injustice.

  5. Vous voudrez « les droits à vie pour les personnes à handicap irréversible : plus besoin de renouveler son dossier auprès de la maison départementale de l’autonomie (MDA). »
    L’enfer c’est les autres, ceux qui récupèrent ces cartes sans date limite : ils volent la place de stationnement qui ne leur est pas destinée et privent bon nombre d’handicapés de leur droit. Ils agissent omme si la carte était rattachée au véhicule et non à la personne dans n’importe quel véhicule. Alleger le renouvèlement oui mais certainement pas l’éliminer.

  6. Vous oubliez comme pas en arrière,
    * le manque criant d’éducateurs spécialisés, moniteurs, etc… kinésithérapeutes dont souffrent tous les centres recueillant des personnes handicapées lourdement, enfants comme adultes.
    * le manque criant de places pour les accueillir, des listes d’attente impliquant des parents devant rester à la maison pour s’occuper 24h/24 de leur proche lourdement handicapé…
    et certainement beaucoup d’autres pas en arrière tant les handicaps sont différents

  7. Macron ne s’intéresse qu’à une catégorie de personnes et pas du tout aux handicapés. La faible avancée des décisions à ce sujet n’est donc pas une surprise. Suite à un AVC, ma mère se retrouve hémiplégique. Je découvre à cette occasion le vide sidéral de l’accompagnement de cette situation. @Bressan dit qu’il faudrait faire une étude sur les éducateurs, j’ajouterai qu’il faut aussi faire une étude sur les assistantes sociales.

  8. Je confirme les affirmations de M. Damaisin et voudrais apporter mon témoignage. Ma fille est trisomique 21, handicapée à 80%. Macron n’a pratiquement rien apporté au handicap mais certains problèmes se sont aggravés sous Sarkozy autour de 2007. Il a introduit la notion de rentabilité des Esats que certains handicapés comme ma fille n’ont pas pu suivre, ni mentalement ni physiquement. Depuis cette époque les Esats ont incorporés des employés dits « handicapés sociaux » bien plus rentables. On a donc melangé 2 sortes de handicap incompatibles. Ma fille n’a cessé de se faire traiter de gogole par ses collègues asociaux et n’a plus voulu travailler en Esat. Plusieurs trisomiques ont fait comme elle. Le chef de service lui a même dit qu’elle aurait autant d’argent en restant chez elle plutôt que d’aller travailler. Bref il privilégiait la rentabilité. Je désirais d’ailleurs demander à BVoltaire s’il lui serait possible de faire une étude sur le sujet tant il y a à dire (y compris sur la qualification des éducateurs). Quand à l’indifférence de la société, le nombre de lecteurs et de réactions sera révélateur de l’intérêt que le sujet de M. Darmaisin suscitera.

  9. Pour la macronie deux choses importent, le rapport de force et son image. Organisez un blocage des Champs Élysées avec des patients en fauteuils roulants et lits médicalisés et vous obtiendrez ce que vous voudrez.

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