Sur toutes les chaînes : le grand feuilleton des masques

SALOMON

On sait que nos gouvernements, et plus particulièrement le tout dernier (sans doute parce qu’on a oublié les précédents), sont passés maîtres dans l’art de dire tout et son contraire, c’est-à-dire n’importe quoi, au gré des événements et dans le sens du vent, mais lorsque ce vent ne cesse de tourner et que, par son amateurisme face à une crise, ils ne contrôlent plus rien, on atteint des sommets. Concernant celle du coronavirus, ce serait une farce des plus drôles s’il ne s’agissait pas de ces morts par milliers qu’on vient nous égrener tous les soirs. Avec ce mélange de tragique et de comique, cette sorte de shakespearien grotesque que la télévision nous déroule depuis des semaines, l’actuel gouvernement mérite l’apothéose sur l’Olympe des branquignols ! Et l’on est toujours étonné que des Français, confondant sans doute la politique avec les comédies et les farces qu’ils vont voir au théâtre ou cinéma, continuent d’écouter, de prendre au sérieux et de voter pour des gens pareils. On a les gouvernants qu’on mérite…

Concernant tout particulièrement le feuilleton des masques - et l’on ne pouvait mieux choisir la métaphore puisque le masque est aussi l’objet symbolique de l’hypocrisie (hypocritès, en grec, désigne l’acteur) -, on a vu et entendu à la télévision, ces dernières semaines, les membres du gouvernement et leurs différents porte-parole, relais médiatiques et autres cire-pompes comme le docteur médiatique Cymès affirmer toute chose et son contraire, tout ce qui pouvait exister en matière d’affirmations péremptoires aussitôt contredites, et surtout les sottises les plus énormes… Et, à tout seigneur tout honneur, la moins énorme n’étant pas celle de la porte-parole du gouvernement, expliquant, pour justifier la pénurie, que mettre un masque n’était pas si important et qu’elle même ne savait pas comment il fallait le mettre.

Au fil des élucubrations télévisées, le masque devenait nécessaire ou inutile en fonction du stock disponible, souvent proche de zéro, ou des masqués concernés. Inutile, par exemple, pour les forces de l’ordre, mais utile pour les soignants, les deux se plaignant de toute façon de n’en pas avoir… D’autant que, sur FR3, on voyait bien que même Zorro avait le sien. Un jour, cela ne servait à rien, le lendemain, tout le monde en aurait, mais le surlendemain, qu’importait que l’on en eût, cela ne changerait pas grand-chose. Mais l’on voyait tel ministre expliquant que des millions de masques étaient en train d’être fabriqués - on se demande pourquoi, puisque tel autre disait que ça ne servait à rien -, et puis il y avait aussi la chronique des stocks de masque perdus et retrouvés, achetés, fabriqués, rapatriés, interceptés, volés, revendus… Le feuilleton des déclarations définitives d’un jour va sans doute se poursuivre, sur le masque ou sur d’autres sujets, comme par exemple sur la chloroquine, substance vénéneuse dénigrée, mais soudain autorisée face à la levée de boucliers, ou sur l’utilité des tests de dépistage, ou sur un confinement qui s’arrête où commencent certains quartiers. Et l’on va voir encore les politiques se décharger sur les scientifiques lesquels, devenus politiques, voudront leur emboîter le pas, et les journalistes porte-voix du gouvernement répercutant à l’infini cette cacophonie à coups de reportages bébêtes et d’interviews d’experts bardés de diplômes. Et cependant, on ne sait plus où mettre les patients en train de mourir puisque, depuis des années, on supprime des lits d’hôpitaux, rentabilité oblige !

La France a un gouvernement d’amateurs, on le sait, le président de la République l’a dit, mais en plus d’être des amateurs, on ne comprend pas ce qui les oblige à être des branquignols. Et, certes, ce n’est pas un crime, et chacun a le droit d’être un branquignol, et même, comme a dit Rabelais, « par le monde il y a beaucoup plus de couillons que d’hommes », mais dans ce cas, pourquoi aspirer aux plus hautes responsabilités ? Mieux vaut se chercher un second rôle dans La Septième Compagnie ou Le Gendarme de Saint-Tropez.

Jean-Pierre Pélaez
Jean-Pierre Pélaez
Auteur dramatique

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