[STRICTEMENT PERSONNEL] Les désaccords de Nouméa

Que ferait d’une Calédonie indépendante, livrée à elle-même, la minorité canaque ?
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L’actuel ministre des Outre-mer français (petite curiosité linguistique, après avoir expurgé le vocabulaire officiel des mots « colonies » puis « Union française », ce n’est que depuis l’effondrement de l’Empire français, cette construction aussi fugace que grandiose, que l’on a imaginé de désigner par ce curieux pluriel les rares et minces vestiges qu’il nous en reste, comme si ce changement de nombre compensait sa disparition) Manuel Valls, donc, s’il faut l’appeler par son titre, est rentré bredouille de son troisième séjour en Nouvelle-Calédonie et, donc, de sa troisième tentative pour faire accepter par les deux parties en présence une solution de compromis, porteuse d’apaisement et garantie d’un avenir commun.

Il n’y va point de sa faute. La mission confiée par l’amusant Bayrou à notre dernier ambassadeur à Nouméa était aussi impossible que celle que le vieux renard de Pau avait assignée à son conclave pour rire sur les retraites. Dans le premier cas, comment atteindre un consensus sur le pivot de la réforme des retraites, le recul de l’âge de départ, dès lors que les uns en font une condition sine qua non et que les autres exigent que l’on y renonce avant toute discussion ? Dans le deuxième, qui pouvait espérer un accord entre des indépendantistes qui ont pour objectif, au minimum de distendre, au mieux de rompre, les liens de Nouméa avec la France et des loyalistes qui entendent bien maintenir et si possible renforcer en les institutionnalisant ces mêmes liens ?

La loi du premier occupant...

« Le premier occupant, est-ce une loi plus sage ? » écrivait notre bon La Fontaine, en défense du malheureux Jeannot Lapin chassé du « paternel logis ». Voire.

Il n’est pas douteux que les Canaques (que, pour faire plus chic et surtout plus authentique, plus original, des linguistes subtils décidèrent un jour de rebaptiser « Kanaks ») répondent aux critères constitutifs de ce qu’on appelle les peuples premiers ou les peuples autochtones. Totalement analphabètes et occasionnellement cannibales, aussi éloignés, isolés, indemnes de tout contact avec d’autres civilisations, d’autres cultures que les Papous de Nouvelle-Guinée, ils subsistaient, vivaient et se reproduisaient dans les conditions de ce que nous appelons l’âge de pierre lorsque, en 1853, l’empire de Napoléon III décida de rattacher leur archipel paradisiaque à notre lointaine métropole et, du coup, au reste de la planète. Étaient-ils plus heureux avant notre arrivée, étaient-ils plus libres ? On ne peut contester qu’ils n’avaient demandé ni à nous rencontrer ni, et moins encore, à nous être assujettis, à être colonisés, et plusieurs révoltes, durement réprimées, en témoignèrent, avant de déboucher sur la situation actuelle, l’insurrection dérisoire et le climat de guerre civile qui prévaut sur cette terre lointaine qui, en bientôt deux siècles, nous est devenue si proche.

Le temps a fait son œuvre, et le lent progrès, la communauté de vie, de langue et de destin qu’a bâtie, à travers mille vicissitudes, une histoire commune. « Le premier occupant… » ? Encore faudrait-il qu’il ait résisté, ici et là, à la colonisation, à la répression, à l’assimilation, à l’épreuve des siècles et, dans certains cas, à l’extermination. Rendre le Canada aux Hurons et aux Algonquins, restituer les États-Unis aux Sioux et aux Cheyennes, le Mexique aux Aztèques, le Pérou aux Incas… Et pourquoi pas l’Antarctique aux pingouins ?

Et de l’Azerbaïdjan ?

Il se trouve - et ce n’est pas un hasard,- que si la Nouvelle-Calédonie, dont l’Azerbaïdjan et la Corée du Nord, entre autres pays ou régimes épris de liberté, exigent devant l’ONU la décolonisation, représente au regard du processus qui a rendu leur indépendance à l’Asie et à l’Afrique, un cas particulier, c’est qu’elle a été finalement la seule colonie de peuplement dont l’expansion de la France ait pu se flatter au cours de son Histoire. À l’ombre du drapeau tricolore, les Kanaks n’ont pas été massacrés, mais les Calédoniens d’origine extérieure, ces migrants pour la plupart d’origine européenne, au grand dam des puristes de la décolonisation et des fanatiques du métissage, sont aujourd’hui plus nombreux sur l’archipel que les descendants des Kanaks autochtones. On nous a assez fait valoir, et ce n’était pas faux, hélas, qu’au Maghreb, les pieds-noirs n’avaient jamais été qu’une minorité. Et les suites de cette réalité ont fait jurisprudence.

Que deviendrait une Corse indépendante ? La proie des clans et des mafias. Que ferait d’une Calédonie indépendante, convoitée par l’Australie comme par la Chine, débarrassée des Caldoches, des Français, de leur présence et de leur force, privée des subventions de Paris, livrée à elle-même, minée par ses divisions ancestrales, réduite au statut des micro-États mélanésiens et polynésiens, la minorité canaque ? « La loi de la majorité, est-ce une loi plus juste ? », nous dirait La Fontaine.

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Dominique Jamet
Journaliste et écrivain Président de l'UNC (Union nationale Citoyenne)

Vos commentaires

31 commentaires

  1. encore des conséquences du passage de mitteurand 2 septennats, des promesses électorales faites aux canaques, des actions des pisani et autre sinistre roccard, du Droit de vote bafoué : plus de 3 référendums
    perdus par les canaques malgré des listes électorales sélectives dont les Blancs européens étaient exclus, la démocratie socialo-communiste !
    certes les chinois aimeraient récupérer plus de nickel, les Australiens et les usa …

  2. Il y a, je pense, nombre de renards à l’affût du poulailler que représente la Nouvelle-Calédonie.
    Parmi eux, l’Australie, le Japon, les Etats-Unis et la Nouvelle-Zélande qui ne rêvent que de s’emparer de cet archipel qui, nickel mis à part, contribue à faire de la France, la deuxième puissance maritime mondiale : elle possède la deuxième ZEE du monde.

  3. Si la France quitte la Nouvelle-Calédonie, elle deviendra la convoitise d’autres pays qui n’attendent que cela. Mais pas sur alors que les Calédoniens soient gagnants. Le peuple Calédonien s’est déjà prononcé suffisamment pour rester Français. Rompre cet accord serait trahir les Calédoniens.

  4. L’indépendance en ferait une nouvelle Algérie. Dans ce cas il conviendra de ne pas reproduire les mêmes bêtises. Indépendance donc état étranger et sans accord particulier et suppression de toute aide. De toute façon ils seront vite convoités et colonisés.

  5. Les indépendantistes canaques ou Kanaks (il faudrait gloser sur la vertu révolutionnaire de la lettre K !) sont officiellement pour l’indépendance de « la Kanaky » mais pas vraiment pressés de la réaliser (comme en Polynésie d’ailleurs). Mis au pied du mur, les plus sensés se rendent compte des coûts démesuré de la mise en place des structures institutionnelles d’un Etat indépendant : avec quoi et comment les financer ? L’aide intéressée des Chinois qui ont déjà mis sous tutelle les iles Salomon voisines ? Celle de l’Azerbaidjan qui en veut à la France d’aivoir bien modestement aidé l’Arménie agressée par eux ? Et cela pour ressembler aux autres micro-Etats insulaires voisins dont l’indépendance est également menacée par les appétits de l’ogre voisin (et la montée des eaux) ? Et quelle langue « nationale » adopter ? Il y a 28 langues autochtones recensées sur « Le Caillou », pour une centaine de tribus qui se faisaient régulièrement la guerre d’une vallée à l’autre avant la conquête française qui les a finalement pacifiées après moultes péripéties. Mais sur ces 28 langues il y en a 4 plus répandues que les autres. Comment en choisir une sans mécontenter les autres ? De belles bagarres en perspective ! Et l’indépendance, si elle se traduisait par le départ des Caldoches et autres populations exogènes plus récentes se traduirait par la ruine économique, le chômage massif, calamités déjà bien enclenchées par les émeutes destructrices de l’an dernier. Les « indépendantistes » les plus lucides et cultivés savent bien tout cela. Ils occupent les postes officiels de commande à l’assemblée territoriale et jouissent de titres et de revenus conséquents qu’ils n’ont pas envie de perdre pour suivre les lubies de quelques excités et la majorité canaque est bien consciente de la sécurité et des avantages qu’elle tire de son appartenance à la communauté française, surtout si elle se compare à ses voisins : qu’est devenu le Vanouatou, où, là-aussi, la Chine a avancé ses pions . La seule solution viable, c’est de faire de la Nlle-Calédonie un centre de rayonnement de la France dans son environnement immédiat, dans lequel les intellectuels et les cadres canaques ou Kanaks (qui existent et qu’il faut multiplier en nombre) trouveraient leur valorisation personnelle et collective. Pour cela, une éducation-formation des jeunes, un développement universitaire protégés des influences idéologiques funestes qui veulent leur faire prendre des vessies pour des lanternes, doivent être sérieusement mis en oeuvre. Ce n’est pas Manuel Valls qui est le mieux placé pour ce faire !

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