Vendredi, à Paris, se sont jouées de manière concomitante deux scènes révélatrices.

D’un côté, des spectateurs du match « historique » mais maintes fois joué entre Nadal et Djokovitch, en demi-finale du tournoi de Roland-Garros, ont eu « le droit » de rester jusqu’à la fin de la rencontre et, donc, de « braver » le couvre-feu que l’on nous inflige depuis des mois, en raison « de circonstances exceptionnelles ». Sans doute une conséquence de la bronca fort policée des spectateurs d’il y a quelques jours qui avaient été priés de quitter les lieux avant la fin du match. Les protestations des spectateurs qui menaçaient gentiment de se rebeller contre cette décision absurde - « On a payé ! » criaient-ils - ont fait le tour des réseaux sociaux.

Vendredi soir, docilement, les mêmes spectateurs ont entonné un « Merci Macron » (Merci Monseigneur ?), musique douce aux oreilles jupitériennes. Fermez le ban, tout est rentré dans l’ordre : on aura eu, au passage, une caricature, surexploitée par les médias de tous bords, sur la France d’en haut privilégiée sur décision du Château. Comme l’écrit fort justement Mathieu Slama, sur Twitter : « Je ne sais pas ce qui est pire, le fait qu'il faille une dérogation de l'Élysée pour qu'un match de tennis se finisse ou bien les "Merci Macron" des spectateurs... » On vous laisse juges.

À quelque distance de là, des lycéens réunis aux Invalides, la plupart sans masques et sans gestes barrières - horreur ! -, ont été dispersés de manière pas très pacifique par les forces de l’ordre. Les scènes de liesse, d’effusion, de fête, de vie en somme, étant visiblement insupportables aux yeux des autorités.

Ont-ils seulement vu à quoi ressemble une sortie de lycée à l’heure du goûter ? On ne peut indéfiniment empêcher des jeunes, qui ont déjà très sagement tenu plus d’un an, de vivre normalement. La nature humaine reprend tranquillement ses droits, il était temps.

On peut gloser indéfiniment sur ce deux poids deux mesures, sur la France d’en haut chère à Macron - c’est son électorat - favorisée de manière un peu trop visible par rapport à la France d’en bas réprimée. D’après les images, il n’est pas certain que la France « des gueux » se soient retrouvée aux Invalides. Ce qui est plus certain, c’est que l’effet sur les jeunes des pitreries de McFly et Carlito à l’Élysée se sera un peu estompé. Dans cette affaire, Macron joue le rôle du diviseur, ce qui est périlleux et idiot dans un pays déjà fracturé et en ébullition.

On aura surtout vu que ce couvre-feu comme les gestes barrières obligatoires en extérieur ont une raison tout autre que scientifique.

Toujours au même moment tourne en boucle cette scène où, au sommet du G7 en Grande-Bretagne, Emmanuel Macron entreprend Joe Biden, lui prenant le bras, à quelques centimètres de lui, sans masque évidemment.

Les gestes barrières ? Envolés, et c’est fort heureux, de nombreux médecins dont le docteur Guillaume Barucq s’étant exprimés sur leur inutilité en matière sanitaire : « Le masque en extérieur ne sert à rien d’autre que de se protéger contre un danger imaginaire. »

Peut-être pas si imaginaire que cela. Il est de plus en plus évident que le maintien du couvre-feu comme du port du masque en extérieur sont des mesures de contrôle social, leur absurdité ne pouvant s’expliquer autrement. Les autorités craignent-elles une explosion, une catharsis généralisée mêlant indistinctement banlieues en ébullition, gilets jaunes réveillés, Français appauvris, épuisés ou tout simplement soucieux de retrouver leurs libertés les plus élémentaires ?

Par leur absurdité autant que leur injustice, les scènes de vendredi, qui sont appelées à se reproduire, montrent que les digues craquent et que l’adhésion populaire à cette nouvelle normalité que l’on entend nous imposer n’est pas gagnée.

6859 vues

12 juin 2021 à 11:57

Partager

La possibilité d'ajouter de nouveaux commentaires a été désactivée.

Les commentaires sont fermés.