Record de chaleur en Antarctique : autopsie d’une exagération médiatique

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Une grande partie des médias s'est déchaînée, ces derniers temps, un record de chaleur inquiétant aurait été battu en Antarctique : 20,75 °C ! Au vu de ce chiffre, les rédactions se sont affolées puisque, par inculture totale, elles sont persuadées qu’il fait toujours -15 °C à -50 °C dans ce vaste continent gelé. L’Apocalypse était en marche, l’inlandsis de l’Antarctique allait fondre en partie, voire en totalité, les mers monter de plusieurs mètres et les côtes être submergées.

Or, cette information est à replacer dans son contexte. D’une part, le précédent record prétendument battu était de 19,8 °C. Il a été établi en 1982 sur l’île Scilly des Orcades du Sud, tout au début du réchauffement indéniable que nous connaissons depuis les années 1970 (+1,1 °C, en moyenne, sur l’ensemble de la planète après avoir perdu 0,3 °C entre 1940 et 1970). Si l'on ne s’intéresse qu’à l'Antarctique continental, le record est de 18,4 °C (7 février 2020) à la base argentine Esperanza, située dans la pointe nord de la péninsule Antarctique ; or, celle-ci remonte fortement vers l’Amérique du Sud et peut être épisodiquement touchée par des vents chauds qui font brutalement remonter les températures ; deux jours avant le 5 février, à la même heure, la température n’était que de 0,3 °C ! La situation de cette base n’est absolument pas caractéristique du continent Antarctique. À noter, également, que l’ancien record était de 17,5 °C, établi en 1975 dans des circonstances analogues.

Quant au « record » de 20,75 °C, il ne sera pas comptabilisé car il n’a pas été pris dans des conditions standard : l’instrument était placé à 1 mètre du sol et non 2 mètres, comme d’ordinaire. Il s’agit, en fait, d’une mesure prise dans le cadre d’une étude géologique et non météorologique. L’appareil était trop exposé au rayonnement solaire, ce qui a faussé le résultat. En outre, personne n’évoque un résultat plutôt rassurant : cette année, la banquise antarctique est proche, en février 2020, de sa moyenne établie dans les années 1980-2010, comme le prouve ce site.

Si l’Antarctique était confronté, dans son ensemble, à un réchauffement lors de l’été austral de 2020, la banquise serait proche de ses minima ou, même, les aurait largement dépassés. Il n’en est rien et nous pouvons nous rassurer : le réchauffement (indéniable) constaté est purement local et ne concerne que la péninsule Antarctique.

D’autre part, l’extension de la banquise Arctique était bien supérieure à celle de l’an dernier, mais elle vient de subir, comme cela est fréquent, un net coup d’arrêt dont on n’est pas encore sorti et dont il est difficile de mesurer l’ampleur. Néanmoins, il est probable qu’on dépassera l’étendue de 2019. En outre, au Groenland, le grand glacier Jakobshavn a repris son expansion, à la grande surprise des scientifiques.

Les médias se ruent sur le sensationnel ; ils n’ont aucun recul et ne cherchent pas à remettre les résultats dans leur véritable contexte scientifique. Il faut avant tout affoler les foules, leur faire croire que notre civilisation va s’effondrer du fait d’un réchauffement devenu incontrôlable. Mais, comme disait Talleyrand, « tout ce qui est excessif est insignifiant ».

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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