Rachida Dati contre Anne Hidalgo : France au travail et France des bobos ?

DATIHIDALGO

Vaille que vaille, et ce, même en pleine pandémie planétaire – l’invasion des zombies n’est plus très loin –, la vie reprend ses droits ; la vie politique, surtout. La preuve par le duel au sommet qui s’annonce, opposant Rachida Dati et Anne Hidalgo à Paris.

La joute n’est pas anodine, sachant qu’entre ces deux demoiselles, les accusations de sexisme et de misogynie seront délicates à étayer. Ajoutez un délicieux frisson canaille, un des frères Dati ayant eu un peu maille à partir avec la Justice, et l’on voit bien qu’en ces temps de « bienveillance », Dati part peut-être un peu plus armée qu’Hidalgo. D’ailleurs, rien que ce patronyme… « Hidalgo », qui renvoie aux heures les plus sombres du patriarcat de l’homme blanc européen, probablement catholique et sûrement âgé de plus de cinquante ans.

Voilà donc Rachida Dati, maire du VIIe arrondissement, qui n’hésite pas à mordre Anne Hidalgo, sa mairesse de tutelle, en plein dans le jambonneau. Sur LCI, le 22 avril, elle fulmine : « La mairie de Paris n’a pas pris de dispositions et ne nous a pas donné de consignes, ni d’instructions, ni même d’anticipation pour gérer la crise. » Pis : cette « mairie centrale » a « annoncé 500.000 masques d’ici fin avril. On a demandé le contrat de commande. Pas de réponse. »

Et maintenant, Anne Hidalgo accusée d’autoritarisme. Après les libéraux-libertaires, les libéraux-autoritaires ? On n’y est pas encore, mais pas loin. D’ailleurs, que fait cette dernière, pour lutter contre le péril ? De nouvelles voies cyclables, évidemment et à titre provisoire, tel qu’il s’entend. La France étant ce qu’elle est, le terme de « provisoire », quand prononcé par les canaux institutionnels, veut souvent dire « permanent », à l’instar de l’impôt sur le revenu, créé pour redresser le pays en pleine Grande Guerre. L’impôt est toujours là et, selon les sources les mieux informées, ledit conflit serait fini depuis au moins… 1918.

Ces nouvelles pistes cyclables, donc, qui devraient suivre les itinéraires de métro traditionnellement les plus empruntés, facilitant ainsi « le retour des Parisiens, mais aussi des habitants de banlieue à leurs activités professionnelles ». Si l’on comprend bien, les habitants de la proche couronne, de Montreuil à Bagnolet tout en passant par Montrouge, habitant des lofts pourront venir travailler à Paris en bicyclette, et même avec Paulette sur le porte-bagages, tel que jadis chanté par Yves Montand.

Mais quid des autres ? Ces « chances pour la France », femmes de ménages de Bobigny, livreurs de pizzas de Sarcelles, préposés à la plonge de Grigny dans ces restaurants où il n’y a pas de prix sur les cartes et autres esclaves issus de cette lointaine banlieue, qui soignent les parents et grands-parents des électeurs d’Anne Hidalgo tout en s’occupant de leurs enfants ; devront-ils pédaler cinquante kilomètres à l’aller et autant au retour ? Vive la sociale, le mépris de classe et l’antiracisme mondain !

En la matière, Rachida Dati sait au moins à peu près de quoi elle parle, quand affirmant : « Cette France qui travaille tout en vivant dans des situations précaires : aides-soignantes, infirmières, ambulanciers, aides à domicile, femmes de ménage, caissières, livreurs ou encore personnel pénitentiaire. » Soit pas exactement le même genre de précarité des intermittents du spectacle, éternels geignards à bonnets péruviens faisant semblant de travailler pour films et spectacles quittant l’affiche avant même que la colle ne soit sèche.

Et notre amazone de prévenir : « Ce sont ces Français, ceux qui nous ont alertés il y a quelques mois sur les ronds-points, qui tiennent aujourd’hui le pays à bout de bras. »

Personnellement, j’aurais plutôt tendance à kiffer Rachida.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

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