« Portrait de Marianne avec un poignard dans le dos » : un paquebot échoué

Durant le mois d'août, Christian Combaz fait l'honneur à Boulevard Voltaire de publier des extraits de son très dérangeant "livre annulé".

Il y a plusieurs mois, un journaliste parisien publiait un recueil de ses articles sous le titre cinglant, mais abusif, de Suicide français, titre qui permettait de croire que notre décadence était un phénomène naturel, comme la pulsion fatale qu'on attribue aux dauphins échoués sur les plages.

Il s'agissait de mutualiser l'échec d'une nation en le mettant au compte du corps social entier et en invoquant les lois de l'instinct. Prétendre que notre pays s'était précipité, unanimement, dans la facilité et le déclin revenait à dire que personne ne l'avait poussé.

Au moment où la France s'expose désormais chaque jour non seulement au déclin, mais à la terreur, la question des responsabilités revient au premier plan. La perte de tous les repères d'un pays et son endettement considérable, en à peine plus d'une génération, ne peuvent avoir été étrangers à l'action de ceux qui l'ont gouverné. Si le commandant du paquebot Concordia se trouvait dans la cabine le soir où son bateau s'est échoué, ce n'est pas, que je sache, comme visiteur.
À quoi bon, dira-t-on, chercher des responsables ? À supposer qu'ils existent et qu'on les rassemble dans une cage de verre pour un procès-spectacle, quel en serait le bénéfice ?

Il n'y en aurait pas un, mais deux. Le premier consisterait à les empêcher de remonter sur le pont pour nous promettre de renflouer le navire alors qu'ils viennent de l'échouer. Le deuxième proviendrait de ce que seul un pays qui sait revenir aux origines de ses erreurs et désigner ceux qui les ont accumulées peut espérer en surmonter les conséquences.

On nous dira que nous ne sommes pas en guerre et que la situation n'est pas si grave.

Elle est tout de même très compromise. Nous ne savons encore rien des crimes qui seront commis demain contre la France. Mais quand ils auront été commis, nous saurons qui les a permis, ce qui nous fera gagner du temps.

Une écrasante majorité de Français ne sont responsables de rien de ce qui leur arrive. Personne ne les a consultés. Ils sont à la fois terrifiés et ruinés, alors que d'autres, qui leur ont infligé le sort qu'ils connaissent, continuent à partir en vacances à l'île Maurice et à pérorer sur les plateaux de télévision. Si l'on arrache ces derniers à leur quiétude et bientôt à leur retraite pour leur demander des comptes au nom du peuple, on pratique une justice hâtive qui n'est pas, pour autant, une injustice.

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