Après trois semaines de débats, les députés ont voté les articles du texte de la loi Climat et Résilience proposé par le gouvernement. Philippe Herlin analyse les enjeux et les conséquences de ces propositions, dont certaines sont issues de la Convention citoyenne pour le climat (CCC).

Alors que l’Assemblée a validé la loi Climat et Résilience, de vraies mesures significatives ont-elles été votées ?

Beaucoup de mesures ont été votées. Elles sont significatives, mais elles vont malheureusement dans le mauvais sens. Ce n’est pas une loi superficielle. Les Français ne se sont pas assez intéressés à cette loi parce qu’il y a d’autres urgences comme celle du Covid-19. Plusieurs mesures sont négatives. Je vais commencer par quelques mesures un peu ponctuelles.

Première mesure, l’obligation de vendre 20 % de vrac dans les magasins est stupide et délirant. Cette contrainte énorme pèse sur les magasins.

Deuxième mesure, la fin des vols aériens quand on peut faire le voyage en train en 2 heures 30. Cette mesure est dangereuse parce que cela donne un monopole à la SNCF. Cette dernière ne va plus faire d’effort sur les prix alors que, jusqu’ici, il y avait de la concurrence avec les voyages en avion.

Le délit d’écocide est le principe de précaution, mais en pire. Tout le monde dénonce le principe de précaution parce qu’il freine la recherche et la prise de risque. Avec le délit d’écocide, cela va freiner davantage les entreprises, notamment les entreprises industrielles. Au moment où on nous parle de réindustrialisation, ce délit d’écocide sera une épée de Damoclès au-dessus de tous les chefs d’entreprise.

D’autres mesures sont aussi négatives, mais elles répondent à une logique politique qui consiste à la boboïsation des villes moyennes. On parle de passoires thermiques avec une obligation pour les propriétaires de faire des travaux. Ces travaux sont chers. L’UNPI, organisme réunissant les propriétaires, a fait un sondage auprès de ses membres. Seuls 30 % des bailleurs feront les travaux pour répondre aux contraintes de la loi. Les autres laisseront leur appartement vide ou ils le mettront en vente. Cela conduira à une diminution de l’offre de logement en location.

En revanche, ceux qui feront les travaux augmenteront les prix pour rentrer dans leurs frais. Au final, on va diminuer l’offre, ce qui va augmenter les prix. Les gens aux revenus faibles ou moyens partiront des villes moyennes.

Dans les villes de plus 150.000 habitants, il y a la création de zones à faible émission. Plus précisément, les personnes de l’extérieur ne pourront quasiment plus venir en voiture. Les voitures qui n’auront pas les bonnes vignettes ne pourront pas entrer en centre-ville. Aujourd’hui, cela correspond à 43 % du parc automobile. C’est assez conséquent.

Même ceux qui auront la bonne vignette avec une voiture récente ne pourront pas venir, puisqu’il y aura des sens uniques et des pistes cyclables. On va donc créer une sorte de boboïsation de ces villes moyennes. Ces villes seront faites pour leurs habitants, mais pas pour les gens qui arrivent de loin. On va encore favoriser la disparition du petit commerce en France. Il est tragique que personne ne l’ait évoqué au cours des discussions de cette loi.

En cette épidémie de Covid-19, les commerces dits non essentiels sont encore fermés. Il va y avoir un nombre incalculable de faillites. On a l’impression que cette loi va aggraver une situation qui est déjà totalement exsangue pour ce million de TPE-PME.

Toutes les lois écologiques dont fait partie la loi Climat vont planter l’économie. Je rappelle qu’hier, l’Union européenne a acté le fait que les pays européens devaient diminuer leurs émissions de gaz carbonique (CO2) de 55 % d’ici 2030. Cela va être fait avec les technologies actuelles. Diviser  par deux les émissions de CO2 va tendre à un effondrement de l’économie qui va d’abord toucher le secteur automobile. Cela oblige à basculer massivement sur les voitures électriques. Or, cela va nous rendre dépendants de la Chine. Il n’y a pas assez de réseaux de recharge, donc des engorgements. Tout le monde ne peut pas fonctionner avec une voiture électrique. Lorsqu’on est bobo et qu’on habite en centre-ville, on peut rouler avec une voiture électrique. En revanche, lorsqu’on habite dans la France périphérique, il n’est pas possible de fonctionner avec une voiture électrique. Tout ce que l’on nous présente comme la croissance verte est une immense mystification.

Joe Biden a annoncé qu’il voulait réduire de moitié les gaz à effet de serre aux États-Unis. Y a-t-il une forme de décroissance pour les pays concernés ?

C’est une forme de suicide de l’Occident. La Chine, elle, n’est pas du tout concernée. Les pays occidentaux doivent diminuer leurs émissions de gaz carbonique. En revanche, la Chine a obtenu le droit de les augmenter jusqu’en 2030 et de vaguement s’engager à les diminuer ensuite.

La Chine va devenir une usine géante à ciel ouvert du monde entier…

Tous les discours des politiques sur la réindustrialisation sont un mensonge complet. On prend exactement le chemin inverse. On est à peine sorti de la crise du Covid et on fonce tête baissée dans la lutte contre le soi-disant réchauffement climatique. Je dis « soi-disant » parce que je n’y crois pas. Il n’y a pas de preuve scientifique du réchauffement climatique, mais seulement des modèles du GIEC qui se trompe depuis des années. Cela sert d’argument parce que la lutte contre le réchauffement climatique justifie l’intervention de l’État. Après le Covid où l’État s’est immiscé partout dans nos vies personnelles et économiques, trop content d’avoir obtenu cela, il va continuer de le faire dans la lutte contre le réchauffement climatique qui nous est présenté comme quelque chose de plus grave, encore, que le Covid.

Politiquement, quel est l’intérêt de forcer les nations à se désindustrialiser et à se désarmer ?

Les gens qui nous dirigent ne cherchent pas forcément notre bien-être. Ils veulent d’abord accroître leur pouvoir. Nous sommes dirigés par des étatistes et par des socialistes dont l’objectif est d’accroître le pouvoir de l’État sur nos vies. Si cela se fait au prix d’une décroissance économique, cela ne les gêne pas. Pour eux, ce motif est secondaire. Leur objectif principal est le pouvoir et l’étatisation de l’économie. Évidemment, lorsqu’on réduit la liberté des gens, on réduit aussi leur prospérité économique. Leur objectif n’est pas notre bien-être mais le pouvoir.

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22 avril 2021 à 17:56

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