« Accession à la pleine souveraineté ». C’est autour de cette injonction incluse dans les accords de Nouméa que va se déterminer l’avenir de la Nouvelle-Calédonie.

Quel que soit l’intitulé qui sera finalement retenu pour le référendum de novembre, chacun aura en tête ce qui pourra sortir du processus engagé il y a vingt ans.

Avec la récente allusion du Premier ministre à la notion de « peuple calédonien », on va de nouveau entendre parler de la « petite nation dans la grande » et du transfert des dernières compétences régaliennes. En ces temps d’érosion de l’identité française, nul doute que ces concepts et cette proposition auront le vent en poupe.

Disons-le clairement : en Nouvelle-Calédonie, il y a une identité kanake et une identité française. Et c’est autour de ces deux identités que devrait être, à parts égales, imaginé l’avenir.

Le « vivre ensemble » et le « destin commun » dont la mise en œuvre se heurte à un communautarisme réel ne pourront pas effacer la question principale : les Kanaks, à qui la France a déjà reconnu tant de droits, pourraient-ils accepter un compromis consistant à voir leur identité perdurer dans la République française ?

Pour les Caldoches, les « Zoreilles », les Wallisiens et les différentes minorités, l’attachement à la France, même s’il revêt des réalités diverses, est réel, à quelques exceptions.

Mais on voit mal comment, du côté kanak, 40 % d’une population, en admettant qu’elle vote à 100 % pour l’indépendance (ce qui est loin d’être acquis), pourrait faire basculer un scrutin dans le sens du rejet de la France.

C’est là que réside le problème : les artisans de la « décolonisation » ne peuvent se satisfaire d’un tel pronostic, d’autant que les plus résolus des indépendantistes n’accepteraient probablement pas un résultat hostile à l’indépendance et feraient parler la rue.

Un référendum donnant quitus à la France pourrait être suivi de troubles qu’un haut-commissaire, dont on connaît les complaisances et les faiblesses, ne serait pas en capacité de réprimer. Une minorité a déjà fait le choix d’une violence délinquante à caractère raciste et l’alcoolisation des corps et des esprits pourrait déboucher sur de nouvelles violences difficiles à endiguer.

Ce sont ces risques réels qu’ont en tête ceux qui ont voulu éviter ce qu’ils ont appelé un « référendum-couperet ».

« Calédonie ensemble » a parfaitement perçu cette réalité et s’accroche à la fiction d’une nation calédonienne qui pourrait s’épanouir dans le cadre d’une autonomie renforcée, ressemblant très fort à une « indépendance-association ».

Entre Gomès (et ses alliés de la plate-forme) et les plus modérés des indépendantistes pourrait se construire un pacte majoritaire dans lequel, par étapes (n’oublions pas les deux autres référendums prévus dans les accords de Nouméa), la Nouvelle-Calédonie accéderait à la tant convoitée « pleine souveraineté ».

Pourrait naître alors d’ici quatre ou cinq ans, une « Nouvelle-Calédonie-Kanaky », petite nation pleinement émancipée, éventuellement encore en partie sous perfusion française, consolidant les aspects socialisants déjà mis en œuvre sur le territoire par « Calédonie ensemble » et les indépendantistes, et permettant à la petite élite kanake que la France a promue de continuer à prospérer en faisant coexister un discours socialiste avec les plus conservatrices des traditions tribales.

Cette nouvelle petite nation serait une proie toute désignée pour les grandes nations du secteur.

L’engagement centriste de Gomès, sa proximité avec le pouvoir actuel, son ambition de devenir le chef de la « petite nation » et l’inconsistance identitaire du Président Macron (qui a qualifié le colonialisme de crime contre l’humanité) rendent cette évolution possible. Il appartient aux partisans du maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la France de s’y opposer fermement.

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01 janvier 2018 à 12:34

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