Misère du monde paysan et prochaine pénurie de lait en France ?

vaches ferme

C’est bien la peine de vivre dans un pays façonné par le colberto-gaullisme, les plans quinquennaux, une technocratie censée tout anticiper pour mieux aider les politiques à gouverner et de bientôt se retrouver face à la disette annoncée de… lait ; alors que la France est le deuxième producteur européen en la matière.

C’est pourtant le triste constat dressé, aujourd’hui, par la presse économique, citant avec un bel ensemble des chiffres tous plus inquiétants les uns que les autres. Des labourages et pâturages, ces deux mamelles de la France jadis vantées par le duc de Sully, « bras droit » de notre bon roi Henri IV, que reste-t-il ? Plus grand-chose, aujourd’hui, sachant qu’en nos campagnes ne subsistent que cinquante mille éleveurs, contre deux fois plus, il y a seulement vingt ans…

Et les syndicats de cette filière de s’inquiéter du découragement de ces éleveurs, désormais tentés de se recycler vers des activités plus rentables. Dimitri Pavlenko, sur Europe 1, constate ainsi, ce 12 mai : « Certains ont déjà sauté le pas, d’autres y songent. Vendre leurs vaches, se séparer de leur main-d’œuvre et arrêter le lait pour devenir céréaliers, par exemple. » Toujours selon la même source, un jeune paysan témoigne : « On se pose la question forcément, parce que toutes nos charges ont doublé. »

À en croire Daniel Perrin, secrétaire général de la Fédération nationale des producteurs de lait : « Il faudrait augmenter le prix du lait d’environ 20 % pour que les producteurs parviennent à absorber l’inflation. Sauf qu’aujourd’hui, dans les rayons de supermarchés, nos briques de lait sont quasiment toujours au même prix… »

En ligne de mire, encore et toujours, cette grande distribution qui étrangle la paysannerie. Pourtant, pour Dimitri Pavlenko, il suffirait « d’une hausse de 0,05 euro sur le litre de lait, soit 40 euros de plus pour le producteur et un impact modéré de 25 euros de plus par an à débourser pour le consommateur » pour que cette filière puisse enfin permettre aux éleveurs de vivre un peu plus dignement du fruit de leur travail. C’est manifestement encore trop demander.

Certes, la consommation de lait est, chez nous, globalement en baisse, tandis qu’explosent les prix du carton et du plastique pour le conditionnement, tout comme celui du carburant pour le transport. Sans négliger la sécheresse attendue pour cet été, qui n’a rien pour mettre du baume au cœur de nos derniers agriculteurs.

Ces détails techniques une fois exposés, une dernière question se pose : comment expliquer que ceux qui nous nourrissent peinent, eux, à se nourrir ? À ce titre, le taux de suicide chez les paysans est plus qu’éloquent : 370 par an, soit plus d’un par jour et loin devant ces violences conjugales voulant qu’une femme décède tous les trois jours sous les coups de son compagnon… On notera que certaines victimes sont peut-être plus dans l’air du temps médiatique que d’autres. Peut-être, aussi, parce qu’il est plus facile de s’en prendre à un seul conjoint violent qu’à une société tout entière n’en finissant plus de violenter ceux sans lesquels nous pourrions bien tous mourir de faim. Et ce jour-là, il sera un peu tard pour pleurer sur ce lait imprudemment versé.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

30 commentaires

  1. Les paysages ont changé depuis 30 40 ans. Habitant moi-même en pleine nature, je voyais des champs, polyculture, des vaches. Aujourd’hui beaucoup de vignes, des champs de céréales et encore qqes vaches et pratiquement plus de chèvres. Les vignerons et céréaliers sont devenus riches les autres se suicident.Triste époque. Pour la sécheresse prévue pour cet été, météo France a déjà du mal à nous donner des prévisions fiables pour les prochains jours ! L’été 2021 devait être sec et on a eu la pluie.

  2. Je me souviens qu’il y quelques années je prenais notre lait chez un agriculteur local (qui a malheureusement du cesser son exploitation causes de frais exorbitants et sans cesse mises aux normes nouvelles), à l’époque je lui avais proposé de payer le litre 0,50 € ce qui était avantageux pour les deux mais hélas les temps ont bien changé.

  3. Et si les paysans arrêtaient de se soumettre tous ensemble aux diktats Bruxellois, certes, ils ne toucheraient plus de subventions, mais très certainement la France redeviendrait vite indépendante sur le plan alimentaire. Quand au peuple, il est prêt à bouder la grande distribution car il mesure tous les jours un peu plus la collusion de cette dernière avec l’oligarchie mondialisée dont il ne veut plus. N’oublions pas que Macron ne représente que 25%.

    • L’Europe commet la même erreur que l’URSS 1 siècle plus tard. Même s’ils s’en cachent, les communistes sont au pouvoir. Il aura fallu que la Russie redonne leurs terres aux paysans en 1990 pour que l’économie et l’autonomie nationale redémarrent

  4. « Labourages et pâturages » étaient les deux mamelles de la France… Le grenier de l’Europe. Que s’est -il passé pour qu’on arrive là ?. Les campagnes se sont vidée au profit des métropoles… Il faut avoir l’âme chevillée au corps pour reprendre une exploitation agricole. Comment faire pour lutter contre « Lactalis » et contre la grande distribution ??? A quand un grand plan, qui ferait qu’un éleveur puisse vivre dignement de son travail ?. Je crains que ce quinquennat à venir n’y fera rien.

  5. C’est la « loi du marché », ma pauvre dame ! La démocratie libérale, c’est « la main invisible du marché » orientée par « des cerveaux invisibles » qui guident « la main invisible » à remplir leurs comptes bancaires. C’est la concurrence libre et donc faussée par les aigrefins qui exploitent cette liberté au détriment du peuple laborieux.

    • C’est la faute a l’Europe que nous n’avons par deux fois voter contre (c’est l’europe des marchands voulu par Mitterrand, merci a lui).

  6. Pour moi qui jamais ne regarde la télévision, ai pu voir par hasard un excellent documentaire sur des agriculteurs qui élèvent des bovins en batteries pour la récolte automatique des excréments et production de bio carburant entrant pour 10% dans le super sans plomb. ( E10) Retour sur investissement très rapide et juteux. Plus de lait mais du super pour le camping car avec quatrième dose. Vive la France !

  7. Michel Houellebecq l’avait justement relevé : Un agriculteur qui se suicide par jour, au total cela correspond à un plan social sur la profession. Mais comme, justement, cela se fait doucement, au jour le jour, cela passe inaperçu. Pour intéresser l’opinion publique, il faudrait, c’est dur à penser et à écrire, que tous se mettent d’accord pour mettre fin à leur vie le même jour. Pour « créer le buzz »…

  8. Souvenez- vous, la CEE ( ex UE) avait acheté des centaines de vaches aux éleveurs car il y avait trop de lait. Hum, acheté les vaches tout en les laissant aux propriétaires sous condition de ne plus vendre leur lait aux laiterie. La CEE avait donné des tonnes de beurre à l’ URSS, et maintenant!!
    Accuser les GS en oubliant qu » au final c’est le consommateur qui paye les notes d’ autant que l’ état impose de 10 % les produits des GS pour les agriculteurs

  9. 50 000 éleveurs seulement, les autres s’étant suicidés .
    Qu’importe puisque ces gens sont soupçonnés de voter à droite ?

  10. Ne pas oublier ces nés-ruraux écolos qui font des procès à des agriculteurs à cause des odeurs , des bruits des animaux de ferme
    Quand tous ces écolos bobos , hors sol, auront contribué à la disparition de nos agriculteurs, nous importerons nos fruits, légumes, viandes industrielles de l’étranger ou ce sera la famine
    Ces écolos gauchos et melenchonistes sont de parfaits imbéciles
    Les propos de M. Gerondeau ont plus de bon sens que ces écolos abrutis

    • Fort heureusement et j’en suis témoin chaque jour, les paysans eux, n’en manquent pas de bon sens !

  11. ben voyons ! à cause de la guerre là bas en Ukraine , voilà que les pis des vaches vont se tarir ?!!!!

    • Tous les mensonges enregistrés depuis plus de deux ans ne vous ont pas suffit, vous croyez encore en quelque chose ?

  12. aux USA l’Etat paie de agriculteurs pour qu’ils ne cultivent pas et laissent en jachère. en même temps d’étranges problèmes de logistiques empêchent les engrais d’être acheminés aux agriculteurs au pire moment : ne nous voilons pas la face, la pénurie alimentaire est organisée. et quand on sait que Bill Gates est le 1er propriétaire de terres agricoles aux US, on se pose forcément des questions… il promeut la viande de synthèse et investit dedans…

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