Mel Gibson : le grand retour du chien fou d’Hollywood

Il annonce une suite à sa Passion du Christ : La Résurrection du Christ. Une nouvelle polémique à venir ?
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Il a régné en maître sur les studios hollywoodiens avant de déchoir. Lui, c’est Mel Gibson, l’homme par qui lequel le scandale est arrivé le 28 juillet 2006. Là, conduisant passablement aviné, il répond au policier venu le contrôler que « les Juifs étaient responsables de toutes les guerres dans le monde ». Le 1er août de la même année, il présente ses excuses à la communauté juive, excuses qui sont acceptées par la puissante Anti-Defamation League. Puis, le 17 août, il plaide coupable. Il sera condamné à trois ans de mise à l’épreuve et tenu de s’inscrire à un programme de désintoxication.

Dans la foulée, il divorce de son épouse, Robyn Denise Moore, avec laquelle il est marié depuis 27 ans. Le 30 octobre 2009, Mel Gibson convole à nouveau en justes noces avec Oksana Grigorieva, une pianiste russe. Elle le quitte vite pour violences conjugales avant qu’il ne refasse sa vie avec une scénariste, Rosalind Ross. Ces deux femmes lui ont chacune donné un enfant. Avec les sept nés de son premier mariage, il ne saurait donc lui être reproché de ne pas avoir œuvré pour la démographie américaine.

Une longue descente aux enfers…

Hollywood n’aime rien tant que de brûler ce qu’il a adoré. D’où la longue descente aux enfers de Mel Gibson, avec les portes qui se ferment, le téléphone qui ne sonne plus, les anciens amis qui se détournent. La grande famille du cinéma dans toute sa splendeur. Notons tout de même que deux grandes dames d’Hollywood auront persisté à ne jamais le renier : Whoopi Goldberg et Jodie Foster. Cette dernière, qui est pourtant ce qui se fait de plus à gauche dans ce milieu, affirme : « C’est un être incroyablement aimant et sensible, vraiment. Ce n’est pas un saint et il a une grande gueule, il va dire des choses dégoûtantes qu’un petit garçon dirait. Mais j’ai su dès la première minute que je l’aimerais le reste de ma vie. » Autre courageux, Robert Downey Jr. : « Mel a été là quand j’étais au plus bas. Je fais pareil aujourd’hui. » Élégant. Il est vrai que lorsque ce jeune acteur avait sombré si profond dans l’alcool et les drogues que plus personne ne voulait le faire tourner, c’est Mel Gibson qui l’a imposé sur plusieurs tournages, acceptant même de se porter financièrement garant auprès des compagnies d’assurance.

Un père hors du commun…

Mais au fait, qui est Mel Gibson ? Son parcours mérite qu’on s’y arrête, tant il paraît incongru, dans cette industrie du rêve. Il naît Mel Columcille Gibson, le 3 janvier 1956 à Peekskill, bourgade située au nord de l’État de New York. Ses deux premiers prénoms, il les doit respectivement à la cathédrale Saint-Mel et à celui d’un saint irlandais. En effet, et ce, grâce à sa mère, la future star de L’Arme fatale a conservé la nationalité irlandaise, en sus de l’américaine. Son père, Hutton Gibson, est un sacré numéro : autodidacte, érudit, écrivain, théologien amateur, fan de jeux télévisés – l’un d’eux lui rapporte la coquette somme de 21.000 dollars –, c'est un catholique fervent, traditionaliste de l’espèce sédévacantiste ; à côté, monseigneur Marcel Lefebvre, c’était l’évêque Jacques Gaillot.

En 1968, Hutton Gibson, son épouse, née Anne Reilly, et leur onze enfants (tout de même !), sont de farouches opposants à la guerre du Vietnam. Ils décident donc d’émigrer en Australie, pays neutre dans ce conflit, afin que ses héritiers mâles puissent échapper à leurs obligations militaires. Comme quoi on peut à la fois être catholique de tradition et pacifiste. Et puis, la tournure prise par les USA, pilule contraceptive et rock hippie à tous les étages, n’a rien qui puisse enchanter ce patriarche au caractère notoirement difficile. Mais, déjà, le jeune Mel Gibson est un chien fou. Il y a les sermons de son père, dont il dira plus tard : « Chez nous, Dieu était omniprésent. Mais ce n’était pas le Dieu joyeux de la messe du dimanche. C’était un Dieu de feu et de jugement. » Ce mélange de foi et de violence, on le retrouvera plus tard dans la majeure partie de ses films, ceux dans lesquels il joue, mais également qu’il met en scène. Pour ce qui est de la violence, il y a les cours d’école, puis les bars. Le théâtre contribuera vite, non point à forcément le sauver, mais au moins à canaliser son énergie sauvage.

 

Et c’est ainsi qu’en 1977, il accepte d’accompagner un copain d’université au casting d’un petit film local, répondant au titre de Mad Max. Comme il s’est battu la veille, il est passablement amoché. Mais George Miller, le réalisateur, ne voit que lui. « Revenez dans une semaine, quand vous aurez meilleure mine », lâche-t-il donc, sans trop y croire. Et pourtant, l’évidence s’impose : Mel Gibson est Max Rockatansky, le héros emblématique, vêtu de cuir noir, pilotant son bolide à tombeau ouvert dans le désert australien. Tourné pour 350.000 dollars, Mad Max en rapporte plus de cent millions. Une star est née. Mais une star à sa façon, ce personnage faisant déjà figure de figure christique, surtout dans les deux volets suivants. Comme si Mel Gibson offrait véritablement ses souffrances pour racheter les péchés d’un monde à la dérive.

Perpétuellement s'offrir en sacrifice…

Ainsi dans la quadrilogie de L’Arme fatale lui faut-il toujours se sacrifier, quitte à endurer les pires tourments et dans le seul but de sauver les innocents. Le premier opus, sorti en 1987, est à ce titre particulièrement éloquent. Dans le duo policier qu’il forme, lui, le Blanc, avec Danny Glover, le Noir, c’est ce second qui est la figure rassurante et posée, pétri de valeurs familiales, tandis que Mel Gibson, dévoré par ses démons intérieurs, ne cherche qu’une hypothétique rédemption. Il confesse, à l’époque : « Ce personnage, c’était moi en pire, ou moi sans censure, au choix. […] J’étais une grenade dégoupillée. » La musique d’Eric Clapton, autre mystique et grand torturé devant l’éternel, fait le reste. Mel Gibson devient alors le roi d’Hollywood, sa fortune avoisinant le milliard de dollars. Tout réussit à celui dont on célèbre la beauté et le talent.

Une société de production fondée sous le signe de la Vierge Marie

Mais il lui faut autre chose : « J’avais tout ce que le système pouvait offrir, sauf la liberté. » Il décide donc de devenir son propre patron en fondant sa propre société, Icon Productions, dont le logo n’est autre qu’une enluminure de la Vierge Marie. Et là, les chefs-d’œuvre se succèdent, dont Braveheart, ode à William Wallace, l’un des héros mythiques de la résistance écossaise à l’Angleterre. Sur dix citations, il emporte cinq Oscar™, dont ceux de Meilleur film et de Meilleur réalisateur.

Ensuite, un autre projet lui tenant éminemment à cœur, La Passion du Christ, en 2004. Comme il entend le tourner en araméen et en hébreu, aucun producteur ne veut en entendre parler. Mel Gibson le financera donc sur ses propres deniers. Un peu plus de trente, il va sans dire, la facture se montant à trente millions de dollars ; mais qui lui en rapporteront finalement… six cents !

Et là, le début de ses ennuis, le film étant taxé d’antisémitisme. « Je n’ai fait que montrer ce que les Évangiles racontent », se défend-il. Il est vrai que ce film est un sommet de violence et de sang. Pourtant, il est prétendu que même le pape Jean-Paul II serait discrètement venu à son secours en affirmant : « C'est comme ça que ça s’est passé… » On dit encore que la main filmée en train de planter les clous dans la chair du Christ n’était autre que la sienne, histoire de démontrer que l’humanité tout entière était coupable, lui le premier.

Aujourd’hui, après des années de purgatoire, Mel Gibson serait en train de revenir au premier plan. Son dernier film, mis en scène par ses soins, Vol à haut risque, vient de sortir en DVD, tandis qu’il annonce une suite à sa Passion du Christ : La Résurrection du Christ. Une nouvelle polémique est-elle à envisager ? Ce serait bien dans son genre, lui qui affirmait à non confrères des Années Laser, à l’occasion d’un portrait lui étant consacré : « J’ai fait des choses terribles, mais j’ai aussi raconté des histoires que personne d’autre n’aurait osé filmer. Je ne veux pas qu’on m’aime, je veux qu’on me regarde en face. Même si c’est difficile. » Indomptable Mel Gibson !

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Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

8 commentaires

  1. Un acteur de chair et de sang animé par la foi et par une vision disruptive de la société américaine . Le cinéma français lui , n’a plus depuis longtemps que des comédiens diaphanes.

  2. Ce sont des personnages pas toujours très politiquement corrects qui sont capables de transcender la bien-pensance crasse .
    Je suis pour la liberté d’expression même si elle dérange et je suis contre les lois mémoriels qui mettent les clous sur le cercueil du débat et s’avèrent plus contre productives qu’efficaces. Mais je ne confond pas la liberté avec la propagande organisée , financée et imposée , souvent sous la menace comme celle des islamistes ou celle du mondialisme qui tend à limiter les libertés au nom du bien interprété unilatéralement . La notion de bien et de mal et la recherche de vérité n’est pas partagée par tout le monde .

  3. Les grands acteurs de superproductions qui sont devenus de grands réalisateurs de superproductions, c’est plutôt rare. Il n’y a que Clint Eastwood et lui qui me viennent à l’esprit. Apocalypto a enchanté tous les cinéphiles. Je lui fais confiance.

  4. LE PATRIOTE , son meilleur rôle selon moi, manque à cette présentation. Et je me réjouis, avec tous les chrétiens, de célébrer La Résurrection qui changea le monde à jamais. Car c’est Jesus qui apporta à l’humanité le message essentiel pour la survie de l’humanité: l’amour est plus fort que la mort. Autrement dit, le meilleur moyen d’assurer une idéale évolution humaine pour chacun et pour tous n’est plus la violence pour éliminer l’autre dans sa différence, mais l’amour du prochain, dans sa différence précisément pour assurer une paix éternelle. Alléluia.

  5. Un film que Mel Gibson, le grand, devrait tourner :  » La vérité n’est pas toujours bonne à dire » !!

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