Macron, la bienveillance faite homme
« La bienveillance et le respect nous caractérisent », disait Emmanuel Macron, lors de son meeting à Strasbourg, cette semaine. Il venait d'interdire que l'on sifflât Marine Le Pen. On a beau ne pas avoir une pensée aussi complexe que celle de notre bon maître, on devine tout de même confusément ce que cela veut dire. On sait qu'en langage macronien, être bienveillant, c'est entourer son adversaire d'une fausse sollicitude, lui faire croire qu'on entend ce qu'il dit. C'est aussi ne pas l'écouter, le traiter de fou ou d'imbécile quand il n'a pas le même logiciel que vous, prétendre incarner une raison souriante face aux excès des braves gens en colère. On connaît. Mais en revanche, on ne voit pas bien quel est ce respect dont le président de la République se réclame. Alors regardons.
Depuis 2017, Emmanuel Macron a parlé des « illettrés » de l'usine Gad, de ceux qui ne sont rien et qui vont dans des gares, des Gaulois réfractaires au changement, des aides sociales qui coûtent un pognon de dingue, des gens qui foutent le bordel... Tout dernièrement, il a accusé une aide-soignante de ne pas être dans la vraie vie et a conclu un débat houleux avec un citoyen alsacien par un « Ça se mélange quand même pas mal, dans votre tête » sans appel. C'est donc ça, le respect qui les caractérise.
En déplacement au Havre, le candidat a rencontré plusieurs personnes sur son chemin. Avec bienveillance, il les a saluées. Avec respect, il les a écoutées. Un enseignant se trouvait dans la salle. Il a pris à partie le Président, assez vertement il est vrai, et sans lui laisser le temps de la réplique. Emmanuel Macron, avec bienveillance et respect, toujours, parce que cela le caractérise, lui a d'abord répondu : « Vous avez une drôle d'idée du débat citoyen. »
L'enseignant aurait pu comprendre que la politesse commandait d'en rester là. On ne s'attaque pas impunément à quelqu'un d'aussi ouvert et chaleureux. Au lieu de ça, il a remis dix balles dans la machine : « Vous savez, quelqu'un qui ne fait pas campagne et qui, juste parce qu'il affronte Madame Le Pen au deuxième tour, commence sa campagne... La démocratie, c'est compliqué... » En clair et en français : ne viens pas me parler de débat démocratique quand tu t'assieds sur les règles de la démocratie.
Macron n'a pas cillé. Il est imperturbable. Il est respectueux. Il a simplement rétorqué : « Vous avez de drôles de propos. » Il est au maximum de l'exaspération. Il est si bienveillant. Mais, au juste, en quoi sont-ce de « drôles de propos » ? Ce qu'a déclaré ce brave homme est objectivement vrai. Macron n'a pas fait campagne. Il se précipite sur les chaînes de radio et de télévision depuis le 10 avril, parce que sa campagne jupitérienne ne suffisait plus. Ce ne sont donc pas de drôles de propos car ils ne sont pas étranges.
J'ai vu, hier, que des journalistes s'étaient procuré la copie de concours général de français d'Emmanuel Macron. Il avait obtenu un accessit avec un sujet sur la lecture. Déjà remarquablement intelligent, mais aussi bienveillant (et respectueux), il avait rappelé l'étymologie du mot « lire » (legere oculis, cueillir avec les yeux). Il sait très vraisemblablement que « démocratie » signifie « pouvoir du peuple ».
C'est un bourgeois de province, marié à une prof, formé dans les meilleures écoles. Il ne sait pas ce que c'est que le peuple. Il n'a jamais vécu au milieu de lui. Macron est, au fond, l'homme qui n'aime pas les gens. Les gens normaux. Ceux qui en ont marre mais qui paient leurs impôts, ceux qui râlent mais qui meurent pour la France, ceux qui sont vulgaires, incultes, mal élevés, mais qui tiennent le pays à bout de bras. Macron veut du glamour.
Ce n'est pas le Président des riches, des lobbies ou du microcosme. C'est pire : c'est le Président du mépris. En reprendrons-nous pour cinq ans ?
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62 commentaires
Lors de l’interpellation du président par une infirmière en pleurs, qui le suppliait de la réintégrer, j’ai ressenti pire que du mépris, une espèce de jouissance. Peut-être a-t-il éprouvé le même plaisir à interdire aux médecins la prescription des médicaments qui auraient pu sauver beaucoup de vies. Il trouve sans doute son bonheur dans le malheur des autres surtout s’il en est la cause, ce pouvoir doit le griser. Souvenez-vous du « j’ai bien envie de les em……r,
La sollicitude trompeuse ne consiste-t-elle pas à remplir le vide avec des mots magiques permettant justement de ne pas les traduire en actes ? Le « si je le dis, c’est que c’est vrai » est une formule perverse de fabrique du consentement. La froideur voire la violence du regard, et l’absence d’émotions faciales viennent à l’évidence souligner la destructivité enrobée dans de tartufferie … Dangereuse discordance !
Parfait analyse ! Mais j’ai vraiment très peur de la réélection de cet odieux personnage et de sa clique. Français réveillez-vous ! dans les écoles de ma ville de province ce sont 40 % d’enfants issus de l’immigration. Le désastre financier dans lequel il a plongé la France est sans appel. Virons-le vite !!