Les voies du Seigneur sont impénétrables. Ou pas. À chacun sa voie, justement, et celle de Ludovic Mohamed Zahed est sans conteste atypique. 20 Minutes lui consacre sa une : « Ludovic Mohamed Zahed, l’imam gay marseillais qui veut un islam inclusif. »

À la lecture, on serait tenté de dire que ce fort bel homme à la barbe poivre et sel bien taillée est tout à fait dans l’air du temps en ce qu’il se fabrique un petit monde pour lui et ses semblables. Un islam pour happy few, en quelque sorte, élaboré entre l’ENA et « le sous-sol d’un café du quartier du Marais, à Paris ». Je dis ENA façon de situer la chose, parce que tout le monde connaît ; le bagage de Ludovic Mohamed Zahed est encore plus prestigieux : « De haute formation universitaire, notamment passé par l’ENS et l’EHESS de Paris, titulaire de deux doctorats, d’anthropologie et de psychologie, Ludovic Mohamed Zahed situe son champ d’action à la croisée des disciplines. Mêlant théologie, anthropologie, philosophie et socio-économie, sa pensée, si elle s’attaque à l’islam, dépasse ce simple cadre », nous dit-on. Happy mais encore moins que few, donc.

« L’islam est un produit de la culture et ne descend pas du ciel, contrairement à ce que certains pensent », aussi, bien « essayer de comprendre les gens qui ont écrit les textes il y a quatorze siècles est plus intéressant que les répéter », dit l’imam gay.

De cette nouvelle compréhension des textes saints est né un livre, publié en 2019 : Homosexualité et transidentité en islam, car il lui paraît urgent de « ne pas le laisser [l’interprétation des textes] dans les mains des mêmes barbus, hommes cisgenres et hétéronormatifs ». L’idée lui est venue, raconte-t-il, d’un débat télévisé de 2009 entre Tariq Ramadan et Caroline Fourest : « Ils parlaient de sexualité et d’islam, sans que le premier ne connaisse quoi que ce soit à la sexualité et la seconde à l’islam. Je me suis dit : "Ce n’est plus possible." » Il me semble qu’on a appris, depuis, que Tariq Ramadan s’intéressait beaucoup, au contraire, à une forme de sexualité particulière, très hétéronormée, en effet, et du genre prédatrice.

Ludovic Mohamed Zahed a fondé avec ses amis du Marais l’association des Homosexuels musulmans de France, puis ouvert en 2012 la première mosquée inclusive d’Europe. C’est dans le 3e arrondissement de Marseille, une ville dont on nous dit qu’elle est devenue très « gay-friendly ». Toutefois, l’adresse est inconnue et l’on peut lire, dans Têtu, que c’est « dans une toute petite rue qui restera anonyme, où l’interphone est vide de nom ». Dans ce lieu très secret, l’imam a également ouvert un institut religieux où « chacun.e vient comme ielle (sic) le souhaite ». C’est là, « avec la dizaine de personnes et d’imams qui suivent actuellement sa formation, nous dit 20 Minutes, que Ludovic Mohammed Zahed espère "préparer la relève" pour un islam du XXIe siècle, ouvert et inclusif ».

À vrai dire, je ne vois pas quelle différence il y a entre une mosquée où l’on refuse les LGBTQ etc. et une mosquée où l’on n’accepte QUE les LGBTQ etc. Il me semblait, jusqu’ici, qu’on n’était pas tenu d’indiquer son orientation sexuelle à l’entrée des lieux de culte.

Ludovic Mohamed Zahed est, sans doute possible, un homme intelligent, diplômé, cultivé. Il est aussi le fils de son époque, militant de cette pseudo-« voie de l’ouverture » qu’on nous vend comme une marque de lessive alors qu’elle n’est que le repli mortifère de la société sur l’entre-soi exclusif…

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14 juin 2021 à 13:00

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