Les caprices de Macron

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Le Conseil scientifique, qui estimait plus raisonnable de maintenir les écoles, les collèges, les lycées et les universités fermés jusqu’au mois de septembre, a pris acte de la « décision politique » de rouvrir les établissements scolaires à partir du 11 mai. Dans une note, rendue publique le 24 avril, il donne ses recommandations au gouvernement pour que la réouverture se fasse dans les meilleures conditions possibles (ou, plutôt, les moins mauvaises). Comme vous pourrez en juger, ce n'est pas de la tarte !

Ouest-France publiait, le 22 avril, un dessin humoristique représentant une mère et son fils dans l'allée d'un supermarché réservée aux fournitures scolaires : dans les rayons, masques, surblouses, gants, visières et gel, toute une panoplie digne d'un récit de science-fiction. C'est à peu près ce que préconise le Conseil scientifique, avec le port du masque pour tous les élèves dans les collèges et les lycées. Il reconnaît que c'est impossible en maternelle et que, pour l'école élémentaire, il est difficile de fixer un âge où « la compréhension serait suffisante pour recommander le port du masque de façon adaptée ».

Mais ce n'est pas tout ! Les experts estiment aussi qu'il faut éviter le rassemblement des enfants et des parents, interdire l'entrée des parents dans l’enceinte de l’établissement, échelonner les horaires d'arrivée et de sortie « pour que les élèves d'un même niveau ne croisent pas les élèves d'un autre niveau ». Tous les élèves et les personnels devront se laver les mains plusieurs fois par jour, au minimum à leur arrivée, au début et à la fin des cours, avant et à la fin de chaque repas, pris, de préférence, dans leur salle de classe... Un règlement kafkaïen qui risque de faire de l'école un enfer – et de requérir plus d'adultes pour le faire appliquer.

Le Conseil scientifique, conscient des difficultés, est « favorable au principe de volontariat et de non-obligation des familles ». Le gouvernement semble d'accord sur ce point, sans doute pour répondre aux inquiétudes de nombreuses familles qui jugent cette rentrée prématurée. Mais qu'en sera-t-il des autres mesures ? Jean-Michel Blanquer déclare qu'« avec cette note [...], nous avons la base pour l’élaboration du protocole sanitaire annoncé pour donner un cadre sûr au déconfinement scolaire ». Mais quand il prend une position, fût-elle sensée, il est contredit, le lendemain, par un autre membre du gouvernement, voire par Emmanuel Macron lui-même.

Il faudra donc attendre le mardi 28 avril pour en savoir davantage : le Premier ministre présentera à l'Assemblée « la stratégie nationale du plan de déconfinement ». Cette présentation serait même suivie d'un débat et d'un vote. Il est probable que l'exécutif veut ainsi faire partager la responsabilité de sa stratégie par une majorité dépassant son propre camp : responsabilité partagée est à demi pardonnée. Il sera intéressant de voir quels élus refuseront de participer à ce jeu de dupes et, pour la réouverture des établissements scolaires, dénonceront cette usine à gaz.

Plus le temps passe, plus l'exécutif s'enferre dans le mensonge. La réouverture prématurée des établissements scolaires va conduire à des contraintes insupportables, sans même la garantie de tests de dépistage. Sans compter qu'elle met en danger les élèves, les personnels enseignants et les familles. Mais qu'importe l'avis du Conseil scientifique ! Emmanuel Macron, qui se cachait auparavant derrière lui, pour décider, par exemple, de maintenir le premier tour des élections municipales, a décidé de ne le suivre que lorsqu'il va dans son sens. Il veut apparaître comme un grand garçon émancipé mais se soumet à ses caprices.

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Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

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