Le Hamas trouve un solide point d’appui… au Chili

Boric

L'Amérique latine ne penche pas vraiment du côté d'Israël. Le 31 octobre dernier, le Chili, désormais présidé par le très gauchiste Gabriel Boric, a rappelé, comme la Colombie, son ambassadeur en Israël tandis que la Bolivie rompait carrément ses relations diplomatiques avec l’État hébreu. Santiago a estimé que l’intervention militaire de Tsahal dans la bande de Gaza était une « punition collective » contre l’ensemble de la population civile palestinienne et a appelé à une fin immédiate des hostilités ainsi qu’à un acheminement de l’aide humanitaire et à la libération des otages. Si l’initiative est assez prévisible venant de la Colombie (gouvernement de gauche de Gustavo Petro) et de la Bolivie (dirigeants d’extrême gauche en pointe dans le positionnement tiers-mondiste), elle peut surprendre venant du Chili, pays d’Amérique latine a priori fort éloigné du conflit, tant sur le plan géographique qu’historique. Mais il se trouve que le Chili compte sur son sol une forte communauté palestinienne, en fait la plus grande hors du monde arabe.

Le Chili, une petite Palestine

Forte d’environ 350.000 à 500.000 personnes, celle-ci a commencé à se constituer à l’aube du XXe siècle pour fuir la domination ottomane au Moyen-Orient, puis les conflits successifs entre Juifs et Arabes, notamment la guerre de 1948. Très majoritairement chrétienne (95 %), ce qui a facilité son intégration, elle est aussi majoritairement ancienne (80 % sont arrivés entre 1900 et 1930). Beaucoup de membres de cette communauté ont réussi économiquement (surtout dans le commerce et le textile) et certains ont pu occuper des postes importants dans les médias, l’administration et la politique. De quoi présager la nette orientation dans la diplomatie chilienne concernant les conflits successifs entre Israël et les Palestiniens que nous pouvons constater actuellement. Ce n'est pas une première.

Dès 1947, le Chili s’abstint de voter lors du plan de partage des Nations unies pour la Palestine. Plus déterminant encore, en 1990, l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) de Yasser Arafat établit un bureau d’information à Santiago. En 1994, ce bureau devient un bureau officiel de la représentation palestinienne au Chili. En 1998, le Chili devient le premier pays d’Amérique du Sud à ouvrir un bureau de représentation auprès de l’Autorité nationale palestinienne à Ramallah. En janvier 2011, le Chili reconnaît la Palestine comme nation indépendante. En mars de la même année, le président chilien, Sebastián Piñera, se rend à Bethléem et Ramallah où il rencontre le président de l’Autorité palestinienne. À cette occasion, le président chilien fleurira la tombe de Yasser Arafat. En mai 2018, c'est au tour de Mahmoud Abbas de rendre une visite officielle à Pinera au Chili.

Aussi n’est-il pas étonnant de voir le président du Chili Gabriel Boric rappeler son ambassadeur d’Israël, mettant ainsi ses pas dans ceux de ses prédécesseurs. « Le Chili note que ces opérations militaires […] ne respectent pas les règles fondamentales du droit international, comme le montre la perte de plus de 8.000 victimes civiles. » Les victimes civiles israéliennes du Hamas apprécieront.

Une politique extérieure sous influence ?

Le poids de cette immigration ancienne et pérenne des Palestiniens au Chili pèse ainsi lourd sur l’orientation de la politique extérieure de Santiago dans le conflit en cours. Inquiétant, quand on connaît l’ampleur des relais du Hamas dans le monde aux niveaux politique, médiatique ou culturel. En sont témoins les nombreuses manifestations en faveur du Hamas, les pétitions de célébrités demandant l’arrêt des hostilités, le positionnement de leaders associatifs et politiques comme Jean-Luc Mélenchon ou le président d’Amnesty International Jean-Claude Samouiller. Bien loin d’être un groupuscule isolé menant une lutte désespérée, comme beaucoup se plaisent à l’affirmer, le Hamas est une organisation armée puissante et riche, capable de provoquer des attaques meurtrières massives, de mobiliser des partisans dans le monde entier (notamment en France) et d’influer sur la politique de pays étrangers jusqu’en Amérique latine. Pour servir une idéologie islamiste, antisémite et anti-occidentale radicale. Pas vraiment rassurant.

Florent de Prévaux
Florent de Prévaux
Docteur en Histoire, enseignant, rédacteur, conférencier.

Vos commentaires

12 commentaires

  1. Si je comprend bien, le Chili a accueilli des palestiniens chrétiens qui avaient fui la Palestine du fait de persécutions religieuses de la part de (palestiniens ?) musulmans. Les dits palestiniens chrétiens. se sont parfaitement intégrés. Aujourd’hui, le gouvernement chilien soutient les persécuteurs de leurs compatriotes. Qu’attend-t-il pour faire venir au Chili de nombreux palestiniens musulmans. Il pourra recréer sur son territoire les conflits du proche-Orient : attentats, agressions, ….

  2. Il y a effectivement une grande communauté palestinienne au Chili. Elle est très majoritairement chrétienne et est au Chili… Parce qu’ils ont été chassés par les musulmans. Imaginer que ces descendants de palestiniens (bien intégrés) soutiennent le Hamas est ridicule, imaginer par contre que le président chilien qui est l’équivalent d’un Poutou mais qui n’assumerait pas à fond ses idées d’extrême gauche à cause du syndrome Allende soit pro terroriste, c’est la réalité. Jusqu’à présent ce pauvre clown inapte n’a pas pris de mesures très communistes et tout ce qu’il a entrepris, tel son projet idiotique de nouvelle constitution a été largement rejetée par le peuple chilien. Mais quand on est d’extrême gauche, on est contre le « capital » comme disait le pere Marchais, et donc antisémite.

  3. Les commentaires sur cet article montrent que personne n’est d’accord. Une question tout de même. Israël qui a, parait-il, les meilleurs services secrets, était au courant de ce que préparait le Hamas. Qui a dit de regarder ailleurs et de laisser faire sans intervenir tout de suite?…Dans quel but? Cherchez. Vous trouverez la réponse.

    • Je partage vos interrogations. Pourquoi la super-barrière autour de la bande de Gaza a-t-elle été momentanément abandonnée ? Voir sur « Cielvoilé » un beau reportage à ce sujet.

  4. Amalgames Monsieur de Prevaux ! Les chrétiens palestiniens soutiennent non le Hamas mais la Palestine face à Israël, Amnesty comme l’ACAT et bien d’autres organisations appellent à la paix qui est autant israélienne que palestinienne, les condamnations pour violations du droit international envers Israël sont de l’ONU, Yasser Arafat et Mahmoud Abbas ne sont pas du Hamas. Tous ces amalgames desservent la vérité et votre jugement.

    • Vous n’avez sans doute pas tort. Mais du point de vue musulman, la Palestine existe-t-elle ou n’est-ce qu’un prétexte ? Et dans cette histoire, où se niche la vérité ?

  5. Ce pays démocratique pourrait accueillir généreusement les populations civiles palestiniennes et accepter que ces derniers y imposent leur mode de vie …

  6. 150 pays environ n’ont pas dénoncé l’action du Hamas. L’Afrique du sud vient elle aussi de rappeler ses diplomates en poste en Israël. L’Occident, c’est à dire l’empire étatsunien et ses vassaux européens, australien et néo-zélandais, est isolé; il est en train de perdre la guerre contre la Russie et un nouveau bras de fer s’engage que les Palestiniens ont déjà gagné parce que la réprobation suscitée par la violence exercée contre les civils de Gaza est immense à l’extérieur de la « communauté internationale » occidentale, ce qui a amené l’équipe de Biden à essayer de convaincre le gouvernement d’extrême-droite religieuse de Netanyahu de faire preuve de modération à l’égard des civils. Biden et sa bande de néo-cons ont compris que le gouvernement israélien est en train de perdre la bataille des images mais Netanyahu est trop stupide pour comprendre cela.

  7. La population d’origine palestinienne vivant au Chili depuis plusieurs génération est chretienne à 95%, et soutient donc le hamas islamiste. Tout est normal…

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