Au lendemain de l’élection de Laurent Wauquiez, les commentaires vont bon train sur le vide du projet LR et sur son absence de cohérence idéologique. Parmi la litanie de banalités des caciques entendues sur les ondes, la meilleure nous vient de Laurent Wauquiez lui-même, pour qui il s’agit de "la victoire de la droite forte à droite". Avec ça, on est bien avancé !

Avant, pendant et après sa campagne, monsieur Wauquiez claironnait urbi et orbi que jamais il ne ferait d’alliance avec le Front national. Nous qui le côtoyons à la région Auvergne-Rhône-Alpes savons qu’il dit vrai.

Sourire ineffable façon Vierge à l’enfant et éternelle veste rouge sur les photos, teintures capillaires à 40 ans, il y a des signes qui ne trompent pas. Laurent Wauquiez est dans la mise en scène. Sa présidence à la région Auvergne-Rhône-Alpes est tout entière dédiée à son image : glorification de résultats financiers pourtant élémentaires succédant à des lustres de gestion socialiste dispendieuse, constitution d’un fief au Puy-en-Velay sous une avalanche de subventions, vote de l’essentiel du budget en commission permanente échappant à toute supervision effective en assemblée plénière, alors que rien ne change sur le fond, qu’il s’agisse de la destination des dépenses ou de leur pertinence. Les exemples sont criants dans le domaine culturel, dans nos relations avec la SNCF ou dans l’agriculture, parent pauvre avec moins de 1 % du budget en dépit de l’urgence.

Et puis il y a les convictions. Celles de Laurent Wauquiez sont ectoplasmiques. Il peut participer en « guest star » à une réunion de la Manif pour tous (2 novembre 2015) en ayant pris soin d’avoir fait évacuer au préalable le représentant régional du Front national également convié, et plancher une fois élu en tenue blanche fermée devant la loge Maillon et Liberté du GODF (10 juin 2016).

Alors qu’il pourrait, s'il était sincère, peser implicitement sur les dérives de la financiarisation et du mondialisme, il ne s’attaque à aucun de leurs fondamentaux, au contraire, comme en témoignent sa bienveillance à l’égard de la grande distribution dans le programme de revitalisation des centres-villes, la subvention de 131,6 millions au projet privé A45 (Vinci), la subvention sans fondement de 1,2 million à l’entreprise Aubert & Duval (première décision de la première assemblée plénière du mandat), etc.

Ce faisant, en se privant du soutien du Front national (et cela en cohérence avec le fond de sa pensée et des intérêts qu’il sert), il s’enferme, entraînant avec lui son électorat, dans une voie sans issue. Car, entre-temps, la donne a changé et Emmanuel Macron a été élu. Tout ce que la droite dite de gouvernement ou de connivence (c’est selon) a été incapable de réaliser en trente ans, Emmanuel Macron l’a réalisé en quelques mois avec une facilité déconcertante. Désormais, c’est déconstruction de l’État français contre souverainisme et Laurent Wauquiez aura beaucoup de mal à se différencier d’Emmanuel Macron.

Dans son ouvrage Le Fil de l’épée, de Gaulle écrivait, parlant du chef : "Il faut viser haut, voir grand, tranchant sur le commun des mortels qui se débat dans d’étroites lisières." Sur ce critère, de toute évidence, Laurent Wauquiez ne répond pas au cahier des charges.

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15 décembre 2017 à 11:42

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