Figurez-vous que Nicolas Bedos, histrion désenchanté, et Olivier Véran, ministre de la Santé, disent en fait la même chose. Sur une tonalité, certes différente, qu’on croirait opposée, ils professent de concert, avec le Bardamu de Céline : « Il n’y a que la vie qui compte. »
Quelle définition donnent-ils donc à la vie ?

Celle du dictionnaire de l’Académie française jusqu’en 1794 : « L’union de l’âme avec le corps » ou encore « l’état où est l’homme quand son âme est unie à son corps », ou bien celle de la dernière édition datant de 1935 où la vie est définie comme « l’activité spontanée propre aux êtres organisés, qui se manifeste chez tous par les fonctions de nutrition et de reproduction, auxquelles s’ajoutent chez certains êtres les fonctions de relation, et chez l’homme la raison et le libre arbitre » ?

Remarquons qu’entre ces deux définitions qui semblent faire un grand écart, l’invariance du terme « vie » permet et entretient la confusion.

Quand il n’y a plus de sacré que la « vie nue », c’est-à-dire réduite au simple fait d’être en vie, que Bedos dise « la vie est une parenthèse trop courte pour se goûter à reculons » ou que Véran dise avec Macron « il faut sauver des vies quoi qu’il en coûte », ces deux voix formulent le même constat : le néant de nos vies nues.

Proclamant haut et fort avec Diderot : « L’homme est le terme unique d’où il faut partir et auquel il faut tout ramener », ces deux « humanistes » nous ferment le « Ciel ». Et avec Baudelaire, nous pleurons « quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle ».

L’un dit « La vie ne vaut rien, amusons-nous et mourons », l’autre répond « Rien ne vaut la vie, conservons-la à tout prix ». Qui nous parlera encore de donner sa vie ?

Merci à Olivier Rey dont le livre L'Idolâtrie de la vie m'a inspiré ces quelques réflexions.

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29 septembre 2020 à 18:15

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