La Pologne s’y met aussi : la souveraineté, concept tendance

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La Cour suprême de Pologne vient de décider que la loi européenne n’est plus ou pas « supérieure » à la loi polonaise. Le coup de tonnerre a retenti jusqu’en France. Les macroniens et autres adeptes du dogme de la mondialisation heureuse (un dogme supérieur aux lois de la République que les règles européennes permettent d’installer sur le continent européen) ont réagi « au quart de tour ». En bons disciples des Américains, ils ont menacé les Polonais de représailles. La Cour constitutionnelle allemande avait dit à peu près la même chose sans que, à l’époque, quiconque ait osé le ridicule de proposer des sanctions contre un État aussi fort. Le Royaume-Uni a fait un pas définitif en quittant l'Union européenne.

Et voilà que des politiques français se mettent, de manière très inattendue ou très paradoxale pour certains, au « souverainisme » alors même que leur parti, rebaptisé LR, avait autorisé Nicolas Sarkozy à ratifier le traité de Lisbonne et qu’ils ont approuvé les réformes prescrites par les organismes européens et signées de Macron. Parmi eux, Xavier Bertrand et Michel Barnier qui a été commissaire européen et qui a « négocié » le retrait de la Grande-Bretagne de l’Union européenne.

La gauche elle-même n’est plus hermétique au souverainisme. Sur CNews, ce dimanche matin 10 octobre, Arnaud Montebourg, candidat à l’élection présidentielle, maintenait sa position sur ce thème.

Dorénavant, selon ces nouveaux « résistants » à l’Europe, on refusera de mettre en œuvre telle décision « européenne »… si on n’en a pas envie. Mais d’un autre côté, on reste quand même « dans » le système du traité. En somme, ils proposent de rester dans un système avec l’intention de lui désobéir. Comment ne pas déceler la peur de dire les choses : inverser la hiérarchie des normes (la norme nationale doit l’emporter, dorénavant, sur la norme européenne) mettra à bas le système mis en place par les rédacteurs du traité de Maastricht et ceux du traité de Lisbonne.

Que feront vraiment ceux qui saisissent l’occasion d’une campagne électorale pour faire part de leur conversion (ou d’une foi qu’ils taisaient jusque-là) au souverainisme si, d’aventure, l’une d’entre elles était élue à la présidence de la République ? On s’interroge accessoirement sur le poste que leur score électoral leur permettra éventuellement de demander au vainqueur, alors même que le vainqueur ne serait pas « souverainiste ».

Pendant des années, les tenants de la « mondialisation heureuse » ont voué aux gémonies ceux qu’ils appelaient dédaigneusement les « souverainistes ». Ils stigmatisaient des idées passées de mode, des personnalités politiques copinant avec l’extrême droite parce qu’elles osaient critiquer la soumission des Français aux règles de traités européens (inattaquables) et aux décisions (non discutables) d’organismes ad hoc chargés de mettre en œuvre ces traités imposés aux peuples. Le tout, sans que les parlements nationaux aient leur mot à dire.

En réalité, les souverainistes souhaitaient revenir à ce qui, en France, avait fait la démonstration de son efficacité dans le domaine de la solidité économique du pays comme dans celui des acquis sociaux ou de la maîtrise de l’admission des étrangers sur notre sol. Un thème jadis honni.

Que les traités et décisions des organismes « européens » s’imposent aux États et à leurs peuples, c’est ce que la classe politique française avait voulu dans sa majorité. L’abandon de la souveraineté française avait été soigneusement constitutionnalisé par la même classe politique : titre XV de la Constitution créé par la réforme constitutionnelle de 1992 - avec les modifications de 1999. Il s’agissait de rendre compatible la Constitution française avec le texte du traité de Maastricht.

Mais voilà, les études de marché incitent dorénavant les candidats à inscrire une politique de souveraineté aux catalogues des promesses électorales. Ces candidats contribuent ainsi à « réveiller » les citoyens sur la question. Ils invitent ces électeurs à douter que le système européen et la technique de gouvernement qui va avec iraient de soi, seraient irréversibles et seraient faits, malgré les résultats observables, pour rendre les gens heureux. Un incroyable retournement.

Marcel Monin
Marcel Monin
Maître de conférences honoraire des universités

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