La fin de l’omerta sur les violences sexuelles dans le milieu sportif ?

viol-agression

Après l’enquête de Disclose que L’Équipe relaya, ce quotidien, ce 29 janvier, fait sa une et consacre six pages au phénomène des abus sexuels dans le sport. Et c’est heureux !

Cette fois, c’est aux victimes que la parole est donnée, dans des témoignages parfois glaçants. Celles-ci, innocentes âgées de 13 à 16 ans, dénoncent toutes l’emprise de leur bourreau et le statut qui les protégea. On y trouve tout du déni de ces effroyables comportements répétitifs, parfois des mois ou des années durant. On y trouve tout de la banalisation ou la normalisation que les auteurs et les autorités de tutelle voudraient y voir : « À l’époque la “grande proximité” entre les entraîneurs et les athlètes, c’était le credo général », avoue l’un de ces coachs. Terrible !

Ainsi du déni : un des entraîneurs refuse de répondre aux journalistes, un autre nie tout simplement, un troisième se dit non concerné, quelles que soient les accusations dont ils font l’objet publiquement : viol, etc.

Ainsi de la protection d’un président de la fédération de patinage qui laissa l’un d’eux au contact des jeunes jusqu’en 2018, lui confia maints mandats au sein de la FFSG et refusa de répondre à L’Équipe

Ainsi du danger encore encouru auprès d’un autre, entraîneur des nageuses au lycée d’excellence sportive de Font-Romeu : il fut reversé de la fédération à l’Éducation nationale après les plaintes de 7 jeunes filles ; condamné à 6 mois avec sursis sans inscription au casier judiciaire, il continue d’entraîner des jeunes…

Ainsi du silence de ceux qui, actifs au sein des fédérations, étaient informés et ne surent prendre une quelconque mesure de suspension des licences – acte pourtant permis par la législation.

Non, la société garde le silence. Les médias se firent bien discrets, hormis quelques brèves et un reportage dans « Envoyé spécial ». Mais nulle émission n’impose à ses invités d’en parler. Nulle reprise uniforme et répétitive durant des jours et des jours. Il ne s’agit pas de figures catholiques… Belloubet est aux abonnés absents.

Pauvres « victimes honteuses » osant à peine parler, timidement et si pudiquement ! Pauvres victimes manipulées par la pression d’enjeu : « On ne peut pas virer cet entraîneur, il rapporte des médailles… » Elles savent que leurs témoignages leur vaudront d’être perçues comme des proies : « la fille qui a été violée »… Elles qui, parfois, virent leurs études et leurs carrières sportives brisées en subissent encore un traumatisme psychique des dizaines d’années après les faits ; elles qui ne reçurent aucune aide pour se reconstruire, nous dit Isabelle Demongeot (tenniswoman). « Je suis une handicapée de la vie. Dans ma tête, je suis une proie. Aujourd'hui encore, dès que je sors de la maison, j'ai peur. J'ai horreur d'aller dans les lieux que je ne connais pas. L'inconnu est forcément synonyme de danger. Je ne peux pas voyager seule », avoue Sarah Abitbol, une autre victime.

Pour finir, on observera que tous ces témoignages concernent des femmes. Quand les victimes sont celles du père Preynat, chacun crie au scandale. Que ne le fait-on devant cette répétition de viols d’adolescentes ! Où sont, surtout, les centres et procédures d’accueil des victimes ? Où est le plan d’éradication du silence et des complicités ? Quelles sont les mesures de dédommagement prises ? Rien, rien, rien, trois fois rien ! Mille fois rien ! Honte à vous, vous de la meute des hyènes qui se jette contre l’Église et laisse ces jeunes et ces femmes murées dans leur douleur !

On guérit de blessures, on peut reconstruire une maison incendiée, on remplace une voiture, mais on ne peut retrouver ce qui vous fut violé. L’innocence ! La destruction psychique qui s’ensuit est éternelle ! Irréparable ! Pas de prescription pour ces crimes-là !

Au lieu de quoi, le gouvernement refusa la « présomption de non-consentement avant 15 ans ». Une honte de plus pour la société soixante-huitarde ! Une honte qui vise à protéger quelques messieurs trop tranquilles…

Bertrand du Boullay
Bertrand du Boullay
Ingénieur à la retraite

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