Illogique Jean-Luc

On a beau dire, un second tour Mélenchon – Le Pen aurait de la gueule. Deux tribuns de cette qualité nous offriraient un joli débat, avec invectives, bons mots, envolées oratoires et, d’une certaine manière, respect mutuel car ces deux-là, qui se savent de même force, éprouvent l’un pour l’autre une certaine estime. Rien à voir avec la platitude d’un Macron, le regard halluciné d’un Hamon ou la rigidité froide d’un Fillon, dont on finit par se demander s’il n’est pas sous antidépresseurs.

Le débat du 4 avril nous en a donné un avant-goût. Interrogée sur le référendum d’initiative populaire, Marine Le Pen a rappelé sa volonté de l’ouvrir à tous les sujets, et notamment soumettre au peuple une révision constitutionnelle intégrant la défense et la promotion du patrimoine historique et culturel de notre pays. "L’inscription dans la Constitution de cette phrase permettrait, par exemple, de pouvoir mettre des crèches dans les municipalités."

Fureur de Mélenchon : "Alors, vous voulez mettre des symboles religieux dans les mairies ?" Et de continuer : "60 % des Français n’ont pas de religion. Vous n’êtes pas obligée de nous imposer à tous vos foucades, vos trouvailles, une manière de vivre qui n’est pas la nôtre." Dans un certaine brouhaha, Marine Le Pen essaye alors de rappeler qu’à l’instar des sapins de Noël dans les écoles, il ne s’agit pas exclusivement de symboles religieux mais avant tout de nos racines.

Le sujet est anecdotique mais révélateur. Une partie du monde politique dépense une énergie folle à combattre de tels symboles au nom d’une obsession laïque, comme si la présence d’une crèche dans un lieu public les effrayait, les empêchait de vivre normalement. Ils sont rarement aussi virulents à l’égard de l’épidémie de foulards islamiques dans les rues. Ces gens – et Mélenchon affecte d’en faire partie - sont de véritables obsédés du sujet dont, à vrai dire, les Français se moquent pas mal. Pourquoi ?

Parce que, pour ses zélateurs, la république est en soi une religion. Une religion laïque s’entend, avec ses dogmes, ses croyances et ses rites. Au nom de la liberté de ne pas croire, ils nous imposent leur propre croyance en un système à la fois athée et autodivinisé, représenté par Marianne – sorte d’idole païenne. La religion officielle nous impose de ne pas croire en ce que nous voulons au nom de son propre dieu relativiste. Il y a là un paradoxe insoluble.

Et parce que, pour ces gens-là, imprégnés d’antichristianisme, il est insupportable de rappeler l’existence de racines chrétiennes, très profondes, et encore plus d’en tirer la sève qui irrigue toujours notre mode de vie. Que 60 % des Français soient sans religion n’y change rien : ils sont toujours attachés aux traditions ancestrales, et l’assassinat du père Hamel l’a montré. Dans une banlieue communiste, on a vu le maire pleurer - parce qu’on ne touche pas au curé, quoi qu’on pense de sa vocation.

Enfin, parce que déraciner l’individu, le couper de son histoire et de ses traditions est encore le moyen le plus efficace pour l’asservir à un système consumériste qui ne tend qu’à la satisfaction immédiate de ses envies, pour le plus grand profit de financiers, d’industriels et de pollueurs qu’un Jean-Luc Mélenchon affecte de combattre. Alors, Jean-Luc, sincère ou complice ? Illogique, en tout cas, comme tout homme de gauche qui fait primer l’idéologie sur le réel.

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