Gilets jaunes, Strasbourg : après la taxe de trop, les morts et le fiché S de trop ?
Marchés de Noël : qui se souvient qu'il y a exactement quatre ans, quelques semaines avant l'attentat contre Charlie, les marchés de Noël de plusieurs villes de province étaient la cible de voitures folles conduites par des radicalisés islamistes ? Le pouvoir socialiste, avec le trio de l'époque Hollande-Valls-Cazeneuve, minimisait. Ce même pouvoir connaissait une impopularité record, n'avait aucun résultat économique et se retrouvait groggy après les grands mouvements lancés par la Manif pour tous. Groggy et surtout discrédité : il emprisonnait des manifestants en sweat rose mais laissait prospérer des islamistes radicalisés.
Un quinquennat plus loin : Emmanuel Macron est exactement dans la même situation. En dix-huit mois, la présidence Macron s'est complètement "hollandisée". À deux différences près. Mais fondamentales. D'abord, la colère s'exprime et, quoi qu'il advienne du mouvement des gilets jaunes, ne rentrera pas tranquillement dans son lit sur un coup de sifflet de Castaner. Ensuite, ce même pouvoir a reculé, mangé son chapeau, lâché des milliards – ou des miettes. Si l'on suit le parallèle pour tenter de voir l'avenir, Emmanuel Macron peut toujours rêver d'une unité nationale qui relèverait sa cote de popularité, ferait oublier son naufrage : cela ne fut qu'un feu de paille. Hollande finit à 8 %. Et c'est alors qu'entra en scène Emmanuel Macron. Toujours un remplaçant qui s'échauffe sur la touche dans cette mauvaise équipe de France.
Mais les choses ont changé : la France périphérique invisible s'est levée. Et la colère, contenue depuis des années, voire des décennies, a éclaté. De façon inattendue, spectaculaire, originale. Et elle a gagné. Elle n'a plus qu'une cible : le Président.
Dans son allocution de lundi soir, il a vaguement évoqué les questions d'« immigration » et d'« identité profonde ». Comme si ces sujets étaient le grand non-dit, l'inconscient indicible de la révolte des ronds-points. Mais, le même jour, il envoyait un sous-secrétaire d'État inconnu signer au nom de la France, à Marrakech, le pacte mondial sur les migrations. Il avait annulé son déplacement, mais pas la signature - le "en même temps" en mode "profil bas". Les Français vont-ils accepter ce cap, avec tout ce qu'il comporte d'hypocrisie et de mépris, pendant trois ans et demi ?
Il y a eu, à un moment, le radar de trop, la taxe de trop, le mensonge et le mépris de trop. Un jour, il y aura les morts de trop, le carnage de trop, le fiché S de trop, l'islamiste de trop. Pour beaucoup d'entre nous, ces morts de trop, ce sont ceux de 2015, ou les victimes de Merah, en 2012. Pour d'autres, ceux de 2016, 2017. Pour certains Français, ce seront ces morts de Strasbourg, en 2018. Des yeux s'ouvrent, des prises de conscience se font, des déterminations grandissent, une colère qui vient de loin ne cesse de grossir. Les colères, comme les êtres vivants, ont leurs patiences. Et leurs impatiences. Mais aussi leurs explosions.
Emmanuel Macron avouait, dans une tranquille discussion de salon avec des journalistes, qu'il était le "fruit d'une effraction de l'Histoire". Mais ce genre d'effraction n'est pas réservée aux jeunes énarques ambitieux. Il arrive aussi aux peuples et aux colères de faire effraction.
Les énarques chargés d'assurer le turnover au sommet de l'État devraient y réfléchir.
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