Gabriel Attal veut promouvoir Dreyfus général : fausse bonne idée ?

L'an passé, Attal facilitait l'élection de députés complaisants avec l'antisionisme, pour ne pas dire plus.
dreyfus

L’événement était passé relativement inaperçu : la semaine dernière, des sénateurs socialistes ont déposé une proposition de loi visant à élever, à titre posthume, Alfred Dreyfus (mort en 1935) au grade de général de brigade. Un article unique : « La Nation française, éprise de justice et qui n’oublie pas, élève à titre posthume Alfred Dreyfus au grade de général de brigade. » Gabriel Attal, patron du groupe Ensemble pour la République, emboîte le pas en annonçant qu’il allait en faire autant à l’Assemblée nationale. Pour l’ancien Premier ministre, une telle loi « constituerait un acte de réparation, une reconnaissance de ses mérites et un hommage rendu à son engagement républicain ».

Réparer l'humiliation publique

Une réparation qui interviendrait 130 ans après la condamnation du capitaine Dreyfus et peut-être, surtout, après la terrible humiliation publique qui lui fut infligée dans la cour de l’École militaire à Paris, le 5 janvier 1895, devant quatre mille soldats en armes et une foule haineuse. Une dizaine de jours avant, le 25 décembre 1894, le très à gauche et républicain Georges Clemenceau, convaincu alors de la culpabilité de Dreyfus, écrivait un terrible éditorial dans le journal La Justice, contribuant ainsi à chauffer à blanc une opinion publique alors passablement antisémite : « Puisque le malheur veut qu’il y ait des êtres capables de trahison, il faut que ce crime apparaisse aux yeux de tous comme le plus exécrable forfait qui se puisse commettre, et le plus impitoyablement frappé. » Malgré la réhabilitation prononcée par la Cour de cassation en 1906 et sa réintégration dans les cadres de l’armée, on imagine que le polytechnicien, l’officier breveté de l’École de guerre qu’était Dreyfus a dû être hanté jusqu’à son dernier jour par cette dégradation publique dont l’image d’Épinal est inscrite dans la mémoire collective de notre pays.

« Revisiter la hiérarchie militaire avec le regard d'aujourd'hui »

Faut-il pour autant nommer Dreyfus général de brigade à titre posthume ? L’idée n’est pas nouvelle. En 2019, le ministre des Armées Florence Parly l’avait évoqué à demi-mot : « 120 ans plus tard, il est encore temps que les armées redonnent à Alfred Dreyfus tout l’honneur et toutes les années qu’on lui a ôtés. Et j’y veillerai personnellement. » Elle n’avait sans doute pas assez veillé, puisque l’affaire n’avait pas prospéré. En 2021, Emmanuel Macron avait dit ni oui ni non. « Appartient-il au président de la République de faire de Dreyfus un général, aujourd'hui ? Ma réponse de principe serait non », avait-il répondu à la demande du grand rabbin de France Haïm Korsia. « Le grand risque, c'est de revisiter la hiérarchie militaire ou l'Histoire, avec le regard d'aujourd'hui », avait souligné le président de la République, pour qui c’était à l’institution militaire de le faire plus qu’au Président. Pas tout à fait vrai, parce que les officiers sont nommés par décret du président de la République et que les officiers généraux sont nommés aussi par décret du président de la République, sur le rapport du Premier ministre et du ministre des Armées, le Conseil des ministres entendu.

Passer directement de lieutenant-colonel à général ?

C’est pourquoi, d’ailleurs, la proposition de loi des sénateurs et de Gabriel Attal peut sembler quelque peu étonnante, notamment de la part d’élus qui ne cessent d'invoquer le fameux État de droit qui, parfois, serait au-dessus de la loi. En effet, les promotions dans les armées relèvent du pouvoir exécutif, pas du pouvoir législatif. Ces nominations se font en vertu d’une loi (Code de la défense) qui prévoit notamment que, « sauf action d'éclat ou services exceptionnels, les promotions ont lieu de façon continue de grade à grade et nul ne peut être promu à un grade s'il ne compte dans le grade inférieur un minimum de durée de service, fixé par voie réglementaire ». Or, Alfred Dreyfus termina sa carrière au grade de lieutenant-colonel, pas de colonel. Faut-il alors, fictivement, reconstituer la carrière complète du malheureux capitaine Dreyfus ? Cela peut aller très loin, comme Macron, lui-même, le faisait remarquer en 2021.

Autre problème, peut-être plus important, soulevé par cette proposition de loi. Elle se justifierait par le regain d’antisémitisme qui parcourt le pays. Cet « antisémitisme d’atmosphère », comme on l'appelle parfois pudiquement, bien souvent déguisé en antisionisme, est d’une tout autre nature que celui qui se cristallisa autour de l’affaire Dreyfus, il y a 130 ans. N’y a-t-il pas d’ailleurs une certaine bizarrerie à ce que Gabriel Attal porte cette proposition de loi alors qu’il y a moins d’un an, au prétexte de « faire barrage » au RN, il facilitait l’élection de députés insoumis plus que complaisants avec le Hamas et l'antisionisme, pour ne pas dire plus ?

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Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

111 commentaires

  1. Attal celui qui demande de voter LFI, et qui demande de promouvoir Général Dreyfus ….on a de quoi se poser des questions ? Peut être qu’il veut que l’on parle de lui….monsieur LFI ?

  2. Le plus urgent aujourd’hui, c’est de sanctionner très sévèrement tous les actes antisémites.
    C’est l’antisémitisme qui a saccagé la vie et la carrière militaire de Dreyfus.

  3. Chiche !
    Rien que pour voir la réaction de l’extrême gauche antisémite .
    Plus sérieusement, et bien que je ne sois pas plus royaliste que républicain ou bonapartiste, il serait urgent que soit enfin reconnus et condamnés comme crime contre l’humanité le martyre de la famille royale à la prison du Temple,ainsi que les massacres ignobles commis par les révolutionnaires .

  4. À quand un  » pourvoi dans l’intérêt de la loi « , comme pour Baudelaire, afin de faire casser le jugement du Conseil de Guerre du 11 janvier 1898 , acquittant le Commandant Ferdinand Esterhazy (1847 – 1923 ), après une audience à huis clos et trois minutes de délibération , sur faux dossier ?

  5. Assez de manipulation et d’enfumage ! Que ces Messieurs TRAVAILLENT ! Prennent conscience des REALITES. des problèmes de la France et des Français. Assez de baratin, d’esbrouffe, de communication, de commémorations, de bla-bla-bla. Tout a été dit, écrit, filmé, débattu sur l’Affaire Dreyfus. Assez de prendre les Français pour des idiots.

  6. C’est cocasse …, « La Nation française, éprise de justice et qui n’oublie pas, élève à titre posthume Alfred Dreyfus au grade de Général de Brigade » et peu avant, d’après MDI, Macron radie deux Généraux pour leur fidélité à la France : « manquement au devoir de réserve » à la suite de la signature d’une tribune en 2021. « A l’origine de cette répression, dans Valeurs actuelles en 2021, une tribune signée par 20 généraux, suivie de discours, de conférences, d’interviews et de nombreux entretiens vidéos au cours desquels ces deux généraux ont rappelé que le danger ne vient pas de Russie mais de ceux qui nous gouvernent selon les mots d’ordre du Nouvel Ordre Mondial. Rappelons ce qu’ils écrivaient en 2021 : « L’heure est grave, la France est en péril, plusieurs dangers mortels la menacent. Nous qui, même à la retraite, restons des soldats de France, ne pouvons, dans les circonstances actuelles, demeurer indifférents au sort de notre beau pays. Nos drapeaux tricolores ne sont pas simplement un morceau d’étoffe, ils symbolisent la tradition, à travers les âges, de ceux qui, quelles que soient leurs couleurs de peau ou leurs confessions, ont servi la France et ont donné leur vie pour elle. Sur ces drapeaux, nous trouvons en lettres d’or les mots « Honneur et Patrie ». Or, notre honneur aujourd’hui tient dans la dénonciation du délitement qui frappe notre patrie. »

  7. Second candidat choisi par les Bilderberg, en cas de défection du “titulaire” Philippe, Attal fait du macron, agitant comme un hochet des mesures sociétales inutiles mais clivantes ou des initiatives provocatrices, afin de faire oublier le vide sidéral et sidérant de son projet politique communautariste.
    Le « J’accuse » de Zola aidant, Le Capitaine Dreyfus laissera son nom dans l’histoire comme la victime expiatoire des traitres anti-judaïques de l’époque.
    Général Dreyfus? Personne n’en parlera.
    Pourquoi ne pas nommer maréchal de France, le brigadier De Gaulle? Ou retirer toutes ses étoiles à Pétain, collabo anti judaïque et anti France?

    • Un général de brigade, même à titre temporaire comme CdG, ne peut pas être appelé « brigadier ». Les deux termes désignent des grades situés à des niveaux hiérarchiques très différents.

  8. Que connaît t’il de l’armée, et que représente t’il ce tartuffe qui a appelé à voter LFI contre les patriotes du RN , qui comptent dans leurs rangs nombre d’anciens combattants qui ont mis leur peau en jeu pour la France , dit je m’honore . Je méprise et exècre cette personne et ses semblables.

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