Fournas écope d’une « exclusion temporaire » de l’Assemblée : comment tuer le débat sur l’immigration

Fournas

Le député RN Grégoire de Fournas écope donc de la condamnation la plus lourde. Le bureau de l’Assemblée a voté, ce vendredi 4 novembre, une « censure avec exclusion temporaire », soit l’interdiction de paraître au palais Bourbon pendant quinze jours de séances et la privation de la moitié de son indemnité parlementaire pendant deux mois. Amer mais respectueux des institutions, le député se soumet à cette décision prise par ses adversaires politiques. « Je suis totalement innocent des faits que l’on me reproche », dit-il, et il précise : « Je ressens cette sanction d’une dureté inouïe avec une grande injustice. »

Cette sanction est la deuxième dans l’histoire de l’Assemblée sous la Ve République, a précisé la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet. En mars 2011, le député PCF Maxime Gremetz avait reçu la même punition après avoir fait scandale : des voitures de ministres et de dirigeants du nucléaire bloquaient sa propre auto... Il avait été exclu de son groupe et avait démissionné de l’Assemblée quelques mois plus tard.

Une sanction un peu moins lourde avait été prononcée, en 1984, contre trois députés de l’opposition de droite (Jacques Toubon, Alain Madelin et François d’Aubert) pour « insinuations injurieuses à l’encontre de M. le président de la République » : ils avaient émis des doutes sur le comportement de Mitterrand sous l’Occupation… No comment. À dire vrai, Fournas était condamné d’avance. Sur les 22 membres du bureau de l’Assemblée nationale, qui compte le président de l’Assemblée, les six vice-présidents, les trois questeurs et les douze secrétaires, le RN ne comptait que… deux vice-présidents : Sébastien Chenu et Hélène Laporte. La sanction décidée par le bureau a été immédiatement approuvée par un vote assis-debout de l’Hémicycle.

Tant pis si Fournas a immédiatement démenti l’interprétation de ses propres mots. Tant pis si l’Assemblée a bien validé l’expression « Qu’il retourne en Afrique ». Les différentes composantes de la NUPES continuent à mobiliser sur une phrase tronquée : « Retourne en Afrique. » Fournas portera-t-il l’affaire sur le terrain judiciaire, où il aura au moins le pouvoir de plaider le mensonge, au-delà d’un vote partisan joué d’avance ? Il le pourrait. La cause de la sanction retenue par le bureau est révélatrice : Fournas est coupable d'une « manifestation troublant l'ordre ou qui provoque une scène tumultueuse ». Un comble, puisque c'est la NUPES qui créé le tumulte après avoir entendu, sans doute de bonne foi pour certains du reste, une phrase tronquée. Le reste tient à l'idéologie, à ses syllogismes - le RN est raciste, pense la NUPES, donc il a prononcé une phrase raciste - et à l'exploitation purement politicienne de l'incident.

Avec l’expérience longue du RN, Marine Le Pen prend de la hauteur, pas dupe. « Voilà une procédure où on est jugés par ses adversaires politiques qui jugent vos idées politiques, a-t-elle dit à BFM TV. J’ai entendu des représentants des différents groupes venir nous expliquer que réclamer que des bateaux déposent les migrants non dans des ports européens mais dans les ports de départ qui sont en Afrique est raciste. À partir du moment où ils considèrent que l’idée politique doit être condamnée, on s’éloigne totalement de la liberté d’expression, de la démocratie et, accessoirement, du fondement même de cette Assemblée qui est précisément de débattre des idées politiques. »

C’est bien de cela qu’il s’agit : bâillonner la droite sur le sujet. Bruno Retailleau ne s'y est d'ailleurs pas trompé.

Doucement, l’extrême gauche change son fusil d’épaule devant l’évidence du propos du député. Elle élargit le débat sur les sentiments d’humanité vis-à-vis des migrants. Le scandale est le même s'il a dit « Qu'ils retournent en Afrique ». On ressuscite les vieux réflexes, le barrage contre le nazisme, les postures morales qui ne coûtent pas cher, les indignations la main sur le cœur. L’objectif est commun avec la Macronie qui soutient la NUPES de toutes ses forces sur ce dossier : contraindre les Français, de gré, de force, par humanité ou pour éviter le tapage, à accepter les migrants qui souhaitent se rendre sur notre sol. Tous les migrants.

Et surtout stopper net l’ascension, préoccupante pour Macron, la NUPES et LR, du RN dans les intentions de vote des Français. Il y avait le feu. La vraie fausse affaire Fournas est un grain de plus à ajouter aux scandales montés de toutes pièces pour étouffer le réflexe de survie d’un peuple.

La NUPES, qui n’a pas vraiment brillé depuis septembre, emporte donc sur ce mensonge grossier un joli coup, le premier. Mais le match n'est pas terminé. Les Français seront-ils dupes ?

Marc Baudriller
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

54 commentaires

  1. Un montage politique grossier touchant une personne intègre qui sert de bouc émissaire. On ne peut s’empêcher de penser que s’il avait été noir il n’aurait pas été soupçonné , car dire que les gens sont mieux chez eux qu’à l’étranger n’est pas discriminatif puisque le gouvernement parle de renvoyer chez eux les délinquants étrangers et autres fauteurs de trouble, pourquoi le fait de le souhaiter pour les victimes des passeurs serait-il
    «  nauséabond » et «  à vomir » ( sic la NUPES) ?
    Tou ça sent l’embrouille pour faire passer une dictature.

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