Elections européennes : une urne dans chaque prison

prison

Nicole Belloubet veut vider les prisons, on le sait déjà. Mais on apprend qu’elle veut aussi remplir les urnes électorales dans ces mêmes prisons. Les Français votent de moins en moins, mais il est important que les prisonniers, du moins ceux qui n’ont pas été déchus de leurs droits civiques, puissent voter aux prochaines élections européennes. Ah, ces élections européennes qui semblent, pour l’instant, mal engagées pour Emmanuel Macron, il va falloir aller chercher les voix à la fourchette à escargot ! Y compris dans les prisons. C’est dire si la situation est désespérée !

"Le droit de vote, c’est le b.a.-ba de la démocratie", a déclaré le ministre en visite à la prison des Baumettes, à Marseille. Cette sollicitude pour les détenus vient de loin et de haut. En février dernier, Emmanuel Macron tweetait : "On a essayé de m’expliquer pourquoi les détenus ne pouvaient pas voter. Je n’ai pas compris. Pour les élections européennes, je souhaite que tous les détenus puissent voter." Le contrôleur général des prisons, en 2013, précisait qu’"en dépit d’une information souvent correctement diffusée sur les modalités de vote à l’approche d’une élection, le nombre de personnes détenues qui votaient directement – ce qui nécessite l’obtention d’une permission de sortir – ou par procuration restait extrêmement faible". Emmanuel Macron avait alors lancé l’idée d’un vote par correspondance et la mise en place de bureaux de vote dans les prisons. Pour lui, il est "essentiel que les personnes détenues, souvent marginales et exclues, puissent mettre elles-mêmes un bulletin dans l’urne".

Aussitôt dit, (presque) aussitôt fait. Mme Belloubet nous annonce que les détenus qui souhaiteront voter aux élections européennes pourront déposer leur bulletin dans une urne et les résultats seront centralisés à la chancellerie. En espérant que certains détenus ne pourront pas voter deux fois : une fois en votant à « domicile », une fois en donnant une procuration à une personne de la commune où ils sont normalement inscrits… Mais ne chipotons pas sur ce risque de fraude. L’administration devrait « verrouiller » le système – si l’on peut s’exprimer ainsi...

Ce qui est étonnant, c’est cette curieuse sollicitude d’Emmanuel Macron pour ceux qui n’ont pas respecté les règles imposées par la société. Cela devient, d’ailleurs, une constante chez cet homme. Pourtant, bien des citoyens sont, eux aussi, entravés dans l’exercice de leur droit de vote et ne peuvent accomplir cet acte "essentiel" qui est de déposer un bulletin dans une urne. Pensons aux personnes très âgées dans les maisons de retraite. Si elles ne sont pas mobiles, il ne leur reste que la procuration, ce qui n’est pas toujours facile et qui, en tout cas, ne permet pas le plein exercice de l’acte "essentiel". Mais aussi aux militaires, qui ne peuvent pas bénéficier d’une permission - à la différence des prisonniers - parce qu’engagés en opération, loin de la France. Eux aussi doivent passer par le système de la procuration pour exercer leur droit de vote. Un système qui n’est pas fiable à cent pour cent : on peut être sans famille, sans amis dans la localité où on est inscrit sur les listes électorales. Et l’on n’a peut-être pas forcément envie de dire pour qui on veut voter…

En tout cas, avec cette mesure, si Emmanuel Macron ne fait pas un carton dans les prisons françaises pour les élections européennes, ce sera à désespérer de la démocratie ! Pas certain, cependant, que cela suffise…

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

L'intervention média

Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois