« Combien c’est beau, combien c’est grand, combien c’est généreux la France ! » On connaît cette phrase du général de Gaulle. On ne sait pas si la France est encore belle, si elle est encore grande mais on sait, en tout cas, qu’elle est généreuse. Tout du moins qu’Emmanuel Macron l’est pour elle. En effet, ce dernier, à l’occasion de sa visite en Ukraine à annoncé qu’ « au-delà des douze Caesar déjà livrés, j’ai pris la décision de livrer six Caesar additionnels ».

Le Caesar (Camion équipé d’un système d’artillerie) est ce canon de 155 mn, capable d’atteindre ses cibles jusqu’à 40 kilomètre. Conçu et produit par la France, il équipe les huit régiments d’artillerie de l’armée de terre. La première fois qu’il fut utilisé par nos forces, ce fut en 2009 en Afghanistan. Ils a depuis été employé au Mali, en Irak avec une efficacité redoutable. L’histoire de notre artillerie française est ancienne et glorieuse. On se souvient de Gribeauval, qui conçut au XVIIIe le premier système d’artillerie complet comprenant l’armement (canon, obusier et mortier) et, ce qui était nouveau à l’époque, les matériels d’accompagnement (chariot, caissons à munitions). Bien évidemment, notre canon de 75 fut sans conteste le « canon-roi » du premier conflit mondial. Et, très probablement, les historiens des prochains siècles hisseront ce fameux Caesar au rang de ses illustres prédécesseurs.

Un artilleur me parlait de ce canon Caesar comme la « Rolls Royce » de l’artillerie. Par ses performances opérationnelles, notamment sa mobilité qui lui permet de dégager rapidement d’une position avant d’être repéré par l’ennemi, mais aussi par son nombre : 77 Caesar ont été livrés à l’armée de terre en 2008. A titre de comparaison, l’armée française était dotée de 5.600 canons de 75 en 1914 ! Mais les armées n’ont plus la même dimension. 77 canons répartis, grosso modo, en trois ensembles : un parc dans les régiments d’artillerie et les camps d’entraînement pour l’instruction de nos unités, un parc pour l’engagement et enfin un parc de maintenance. Les douze, et bientôt dix-huit canons, livrés à l’Ukraine, ont été et vont être pris sur ces 77. Près d’un quart de notre artillerie Caesar ! Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu a certes demandé à Nexter, le groupe industriel qui fabrique le Caesar, de revoir son organisation afin d’accélérer la production des canons, a-t-on appris, jeudi, par une source du ministère (L’Opinion). Une demande qui aurait « été effectuée en amont de la visite à Kiev », nous dit Challenges. « En amont », c’est-à-dire ? On ne commande pas un canon sur Amazon pour la semaine prochaine ! En attendant et en clair, l’armée française a été en partie désarmée.

Plusieurs questions se posent alors.

L’armée de terre est-elle aujourd’hui en mesure de remplir son contrat opérationnel si elle devait, engager une division otanienne dans un conflit dit de haute intensité, avec deux brigades et donc deux régiments d’artillerie, avec au total une trentaine de canons Caesar ? Ensuite, l’armée de terre a été dotée de ces canons en application d’une  loi de programmation. Le Parlement a-t-il été consulté pour ce don, ou tout du moins, cette mise à disposition de matériels appartenant à la nation ? Autre question, plus technique : ces canons très sophistiqués nécessitent une chaîne de maintenance performante, pour rester opérationnels en dépit des vicissitudes du combat. Cette logistique a-t-elle été aussi livrée à l’Ukraine ? Par ailleurs, ces canons ne lancent pas des bouquets de fleurs. Qu’en est-il – et c’est là, peut-être la question la plus préoccupante – des quantités de munitions livrées à l’Ukraine et les conséquences sur nos stocks opérationnels ? On se souvient qu’en mars dernier, le sénateur LR Christian Cambon, président de la commission sénatoriale des Affaires étrangères et de la Défense, avait affirmé que le stock de munitions de la France ne permettrait pas de tenir plus de deux semaines un conflit de haute intensité. Hervé Grandjean, porte-parole du ministre des Armées, s’était voulu rassurant à défaut d’être convaincant : « La France est dotée d'une dissuasion nucléaire, c'est le moyen d'éviter des conflits de haute intensité sur le territoire national ». Le directeur général de Nexter avait de son côté confirmé, comme l’avait relaté BFM Business, que la production d’un obus « prend entre deux et trois ans ».

La France, c'est beau, c'est grand, c'est généreux. Mais la France doit être aussi prévoyante...

 

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18 juin 2022 à 19:26

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89 commentaires

  1. Il donne 18 canons et les munitions
    Il a vendu nos avions de chasse en occasion, il faudra des années pour les remplacer, idem les canons.
    Demain il donne notre porte avions. Aucun ministre, député ou sénateur ne proteste aucun général non plus.
    Ce type aura insulté la France et les français, éparpillé notre armée, saboté notre défense,
    permis l’ assassinat de citoyens par des islamistes et est toujours en place

    1. Oui,mais 58% des français l’ont réélu ! Et aujourd’hui toujours ces bêtes français vont lui fournir une majorité relative ou absolue ! On n’est donc pas sorti de l’auberge !

  2. Mon grand-père, Polytechnicien et sorti major de l’Ecole-d’Application-de-l’Artillerie de Fontainebleau en 1902, a participé à la mise au point du 75. En 1914 il est devenu un Virtuose-du-75 ! A la bataille de l’Yser, le 24 octobre 1914, sa batterie de 4 pièces à tiré 1280 coups en 22 minutes, hachant les Bavarois qui attaquaient sur 12 rangs de profondeur.

  3. Souvenez vous de 2017 et la réponse cinglante de Macron au CEMA de VILLIERS.
    Les français ont aimé puisqu’ils l’ont reconduit.

  4. Nous n’avons pas, plus, de matériel et il faut envoyer ce « matos » à l’étranger, bon pour faire un exercice de plus en situation réelle, oui, mais après comme nous n’avons plus ou presque plus de fabrique française d’armement, on va bientôt se battre avec des fourchettes et lancer des cailloux!!!!

  5. L’armée française contribue à tuer des soldats russes. Je ne suis pas d’accord. Pas en mon nom !

  6. Avec ses obus roquettes, le Caesar atteint plus de 50 km. La cadence de tir permet de quitter la position de tir avant que les premiers obus n’atteignent leurs objectifs, améliorant ainsi la furtivité et la sécurité des équipages.

  7. nous avons vu le reportage de la fabrication de ces canons a la TV ; du haut de game que macaron offre a cet affreux président ukrainien !!! de l’argent qui devrait être mis dans nos hôpitaux !! même l’islamo-gauchiste merluchon est daccord !!

  8. Mais quel but poursuit l’Europe maintenant???? si au debut c’était pour eviter une raclée, maintenant on cherche quoi??? Surtout que l’Ukraine a utilisé en 2 mois 1 ou 2 ans de production d’armement ! je ne pense pas de vouloir la paix se fasse en armant un des 2 camps!

  9. On ne va quand même pas chipoter quand l’intérêt supérieur électoral et les effets de manche de l’élu que le monde entier nous envie sont en jeu…

  10. ancien militaire, j’ai honte de nos chefs d’état major, aucune démission, aucune contestation. a l’époque mon ministre de tutelle disait « un ministre ca ferme sa gueule ou ca démissionne ». et personne ne soulève le problème du transfert de budget de la défense au profit de l’aide a l’Ukraine. une imputation qui pouvait se faire dans d’autres ministères non

  11. J’ai pu lire dans les médias russes que les dégâts et les morts civiles causées par les tirs des Caesars sur la ville de Donetz ont permis d’accuser la France de livrer aux Ukrainiens des obus à sous munitions, interdits par la convention de Genève ?
    Des Médias français se sont empressés d’annoncer que les Russes avaient bombardé les civils de Donetz ce qui est une désinformation flagrante!

  12. Aussi nul que la trop courte ligne Maginot, c’est faisable, la preuve. Mais derrière cette hérésie se cache peut-être une politique commerciale. Le Caesar pourrait se vendre ensuite aussi bien que le missile exocet qui fit ses preuves (au détriment des anglais) lors de la guerre des Malouines.

  13. D’un sens nos Artilleurs ne sont pas fâchés de s’entrainer en vraie grandeur et de montrer au monde leurs capacités (comme les conflits récents ont montré la suprématie du Rafale) mais au rythme où depuis plus de dix ans les Ukrainiens frappent le Dombass russophone la réserve de munition va être vite épuisée . Que fait-on ensuite ? Baïonnette au canon ?

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