René Goscinny : créer pour faire rire et rêver
Cet article a été publié le 04/11/2022.
Ce 14 août 2023, René Goscinny aurait eu 97 ans. L'occasion de relire l'hommage que lui avait rendu Éric de Mascureau pour le 45e anniversaire de sa mort, survenue le 5 novembre 1977.
Derrière chaque grande œuvre, il y a un homme. Derrière la bande dessinée Astérix, il y en a deux : Albert Uderzo (1927-2020) et René Goscinny. Scénariste de talent, ce dernier propulsa l’image d’un petit Gaulois comme l’un des symboles de la France à l’étranger. Goscinny berce notre imagination par l’aventure et l’humour depuis 63 ans. Le 5 novembre 1977, après une vie consacrée à créer, René Goscinny est victime d’une crise cardiaque. La fin d'une étonnante carrière.
C’est le 14 août 1926 que vit le jour, à Paris, le petit René Goscinny. Fils de parents juifs polonais ayant fui les persécutions, il quitte la France et passe son enfance en Argentine où son père réussit à trouver du travail. Notre futur scénariste y baigne dans un mélange de cultures juive, française et sud-américaine. Il commence aussi à aiguiser, par le dessin et l’écriture, son esprit, influencé par les voyages, les aventures et les légendes locales. René a 13 ans quand la Seconde Guerre mondiale éclate et, même s’il est à l’abri avec ses parents en Argentine, il est marqué par le sort funeste dont est victime le reste de sa famille, restée dans l’Europe nazie. La mort de son père, Stanislas, en 1943, force René, tout juste bachelier, à travailler afin de subvenir aux besoins familiaux.
Débute alors la carrière de dessinateur de Goscinny, qui voyage jusqu’aux États-Unis afin de faire connaître et vendre son savoir-faire auprès de diverses agences. C’est durant ce périple, en 1948, qu’il fait la rencontre de Maurice de Bevere (1923-2001), dit Morris, le père de Lucky Luke, qui devient un collaborateur et un grand ami. Morris demande à René Goscinny de lui écrire les scénarios des aventures de son célèbre cow-boy, un travail que réalisa Goscinny jusqu’à son décès, signant 36 récits différents.
Sentant que l’Amérique est une impasse professionnelle, Goscinny décide de partir en France et abandonne définitivement le dessin pour l’écriture, où il est jugé excellent. Installé dans son pays natal, René croise la route de nombreux dessinateurs et les aide dans l’écriture de leurs œuvres, comme Jean-Jacques Sempé (1932-2022) et les espiègleries de son Petit Nicolas, ainsi que Jean Tabary (1930-2011) et les complots de son vizir Iznogoud. Mais c’est en 1951 qu’il fait la rencontre la plus importante de sa vie avec le dessinateur Albert Uderzo. Les deux compères commencent leur collaboration par la création des aventures, non pas d’un petit Gaulois, mais d’un Indien, Oumpah-Pah, vivant au temps de la colonisation de l’Amérique, accompagné de son compagnon et gentilhomme français, Hubert de la Pâte Feuilletée. Cette saga, qui s’arrêta en 1962, fut le premier pas de l’invention d’une nouvelle icône qui marqua l’histoire de la bande dessinée.
En 1959, avec la fondation de Pilote, un nouveau journal destiné à la jeunesse, Goscinny et Uderzo décident le lancement des aventures d’un irréductible Gaulois du nom d’Astérix et de son fidèle compagnon Obélix. Le succès, imprévu mais grandissant, finit, dix ans plus tard, par battre des records dignes de l’œuvre d’Hergé, Tintin. En hommage, le premier satellite français envoyé en 1965 prit le nom du Celte moustachu. Le nom d’Astérix franchit même nos frontières et arrive à l’étranger. Véritable phénomène de société, l’image du héros gaulois est reprise par de nombreuses marques pour leur publicité, faisant la fortune de Goscinny et d’Uderzo.
Mais le succès des parents d’Astérix et Obélix n’est pas du goût de tout le monde. On leur reproche, par jalousie et par haine politique, leur popularité, de promouvoir des idées gaullistes et un passé nationaliste, d’être des xénophobes et des misogynes. Goscinny dénonce l’indécence des accusations portées contre lui dont la famille juive fut victime de la haine raciale et du nazisme. Le succès de son œuvre auprès du public est en lui-même une réponse aux attaques.
Enterré au cimetière du Montparnasse, à Paris, Goscinny est inhumé aujourd’hui au cimetière du Château, à Nice. Après son décès, Uderzo rend hommage à son plus cher ami en créant, seul et pour la première fois, l’album L'Odyssée d'Astérix dans lequel notre Gaulois préféré voyage en Terre sainte et rencontre un Juif au traits étrangement ressemblants à ceux à l’auteur décédé.
Toujours vivant à travers son œuvre, Goscinny a laissé à la France un bien précieux, une création humoristique et intemporelle qui fait rire, même 45 ans après la disparition de l’un de ses auteurs.
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6 commentaires
Dans les années soixante ma mère faisait tout pour me dissuader de lire des BD , pour elle ce n’était pas de la littérature et cela n’amenait rien à celui qui s’y adonnait par contre elle a été conquise par les albums d’ Astérix et Obélix pour lesquels elle faisait une exception!
Je me rappelle que vers le milieu des années 60 , j’avais gagné un concours en me déguisant en Astérix . Le prix était Le tour de Gaule d’Astérix .
Vous oubliez le formidable duo qu’il a fait aussi avec Gotlib : la Rubrique à Brac, les Dingodossiers,….. qui ont formidablement enchantés mon adolescence par leur esprit.
Tout dans l’oeuvre de René Goscinny était léger, espiègle, franchouillard mais non vulgaire et chacun se régalait dans la lecture de ces écrits. Quand on constate la dérive pseudo intellectuelle qui est distillée aujourd’hui, on ne peut qu’espérer que les fantômes existent et viennent hanter les nuits des usurpateurs qui souillent ces bandes dessinées qui faisaient notre fierté d’avoir eu pour concitoyens de tels génies.
Merci Messieurs Uderzo et Goscinny …vous n’avez même pas idée de ce que vous avez apporté à notre génération, surtout quand on mesure le niveau actuel , d’ailleurs qui vous a remplacé ? Simple question mais question fondamentale qui n’a aucune réponse
Si une, personne. Cordialement.
Un régal de ma jeunesse, avec Alix au service deCésar, (le Jules), de Christian Jacques, pour rétablir un peu l’équilibre avec la grandiose civilisation Romaine dont nous sommes les descendants. Cordialement.