Daniel Schaeffer : « Les bateaux étrangers dans le détroit de Taïwan sont gênants pour la Chine »

Schaeffer

La presse a relaté un incident maritime franco-chinois impliquant une frégate de la Marine nationale, Le Vendémiaire, dans le détroit de Taïwan.

Pour Boulevard Voltaire, le général (2s) Daniel Schaeffer, qui a été attaché de Défense en Thaïlande, au Vietnam et en Chine, apporte des clarifications sur cet événement et sur les règles de la navigation internationale, dans cette zone particulièrement sensible.

L’agence Reuters a relaté qu’un navire français aurait été détourné et stoppé par la marine chinoise sous prétexte d’une violation de l’espace maritime chinois. Cette information est-elle vraie ?

Cette information est fausse. Le Vendémiaire a franchi le détroit de Taïwan en partant du sud vers le nord. La Marine chinoise l’a averti qu’il naviguait dans les eaux territoriales chinoises. Ce qui était faux ! Le bateau en question a donc pu continuer son trajet normalement.

Pourquoi la Chine affirme-t-elle qu’il s’agit de son espace maritime ?

Je vous renvoie à mon article sorti sur le site www.asie21.com. La Chine prétend qu’à partir du moment où elle considère que Taïwan fait partie de la Chine, les eaux qui se situent entre la Chine et Taïwan sont chinoises. Notre bateau n’est passé ni dans les eaux de Chine continentale ni de Taïwan. L’espace qu’il reste entre les limites des mers territoriales est de 160 km.
Cette zone est zone économique exclusive. Elle se partage selon une ligne médiane virtuelle entre la Chine populaire et Taïwan.
Les zones économiques exclusives sont, comme leur nom l’indique, essentiellement sous droit souverain et non pas sous souveraineté des États. Les seules activités possibles sont l’activité économique, la recherche scientifique et technique et la police. Sinon, c’est le droit à la liberté internationale de la navigation qui s’applique. Le Vendémiaire n’était pas du tout dans les eaux territoriales chinoises.

La Cour permanente d’arbitrage considère que ces eaux n’appartiennent pas à la Chine et la Chine considère qu’elles lui appartiennent. Quel est l’intérêt, pour la Chine, de créer cet esclandre diplomatique ?

Ce n’est pas la première fois que nos bateaux et des bateaux américains passent par le détroit de Taïwan. Une telle affaire n’a jamais eu lieu. Lorsque les bateaux américains passeront par là, il faudra voir comment réagira la Chine.
À cause du gouvernement taïwanais, la Chine et Taïwan sont, depuis deux ans, dans une situation de tension. Ce gouvernement aurait des tendances indépendantistes. C'est insupportable pour les Chinois. À partir du moment où, à intervalles irréguliers et sans préavis, des bateaux passent dans le détroit, les Chinois de Chine continentale peuvent être sur les dents et embarrassés, au cas où ils auraient des velléités de vouloir conduire une action militaire contre les Taïwanais. Il est bien évident que si un bateau étranger se trouvait dans ce détroit au moment où les Chinois voulaient lancer quelque chose d’hostile à l’égard de Taïwan, ils seraient particulièrement gênés.

Comment expliquer que la presse française ait peu parlé de cet événement ?

Il faudrait demander au ministère des Affaires étrangères ou ailleurs.
La presse française n’a fait que reprendre ce qu’a sorti Reuters. Cette agence de presse a interviewé deux militaires américains. Ils ont révélé cet incident. Je pense que le gouvernement français avait pris la décision de ne pas ébruiter l’affaire.

Daniel Schaeffer
Daniel Schaeffer
Général (2s)

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