Croissance du narcotrafic et corruption : la Cour des comptes sonne l’alarme

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Le 27 novembre, la Cour des comptes rendait son rapport relatif à la lutte contre le narcotrafic en France. Ce document vient compléter une première enquête parlementaire réalisée sous l’impulsion des sénateurs Les Républicains. Les conclusions de ces deux travaux sont similaires : le trafic de drogue connaît en France une croissance exponentielle qui ne tardera pas à faire de l’hexagone un narco-Etat. En effet, la Cour des comptes tire deux sonnettes d’alarmes : celle de la prolifération des points de trafics et celle de la corruption de plus en plus inquiétante, à toutes les étapes de transaction de la drogue. Selon le FMI, un narco Etat est un pays dont « toutes les institutions légitimes ont été pénétrées par le pouvoir et la richesse issus du trafic de drogue. »

La croissance exponentielle du trafic de drogue 

Le rapport analyse la place qu’occupe la France en matière de trafic de drogue : « La France est à la fois un marché pour écouler les drogues, un espace de transit et une zone de rebond où la marchandise passe d’un mode de transport à un autre. » Les chiffres révélés sont inquiétants : en 1950, 600 toxicomanes étaient recensés en France. En 2022, 600 000 personnes affirment avoir déjà pris de la cocaïne. Cette augmentation de la consommation, qui implique une recrudescence inévitable des points de trafic et des trafiquants, s’étend partout sur le territoire français. En 2016, 54 % des communes étaient touchées par le narcotrafic. En 2022, ce ne sont pas moins de 79 % des communes quI sont touchées.

Cette prolifération du trafic de drogue provoque une grande insécurité. En 2023, 315 meurtres ou tentatives de meurtre sont recensés, en lien avec le narcotrafic. Il s’agit d’une augmentation de 57 % par rapport à l’année 2022. Rien qu’à Marseille, 47 personnes ont trouvé la mort sur fond de trafic, en 2023.

La création de l’OFAST (Office antistupéfiants ) en 2019 a permis de mettre en place des moyens supplémentaires pour la lutte contre ce fléau qui croît en France : en 2018 l’effectif mis à la disposition de l’OCRTIS (Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants)  et de l’OFAST s’élevait à 98. Il est passé à 200 en 2023. Malgré ce net progrès, le Sénat alerte : « La réponse de l’État [ à la crise du narcotrafic, NDLR ] manque de moyens, de lucidité et de cohérence. » La Cour des Comptes abonde en ce sens :  « Les saisies et le nombre de mis en cause n’ont cessé d’augmenter, témoignant de l’activité des forces de sécurité intérieure et des  douanes mais également de l’emprise du narcotrafic et des méthodes violentes qu’il génère. »

Malgré les efforts de l'OFAST, la corruption facilite l'œuvre des narcotrafiquants

La corruption, du port à la prison en passant par les services de sécurité intérieure, s’ajoute à cette augmentation des chiffres relatifs au trafic de stupéfiants. En effet, la Cour des comptes indique que la recette pharaonique engendrée par le commerce autour de la drogue « procure des moyens très nettement supérieurs à ceux des Etats ». Tout est donc à portée d’achat pour les trafiquants. Le rapport cite quelques professions particulièrement ciblées : les dockers, les agents de la douane, les membres des forces de sécurité, les magistrats, les fonctionnaires des institutions judiciaires, pénitentiaires ou encore les agents municipaux.  Les affaires liées à la corruption s'enchaînent : en juin 2023, une greffière du tribunal de Saint-Nazaire est arrêtée pour avoir divulgué des informations importantes. En décembre 2023, deux agents pénitentiaires sont incarcérés. Ils ont facilité la libération de trafiquants. En janvier 2024, neuf individus, dont un fonctionnaire de la police aux frontières à l'aéroport d'Orly sont mis en examen pour une affaire de cocaïne et de cannabis.

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Raphaelle Claisse
Journaliste stagiaire à BV. Etudiante école de journalisme.

Vos commentaires

25 commentaires

  1. Un narco Etat est un pays dont « toutes les institutions légitimes ont été pénétrées par le pouvoir et la richesse issus du trafic de drogue. » Bonne définition. Et qui nous va comme un gant.
     » Le rapport cite quelques professions particulièrement ciblées » en oubliant d’évoquer la principale : le personnel politique, avec au moins un député pris la main dans le sac.

  2. Il n’est pas étonnant que cet argent de la drogue puisse être utilisé pour corrompre des fonctionnaires , et du côté de l’état on consacre plus de fonds pour faire des campagnes contre le tabagisme et l’alcool qui s’adressent sans distinction à l’amateur de vin et sa culture que contre les consommateurs abusifs d’alcool fortes importées souvent de l’étranger et qui agrémentent le tout de quelques joints ou cachets hallucinogènes .
    Peut être ne veut on pas froisser certains pays qui nous font parvenir ces substances par le sud depuis l’Espagne comme par le nord à partir des ports tels celui de Rotterdam .L’un étant sous la responsabilité d’un pays avec lequel nous avons négocier quelques contrats juteux et l’autre sous la responsabilité de l’UE qui permet à tout un chacun de vaquer comme bon lui semble dans l’espace Schengen .

  3. La police arrete quelques intervenants mineurs, puis le trafic continue ailleurs. Les gros bonnets en prison gèrent leur juteux négoce depuis leurs cellules. De gigantesques sommes d’argent disparaissent des radars de l’Etat puisque rien ou presque ne les en empechent. Et on voudrait que celà s’arrete? C’est en s’attaquant à la source, l’argent, et le train de vie qui en découle,que cessera ce phénomène inquiétant. Le célèbre Al Capone n’est pas tombé autrement…

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