Condamnation d’Abdeslam : Libé regrette la négation du « droit à l’espoir »

procès bataclan

Salah Abdeslam vient d'être condamné à la perpétuité incompressible. La Justice française n'applique pour ainsi dire jamais la perpétuité réelle, c'est-à-dire l'emprisonnement à vie. En général, le criminel condamné à « perpétuité » et l'administration pénitentiaire se quittent bons amis au bout de 18 à 22 ans. Il ne semble pas devoir en être ainsi pour Abdeslam, seul survivant de ce que l'on a un peu exagérément qualifié de « commando » du 13 novembre. Un commando, c'est un groupe de soldats extrêmement professionnels, qui commettent des actes de guerre de portée stratégique pour la sauvegarde des intérêts d'un pays. Attribuer ce vocable à un ramassis de petites frappes, soudainement passées du chichon-kebab à la kalachnikov et au gilet explosif, qui ont abattu comme des chiens une centaine de Français innocents, c'est peut-être aller un peu vite. Une certaine presse n'en est plus à ça près.

Justement, puisqu'elle n'en est plus à ça près, parcourons ensemble, si vous voulez bien, les pages de Libération, quotidien sous perfusion du contribuable. Par exemple, le 30 juin 2022, l'un des titres de Libé était : « Procès du 13 novembre : la perpétuité incompressible, négation du “droit à l'espoir”. » Salah Abdeslam, de l'avis général, pourrait bien rester en prison toute sa vie. Il ne pourra prétendre à la libération que dans trente ans. Un certain Me Mathieu Quinquis, président de l'Observatoire international des prisons, regrette la disparition du droit à l'espoir, c'est-à-dire au fait que la personne ne se résume pas à ses actes, puisse changer et même - osons le mot, que Libé n'ose pas - se rédimer au bout du compte.

Dans notre monde plein de vertus chrétiennes devenues folles (le mot de Chesterton est usé jusqu'à la corde), on assassine les fœtus mais on protège les oiseaux, on expose les enfants aux atrocités du monde mais on tremble pour son empreinte carbone... on déterre des tweets qui ont vingt ans mais on pense qu'un djihadiste peut changer. Que la prison à perpétuité soit plus inhumaine que la peine de mort elle-même, je n'en doute pas. Il y a plus de cruauté à laisser quelqu'un vivre toute une vie derrière les barreaux qu'à le guillotiner. Notre monde n'est pas prêt à l'entendre. Les gens peuvent-ils changer ? Oui, bien sûr ; c'est d'ailleurs l'Église catholique elle-même qui condamne les péchés mais accueille les pécheurs avec charité et même tendresse - même si on n'est pas obligé d'aller jusqu'à accorder la communion aux partisans de l'avortement, comme vient de le faire le pape avec Nancy Pelosi.

Il me semble toutefois que la priorité des observateurs de prisons ne devrait pas être un hypothétique « droit à l'espoir », qu'on appelait autrefois miséricorde, sans tourner autour du pot. D'abord, il y a deux véritables questions : Abdeslam est-il un danger pour la société ? Cette mesure symbolique aura-t-elle l'effet escompté ? Pour la première, on ne sait pas. Les psychiatres disent qu'il peut redevenir normal. Comme pour beaucoup de racailles paumées qui basculent, le djihadisme lui tient probablement lieu de religion, de lien social, de culture générale, de curriculum vitae et de fonction dans la cité (au sens platonicien, je ne parle pas de la barre d'immeubles) : d'où ses déclarations arrogantes au début du procès, avant qu'il ne la joue plus fine. S'il se défait de cette persona totalitaire qui, comme tous les cancers, a remplacé des cellules saines, Abdeslam saura-t-il construire une véritable personnalité, authentique et harmonieuse ? Je ne suis pas médecin. Quant à la deuxième question, bien sûr, cette mesure rassure le peuple, choque l'opinion et l'érige en martyr politique : elle atteint donc l'effet escompté. Nous avons de beaux jours de guerre contre le terrorisme devant nous.

Et au fait, à ce propos, y a-t-il quelqu'un qui se préoccupe, dans la presse parisienne, du droit à l'espoir des familles de victimes ? De ces gens dont le seul crime était de boire un verre en terrasse ou d'aimer le hard rock ? C'est pour cela qu'ils ont été massacrés : parce qu'en France, on peut écouter de la musique, quelle qu'elle soit ; parce qu'en France, on peut boire une bière à la tombée du soir sans craindre la damnation. Ce ne sont pas nos valeurs qu'ils visaient - nous ne saurions pas nous-mêmes les définir clairement. C'est notre mode de vie. Y a-t-il un droit à l'espoir d'un retour à la normale ou sommes-nous désormais à la merci de tous les Abdeslam du monde, pleins de haine recuite pour un monde libre qui les fascine ? Libé n'en dit pas un mot.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 03/07/2022 à 16:15.
Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

21 commentaires

  1. Comme la confiance en notre système judiciaire n’est pas près de renaître de ses cendres, d’ici peu, les cages s’ouvriront pour libérer ces barbares et faire place à d’autres prédateurs et ainsi de suite….de ce fait, ces derniers pourront mettre en action d’autres attentats programmés et organisés en prison puisqu’ils sont en permanence connectés avec l’extérieur alors que si la peine capitale était rétablie, l’insécurité disparaîtrait rapidement et pas besoin de construire d’autres prisons.

  2. Une Vie entière en prison ? Quelle chance ! Pas de chômage, d’impôts, de pb de retraite…
    Nourri, logé, blanchi ! Gratos ! Pas pour tout le monde…
    Plus sérieusement, cette peine se veut être un Symbole. Seul, survivant du commando, il paie pour tous les autres. Dont ceux qui se sont faits exploser.
    Lui, a eu la Trouille. Et il la paie chèrement.

  3. Le « droit à l’espoir » que jamais ni nous ni nos proches, ni personne d’ailleurs, soit définitivement à l’abri des moeurs barbares de cette racaille qui un peu plus chaque jour nous défie, nous ne l’avons plus et nous l’aurons plus, nous sommes condamnés à être une victime potentielle à perpétuité.
    Nous sommes condamnés à un cauchemar récurent de voir ces hordes attaquer les quartiers encore préservés comme on a pu les voir au SDF…
    Alors, que « libé » cesse de nous cracher dessus !

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