[Chronique] Macron à Lausanne : une « souveraineté » hors-sol

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Le président de la République s’est exprimé à l’université de Lausanne, le 16 novembre 2023, à l'occasion de sa visite d'État en Suisse. Discours surréaliste sur la souveraineté européenne. « Nous devons avoir, nous Européens, une vraie stratégie d’autonomie, d’indépendance, de souveraineté », a-t-il martelé. Et d’ajouter, en conclusion de son exposé introductif : « Si nous avons perdu la souveraineté, vous aurez devant vous des dirigeants qui ne seront pas totalement maîtres chez eux et vous deviendrez des dirigeants qui seront peut-être des commentateurs du monde mais qui n’en seront plus les décideurs. »

Saisissant portrait de ce qu’il est lui-même devenu après les successifs abandons de souveraineté voulus par lui-même et ses prédécesseurs. En réalité, Emmanuel Macron préside un pays qui n’est plus qu’une province de l’Empire européen : envolée, la souveraineté monétaire ; envolée, la souveraineté budgétaire désormais sous contrôle de la Commission ; envolée, la souveraineté agricole ; envolée, la souveraineté commerciale ; envolée, la souveraineté environnementale ; envolée, la souveraineté en matière de concurrence ; envolée, la souveraineté énergétique… Même la souveraineté pénale est écornée par les décisions de la Cour de justice européenne ou de la Cour européenne des droits de l’homme. Quant à l’autonomie militaire, elle a disparu avec le retour dans le commandement intégré de l’OTAN.

La France, vassale de l'Union européenne

La réalité est que la France est devenue un État vassal de l’Union européenne et que cet Empire européen de la norme est lui-même vassal des États-Unis qui impose leurs choix géostratégiques et l’extraterritorialité de leur droit. Emmanuel Macron, en répondant à Viktor Orbán qui comparait Bruxelles à Moscou, a répondu que les abandons de souveraineté n’étaient pas imposés par les chars mais consentis « souverainement » (Bruxelles, 27/10/2023). Si l’on va au fond des choses, c’est presque pire. C’est la vassalité désirée. Car longtemps la France a cru qu’elle pourrait diriger les choses en Europe. C’est une illusion, lorsque l’on s’enferme dans la connivence et que l’on refuse toute confrontation lorsque nos intérêts fondamentaux sont remis en cause. Qui oserait aujourd’hui, en France, pratiquer la politique de la chaise vide ? Personne, dans le personnel politique conformiste.

Il faut également rappeler qu’Emmanuel Macron a lui-même participé à la perte de notre souveraineté économique en contribuant à la vente de la filiale turbines d’Alstom alors qu’elle produisait les turbines équipant nos centrales nucléaires et qu’il a fallu faire racheter par EDF.

Une Europe désindustrialisée

Le Président énumère des souverainetés nécessaires aux « Européens » : économique, scientifique, culturelle, technique. C’est à une souveraineté européenne qu’il songe. Or, pour qu’il y ait souveraineté, il faut qu’il y ait un souverain. En démocratie, le souverain se nomme le peuple. La formule de souveraineté européenne n’est donc qu’un leurre, car il n’existe pas un peuple européen qui partage un projet et des traits communs hérités de l’Histoire et de la culture, mais des peuples européens qui peuvent avoir des projets communs mais ne partagent ni la même Histoire, ni les mêmes traditions, ni la même façon d’être et de penser le monde. Donc, ce peuple souverain qui n’existe pas ne peut exercer de réelle souveraineté. Celle-ci s’évanouit dès lors dans un « aréopage technocratique, apatride et irresponsable » , disait le général de Gaulle.

Au demeurant, l’Union européenne, en adhérant sans retenue à la mondialisation, en pratiquant un libre-échangisme béat, en s’opposant à l’idée de « champions nationaux », en imposant une politique de la concurrence dogmatique, en édictant des « règles climatiques » punitives qu’elle est seule à s’imposer, a désindustrialisé l’Europe avec les conséquences sociales que l’on sait et la perte de souveraineté économique et technique qui en résulte.

Il est permis de s’interroger sur le comportement présidentiel. Emmanuel Macron, qui parle beaucoup, et souvent à tort et à travers, se rend-il compte que ses propos ne sont connectés à rien de réel, que les dangers qu’il dénonce sont la conséquence des politiques menées avec obstination par lui et ses prédécesseurs, que l’Union européenne qu’il fantasme a été dans les faits un puissant instrument de désagrégation du continent européen et de sa vassalisation atlantiste ? Les coursives du Parlement européen évoquent celles des navires de croisière. Mais en l’occurrence, c’est un bateau ivre. Et le midship Macron semble lui-même en état d’ébriété intellectuelle !

Stéphane Buffetaut
Stéphane Buffetaut
Chroniqueur à BV, élu de Vendée, ancien député européen

Vos commentaires

37 commentaires

  1. Il est toujours ailleurs avec ses discours. La question que je me pose est de savoir ce que pensent ses « homologues ». Sont-ils consternés, stupéfaits, éprouvés, sidérés, amusés, ….?

  2. Il parle de » vraie stratégie d’autonomie, d’indépendance, de souveraineté », il en a pas une miette à vendre abandonnant tout à cette UE qui ressemble de plus en plus à l’URSS .

  3. Il manie bien le parler creux. Je ne comprends rien à ce qu’il dit. Mais suis-je bête, je ne fait pas parti de l’élite qui a tout compris et va guider les brebis égarées comme moi (pardon pour cette image chrétienne) dans le bon chemin.

  4. Macron a dressé son portrait…le bateau n’est pas ivre, la marionnette le conduit là où le désirent ses commanditaires et financeurs

  5. Les carottes sont cuites, la fin des haricots. Le suffrage universelle verrous de la démocratie a encore du pouvoir quant cette démocratie est mené à terme mais à double tranchant. Tout Français en position de voter donc peut faire changer l’orientation d’une politique nous conduisant immanquablement à la catastrophe sauf que le nombre de votants Français de papiers sont à même de faire passer une communauté contre les intérêts pour l’avenir de la France, çà se remarque déjà dans certaines banlieues.

    • Effectivement, il devient urgent que les français aillent voter avant qu’il ne soit trop tard. Quand les votants français de papiers seront majoritaires, nous ne pourrons plus rien faire. Voici ce que le gouvernement, dans son immobilisme, lèguera à nos enfants : une France soumise.

  6. « Dirigeant commentateur », portrait de « celui qu’il est lui-même devenu », reconnaissons-le avec un talent hors pair à enfiler les perles, dans un esprit café du commerce que nul ne saurait lui contester…

    • Au café du commerce, on entendait fréquemment des phrases de bon sens, populaires certes ( peu d’énarques s’y exprimaient …) mais authentiques. Rien de tel dans les propos à géométrie variable de notre bonimenteur national.

  7. Nous sommes la risée du monde …le fantoche de service ne sert que lui même ..la France et les français rien à faire ..ses goûts sont ailleurs …impossible que cela dure .

    • Et pourtant!…Il va falloir encore le supporter jusqu’en 2027. À moins que…un ouragan n’emporte la tente du grand cirque dans lequel nous vivons.

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