[CHRONIQUE] La logorrhée présidentielle, signe d’impuissance

Le président de la République s’est livré à son exercice favori : parler. Pour ne rien dire, ou presque.
CAPTURE ÉCRAN TF1
CAPTURE ÉCRAN TF1

Trois heures durant, le président de la République, invité de TF1 ce mardi 13 mai à partir de 20h10 dans l’émission « Emmanuel Macron – Les défis de la France », s’est livré à son exercice favori : parler. Pour ne rien dire, ou presque. C’est une étrange perversion de l’esprit que de croire que débiter avec assurance des notes de cabinet, à la façon du bon élève de la classe ou d’un singe savant, fait un homme d’État. Depuis Giscard d’Estaing, nombreux sont ceux qui furent capables de le faire. C’est un gage de mémoire, pas de vision ni de caractère. Souvenons-nous de l’adage populaire : « Tout ce qui brille n’est pas d’or. »

Loin des réalités

Ce mardi, il fut surtout ennuyeux et parfois sidérant, tant il semblait loin des réalités. C’est ainsi que les Français purent entendre que l’immigration légale était « pilotée » et que le besoin était de « mieux répartir », c'est-à-dire d’envoyer les immigrants en province. À aucun moment la question du nombre n’a effleuré son esprit ; il l’a même écartée d’un revers de main, affirmant qu’aborder la question de l’immigration dans son ensemble, illégale et légale, n’était « pas bon pour la République ». Ainsi, donc, les difficultés d’intégration, et a fortiori d’assimilation, ne semblent pas exister pour lui. A-t-il seulement conscience de la réalité des quartiers hors la loi ? N’a-t-il jamais vu les campements de fortune à l’intersection du boulevard périphérique et des autoroutes du nord et de l’est de Paris ? Ne s’inquiète-t-il pas de l’islamisation de la société, pilotée en sous-main par les Frères musulmans ? N’a-t-il pas le souci de ceux qui voudraient vraiment s’intégrer à la société française et qui souffrent eux-mêmes de l’immigration de masse ?

En matière de finances publiques, même sentiment d’irréalité et d’impuissance. Il a pratiquement donné acte à Agnès Verdier-Molinié de la justesse de ses constats, mais sans esquisser la moindre voie sérieuse pour sortir la France de la spirale de la dépense publique, de la spoliation fiscale et de la submersion bureaucratique devant laquelle il a même avoué son impuissance. Et sur la crise de la sidérurgie, évoquée par Mme Binet, il s’est défaussé sur l’Union européenne !

Échecs et abandons

Quant à sa conclusion – « Rester libres, une armée plus forte, une économie plus indépendante, une jeunesse protégée et éduquée. Nous y arriverons » -, elle ne peut que laisser pantois, car toute son action et, avant lui, toute celle de l’oligarchie politique et administrative qui dirige la France depuis décennies avaient pour objet et pour effet l’exact contraire.

En fin de compte, la politique de Charles de Gaulle se résumait à une phrase : « une France aux mains libres ». Depuis une cinquantaine d’années, tout a été fait pour aller à l’encontre de cet objectif : abandon de pans entiers de souveraineté entre les mains de l’empire normatif de l’Union européenne, soumission de notre politique économique aux oukases libre-échangistes et mondialistes de cette même UE, réintégration de notre armée dans le commandement intégré de l’OTAN, submersion migratoire acceptée si ce n’est voulue, effondrement de la qualité de notre enseignement en dépit de la ritournelle creuse sur « l’école de la République », délire réglementaire et pression fiscale dignes d’un régime socialiste.

Impuissance

Beaucoup de commentateurs ont relevé qu’Emmanuel Macron semblait avoir perdu la main, qu’il donnait un sentiment d’impuissance. Peut-il en être autrement lorsque, d’une part, la possibilité d’agir a été abdiquée entre les mains d’instances supranationales et lorsque, d’autre part, nul ne peut ou n’a le courage de sortir du logiciel d’un État qui étouffe la société sous le poids de sa bureaucratie et de sa fiscalité, et d’une domination idéologique hyper individualiste qui ruine l’idée même de bien commun.

Le Président est impuissant parce qu’il ne peut que l’être en raison des choix politiques et idéologiques qui sont les siens. Comment prétendre gouverner la France lorsque l’on a remis les clefs de la décision entre les mains « d’un aréopage technocratique et apatride et irresponsable » (De Gaulle, conférence de presse du 9/9/1965) siégeant à Bruxelles ? Encore une fois, la solution pour sortir la France de la spirale du déclin et de l’impuissance ne réside pas dans une alternance « pépère » mais dans le renversement de tous les principes qui guident la politique française depuis cinquante ans. Qui aura le courage de le faire ?

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Stéphane Buffetaut
Chroniqueur à BV, élu de Vendée, ancien député européen

Vos commentaires

47 commentaires

  1. Comme disait ma grand-mère, même un âne peut apprendre par cœur le bottin…mais ça reste un âne.

  2. Pour ne rien dire, ou presque… pourquoi « ou preque » ? S’il avait du énoncer qqchose d’important, quelques minutes suffisaient. La dilution dans un verbiage rhétorique ( habile cependant), est son seul talent.

  3. Que ceux qui ont écouté ce très mauvais acteur pendant plus de 3 h ne s’en plaignent pas. A quand pouvait-on s’attendre d’autre que des mensonges, du en même temps, du « ce n’est pas moi », etc. Personnellement je n’attends absolument plus rien de ce personnage. Je ne suis pas une mordue de la télécommande, mais là je n’ai pas hésité et surtout fait mon choix bien avant le début de cette mauvaise comédie.

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