Emmanuel Macron vient de recadrer Nicolas Hulot, après son appel aux députés à « dire non » au traité de libre-échange avec le Canada. Mais ce recadrage prouve également qu'il avait fait le mauvais choix en le nommant ministre d'État à la Transition écologique et solidaire.

« Il fallait le dire quand on était en responsabilité », a lancé le chef de l'État à son ancien ministre, ajoutant que « quand on s’est battu pour améliorer un texte, on ne peut pas dire quelques mois plus tard le contraire ». De fait, l'intéressé reconnaît avoir échoué : « Le plan d’action que j’ai moi-même endossé à l’automne 2017 n’a pas produit les résultats escomptés et les attentes légitimes n’ont pas été comblées. » Certes, mais pourquoi ne l'a-t-il pas dit dès qu'il s'en est aperçu, à supposer qu'il ait vraiment cru pouvoir influencer les négociations ?

L'échec de Nicolas Hulot est aussi celui de notre Président. Macron comptait sur la notoriété de l'écologiste, espérant que la vanité lui ferait oublier ses convictions. Maintenant qu'il n'est plus aux affaires, ses convictions lui reviennent. Il fallait qu'il marquât son opposition. À croire qu'il a besoin de faire parler de lui pour exister. Voilà qui n'améliorera pas la confiance que les Français portent aux politiciens.

Barbara Pompili, elle-même ralliée à La République en marche, n'a pas caché ses interrogations sur le CETA, déclarant en commission : « On ne peut s’empêcher de remarquer qu’il y a un certain paradoxe à promouvoir des échanges intercontinentaux tout en voulant maîtriser les émissions de gaz à effet de serre et en promouvant la consommation locale. » Cette évidence suffira-t-elle à faire d'elle une dissidente ? Peu probable. Tout au plus s'abstiendra-t-elle, au moment du vote, ou sera-t-elle absente de l'Hémicycle.
Et que dire de la majorité des députés LREM qui n'ont pas, depuis le début de leur mandat, montré leur capacité à penser par eux-mêmes ? Il est vrai que les conditions de leur investiture ne les prédestinaient pas à se comporter autrement que des godillots. Les rares récalcitrants – une erreur de casting ? – sont partis spontanément ou ont été exclus. Les autres, Macron les tient par la barbichette.

La venue de Greta Thunberg à l'Assemblée, le jour même de la ratification du CETA, rend la situation encore plus cocasse. La « prophétesse en culottes courtes », comme l'appelle ironiquement Julien Aubert, député LR, a été applaudie par la salle, ses contradicteurs ayant boycotté cette pantalonnade. Il faut avoir l'esprit particulièrement obtus pour ne pas comprendre qu'entre la lutte contre le réchauffement climatique et les accords de libre-échange tournés vers le profit, il n'y a pas d'accommodement possible.

Sauf pour Macron, le spécialiste du « en même temps ». Notre Président prétend faire la synthèse entre les contraires, promettant ouverture et vigilance. Selon son habitude, il se paye de mots : « Si nous décidons » de refuser « par principe tout accord commercial, alors nous nous isolons nous-mêmes », explique-t-il. « Si, avec le Canada de Justin Trudeau, nous ne savons pas trouver des accords et des moyens de respecter nos engagements climatiques, avec qui signera-t-on des accords ? »

Ne vous inquiétez pas ! La France se donnera « les moyens de s’assurer que l’accord est bien mis en œuvre sur le plan national comme sur le plan européen ». Les Français se laisseront-ils rouler dans la farine ? Ce n'est pas Hulot, c'est Macron qui devrait se faire recadrer !

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23 juillet 2019 à 16:23

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