Ce que Paul McCartney aurait pu chanter à Notre-Dame de Paris

@Raph_PH/Wikimedia commons
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Ce 1er décembre, à l’occasion de l’émission C médiatique, sur France 5, Stéphane Bern, sûrement emporté par son enthousiasme, annonçait la participation de Paul McCartney à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame de Paris afin qu’il y interprète Imagine, la fameuse chanson du défunt John Lennon. Une information tôt démentie par l’entourage de l’ancien Beatles : « Il a bien reçu une invitation. C’est un grand honneur pour lui. Il n’y a pas de participation en direct. Il n’y a pas d’enregistrement de prévu non plus. »

Que cet immense artiste soit invité à un tel événement était on ne peut plus logique, puisqu’il était en concert à Paris, les 4 et 5 décembre. En revanche, qu’il puisse avoir été envisagé qu’il puisse y chanter Imagine était hautement baroque. En effet, que nous dit cette ritournelle pour adolescents attardés ? Que dans le monde des divagations lennoniennes , il n’y a ni « nations » ni « possessions matérielles », mais juste une « fraternité humaine ». Pourquoi pas. Mais qu’il n’y a pas, non plus, de « paradis » ni de « religion » ; ce qui est déjà plus embêtant en une telle circonstance.

Si une telle prestation avait donc eut lieu, nul doute qu’elle aurait été, comme on dit, singulièrement « inappropriée »… Étonnant que ce hiatus potentiel n’ait pas été relevé par la sphère médiatique…

On notera, d’ailleurs, que cet hymne neuneu n’a pas tout à fait porté chance à son créateur. Ainsi, Mark David Chapman, pour se justifier d’avoir assassiné John Lennon, le 8 décembre 1980, affirma devant ses juges : « Lennon nous dit d'imaginer un monde sans possessions, et le voilà avec des millions de dollars, des yachts, des propriétés et des investissements immobiliers, se moquant des gens comme moi qui crurent ses mensonges et achetèrent ses disques, en construisant une grande partie de nos vies autour de sa musique. » Voilà qui n’excuse évidemment pas le geste du meurtrier, mais qui permet néanmoins d’en partie l’expliquer.

Plus sérieusement, si Paul McCartney avait dû pousser la chansonnette, à Notre-Dame de Paris, Let It Be aurait été autrement plus indiqué. Déjà parce que son titre signifie « Ainsi soit-il », dans la langue de Monseigneur Dupanloup, et qu’il y est question d’une certaine « Mother Mary ». S’agit-il de notre Mère à tous ? Pas exactement, mais un peu, quand même. À l’origine, il s’agit seulement de la sienne, une sage-femme entièrement dévouée à son métier et, tôt, emportée par un cancer en 1956 alors que Paul McCartney n’a que 14 ans. Terrassé par le chagrin, il lui arrivait de rêver d’elle, d’où ces explications du principal intéressé : « C’était merveilleux pour moi et elle se montrait très rassurante. Dans mon rêve, elle disait : “Tout ira bien”. Je ne suis pas sûr qu’elle disait “let it be”, mais c’était le sens de son conseil ; “ne te fais pas trop de soucis, tout va s’arranger”. »

Quant à la dimension religieuse de la chanson, son auteur en est bien conscient, d’où cette mise au point : « Les mots “Mother Mary” rendent la chanson quasiment religieuse, alors pourquoi pas. Je n’ai rien contre. Je suis plutôt heureux de voir des gens l’utiliser pour affirmer leur foi. Ça ne me pose aucun problème. »

Pudeur et délicatesse, telle est indubitablement la marque de cette véritable légende vivante qui, à bientôt 80 printemps, n’en finit plus d’arpenter le globe, multipliant disques et tournées. Ce, pour notre plus grand plaisir ; mais également pour le sien, manifestement, et non point pour l’argent, sa fortune personnelle ayant été estimée à 1,2 milliard de dollars en 2023.

En 1997, il était anobli par Élisabeth II, la défunte reine d’Angleterre. Une simple formalité pour celui qui possédait déjà la noblesse du cœur.

Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le 10/12/2024 à 10:52.
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Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

9 commentaires

  1. Paul Mac Cartney fut, comme pour tout un chacun, l’une des idoles de ma lointaine jeunesse, mais je n’oublie nonobstant pas qu’il fut l’un des militants les plus actifs de l’abolition de la chasse à courre en Angleterre, tradition pluri-séculaire, ornée d’une iconographie bien connue…Alors, lui confier, ne serait-ce que partiellement, la célébration d’une histoire qui le dépasse certainement…j’ai un doute !

  2. « Imagine » est la chanson préférée des neuneus qui allument des bougies et accrochent des nounours au lendemain d’un attentat terroriste. Cette miellerie indigeste fait tache dans le répertoire des Beatles (bon, ce n’est pas la seule).

    • C’est une chanson de John Lennon, elle ne fait pas partie du répertoire des Beatles. Il l’a enregistrée bien après la séparation des Beatles.

  3. Evidemment pour le croyant de base, imaginer qu’il n’y ait pas de religion est une divagation. Pour un athée, voir le résultat des religions, ou imaginer qu’on a un ami imaginaire, créateur de l’univers et qui s’intéresse à vous est bien plus qu’une divagation. La religion catholique, bien affaiblie aujourd’hui ne tue plus, mais que de morts en son nom (Saint Barthélemy, inquisition, etc….). Personnellement je serais très heureux de voir la religion musulmane disparaître. Je ne parle même pas des guerres (financées par des dictatures musulmanes), mais rien que lors d’attentats terroristes, il y a dans les 50000 personnes qui perdent la vie à cause d’attentats terroristes musulmans chaque année. Certainement le double cette année écoulée, vu la situation en Palestine et Liban. Je vous assure que l’on s’en passerait bien.

  4. J’avais un copain grand collectionneur de disques des Beatles qui un jour a croisé , Sir Paul Mc Cartney et n’a pu lui dire quoi que ce soit tellement l’émotion l’avait paralysé .
    C’est vrai qu’il s’en est passé du temps depuis l’époque où les quatre garçons, sans Ringo Starr faisaient leur premiers pas à Hambourg et Paul Mc Cartney est le seul a avoir acquis ce statut de noble et l’avoir assumé . Pour ce qui est d' »Imagine » de Lennon , c’est une chanson de circonstance qui correspondait aux poncifs post psychédélic et hippies de l’époque en 1971 , mais que l’on ne pourrait coller au mondialisme de 2024 sans frontière de la libre circulation des biens ,des migrants et des finances dématérialisées .

  5. Effectivement, chanter « no religion » dans la cathédrale aurait été incongru. Sauf que dans le même couplet, on trouve aussi « Imagine there’s no coutries » (pas de pays, de nations), ce qui n’a pas empêché Juliette Armanet de l’interpréter lors de la cérémonie d’ouverture des JO 2024, compétition où justement s’affrontent toutes les nations de la planète et des environs. Comme quoi, il y a toujours un arrangement.

    • Shakira a chanté Imagine, en Septembre 2015, à l’ONU et devant le pape. Je n’ai jamais su si c’était involontaire ou volontaire.

    • Je pense qu’on en dehors du texte dont je ne partage pas l’idée générale,je crois que c’est surtout la mélodie qui est très accrochante à nos oreilles et il faut bien l’admettre, le choix proposé pour être interprété à Notre Dame l’aurait été uniquement à cause de ça.Mais c’est très bien que cela n’ait pas eu lieu.

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