4 juillet 2019 : Trump proclame sa version de l’exceptionnalisme américain
Trump a bouleversé la routine des cérémonies de la fête nationale américaine qui célèbre, le 4 juillet, la rupture du pays avec l’Europe, ses royaumes, ses « pays », ses traditions, son ineffable capacité à transformer la quantité en qualité par l’intercession du sacré. Une rupture qui fait des États-Unis non pas une nation mais un projet : celui de s’imposer comme la république universelle. Un projet maintenant en crise.
Fox News faisait état, le 4 juillet, d’un sondage sur la fierté d’être américain, qui décrit des changements drastiques. D’une façon générale, la « fierté » est au plus bas depuis 2001, année du 11 septembre, il est vrai. De plus, quand il s’agit d’être « extrêmement fier », seuls 47 % répondent à l’appel, contre 70 % en 2002. Et la brisure du pays se manifeste clairement : chez les électeurs républicains, aujourd’hui, l’« extrême fierté » atteint 74 %, tandis que les démocrates atteignent péniblement les 32 %.
La super-classe mondiale aurait donc gagné, cornaquant des élites politiques converties à l’apatriotisme, ouvertement chez les leaders démocrates, et furtivement chez les républicains. Ce qui explique que l’on continue d’agiter le drapeau, essentiellement pour défendre les intérêts de ceux qui mettent les patriotes au chômage, quitte à envoyer leurs enfants faire la police sur des théâtres d’opération étrangers pour le compte des banques et groupes industriels transnationaux.
Ainsi donc, croyant se rebeller contre le « tyran » britannique, les États-Unis n’ont fait que propulser mondialement son moteur, celui du libéralisme des frontières ouvertes préconisé par l’anglais Adam Smith. Et la « religion de la Constitution » - celle de Jefferson - a sans cesse lutté contre celle du marché et des oligarchies, incarnée à l’origine par Hamilton et Adams, et maintenant par essentiellement tout le monde à Washington, Davos, comme à l’hôtel Bilderberg.
La religion du marché et des oligarchies a progressivement gagné, au point qu’il faille maintenant renier le drapeau pour gagner de l’argent (comme vient de le faire Nike™ en retirant le drapeau « Betsy Ross » apposé sur un nouveau modèle de pompes), car ce drapeau est indissociablement témoin d’une hypocrisie nationale : les inventeurs des droits de l’homme étaient des esclavagistes, voire des exterminateurs d’Indiens. Et tous les tabous et croyances et mythes patiemment construits en un ciment social tendent à se désintégrer, puisque seuls, désormais, comptent les agents économiques.
Trump, contre l’avis de tous, a donc fait de la résistance en transposant à Washington - de façon spectaculaire - ce qu’il avait vu à Paris le 14 juillet 2017, alors invité par Macron. Avec une innovation : un discours présidentiel dit « d’union », destiné en fait à glorifier l’Amérique, son armée, son « esprit d’innovation », listant les héros du passé et ceux du jour. Bref, il a fait campagne pour l’élection de 2020, ce qui a pris tout le monde par surprise : les démocrates, bien sûr, mais aussi certains républicains hostiles qui cajolent toujours l’idée d’organiser une primaire contre lui.
En promouvant l’exceptionnalisme américain, Trump a ainsi promu le sien. Reste à vérifier s’il pourra museler ses faucons sur l’Iran et la Corée. Ce serait là une authentique preuve de son « exceptionnalité ».
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