Les carburants à prix coûtant sont-ils une arnaque ?

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L’une après l’autre, les grandes chaînes de distribution annoncent qu’elles vont vendre les carburants à prix coûtant, la promotion se terminant pour certains le 20 novembre, d’autres le 30. Mais ce cadeau est limité, car elles ne gagnent en moyenne que 1 à 2 centimes par litre vendu. En effet, avant la campagne actuelle, l’essence et le diesel étaient déjà des produits d’appel qui permettaient d’attirer le chaland. Les stations-service indépendantes achètent les carburants aux grossistes au même prix qu’Auchan et ses confrères mais sont obligées de prendre des marges de 10 à 15 centimes pour pouvoir vivre, au risque d’apparaître comme des « voleurs ». Les automobilistes ont, du coup, l’impression de faire une affaire en remplissant leur réservoir dans les stations des hypermarchés.

Cette promotion supplémentaire est-elle une bonne nouvelle pour les consommateurs ? Non, car la ristourne risque de n’être que de 40 à 80 centimes par plein ! Une paille, une aumône ! Tout au plus cette opération va inciter les compagnies pétrolières à répercuter plus rapidement la détente des cours du brut observée depuis septembre (–20 % !). Elles traînaient jusqu’alors les pieds afin de tirer le maximum de bénéfices de la situation, mais leur attentisme ne sera plus de mise.

Il n’y a rien de gratuit : l’avantage sur les carburants est remboursé par le consommateur sur d’autres marchandises. Le principe économique sur lequel reposent les hypermarchés est le suivant : sacrifier les marges sur un produit attrayant et emblématique, mais augmenter tous les autres. Pour finir, le consommateur est dupé. Les hypermarchés sont un facteur d’inflation et lorsqu’on fait une étude macro-économique fine, on s’aperçoit qu’ils sont, en fait, chers et peu attractifs au niveau des prix, bien plus que les supermarchés, même s’ils sont en apparence plus achalandés.

Et Mme Brune Poirson, secrétaire d'État à l’Écologie, a raison quand elle remarque que la promotion consentie par Auchan, Carrefour, Leclerc et autres ne porte jamais sur les produits bio qui, même s’ils ne sont pas exempts de pesticides, restent meilleurs pour la santé que les autres fruits et légumes. Les chaînes de distribution ne font pas non plus d’effort sur les doubles emballages. Or, si le réchauffement climatique est une vaste fumisterie et une escroquerie, le plastique est un des problèmes écologiques majeurs de l’humanité et, sans doute, le pire. On ne peut pas continuer à tolérer que se crée un sixième continent d’emballage du fait des courants marins, ni que les animaux marins soient forcés d’ingurgiter les polymères avec leur alimentation habituelle.

Les grandes chaînes de distribution ont surfé sur la vague de ras-le-bol fiscal qui submerge les Français et se font, du coup, de la publicité à moindres frais. Or, leur démarche est purement mercantile. Il n’y a, derrière cette « promotion », aucun souci de l’intérêt public. C’est une conséquence du cynisme froid du capitalisme, mais cette forme d’organisation économique comporte malgré tout maints avantages, et c’est même la seule qui marche. L’effondrement des pays communistes et du Venezuela nous le prouve abondamment a contrario.

Christian de Moliner
Christian de Moliner
Professeur agrégé et écrivain

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