« Pour acheter la paix sociale, l’État laisse faire et envoie les policiers au front ! »

Après les manifestations du 1er mai, qui ont eu pour conséquence immédiate six policiers blessés, dont deux grièvement, quelles conclusions peut-on tirer ? État des lieux.

Le 1er mai dernier, nouvelle manifestation et nouvelle agression contre des policiers. Beaucoup ont relevé l’impunité dans lequel ces casseurs et agresseurs ont agi. Est-ce-que c’est une impunité qui vous a vous aussi choquée ?

L’impunité, c’est un peu le souci général de ce pays. Le respect de la loi ne veut plus dire grand chose. Il y a manifestement une carence aujourd’hui dans la réponse pénale qui fait que l’impunité est un vrai problème. C’est un problème plus général.

S’agissant des violences du 1er mai, on voit bien les limites de l’exercice du pouvoir sur des actions comme ça. Normalement, dans un pays démocratique, on ne doit pas laisser faire ça. On doit prévenir avant les manifestations parce qu'on sait aujourd’hui que chaque manifestation donne lieu à des violences, notamment des violences contre les institutions et les policiers en premier lieu. Cela veut dire qu’on doit mettre en place des structures qui permettent, soit d’interpeller ces gens, soit de les neutraliser parce que le fait d’envoyer un cocktail Molotov sur un policier, c’est une tentative de meurtre. Le policier qui est brûlé, sa vie est dévastée. Aujourd’hui, on voit dans ses manifestations que pour acheter la paix sociale, l'État n’assume pas ses responsabilités. Donc, il laisse faire et il envoie les policiers au front de manière à ce que les policiers servent de fusibles. Et les blessures qui sont infligées aujourd’hui aux policiers sont, à mon avis, la conséquence directe d’une démission de l'État.

Et pour aller un peu dans votre sens, il y a un délégué de l’UNSA-Police qui a déclaré « ce ne sont pas des manifestations, se sont des tueurs de flics ». Ce sont des mots forts. Est-ce-que vous les comprenez ?

Ce sont des mots que je comprends. C’est une formule à laquelle j’adhère totalement. J’y adhère d’autant mieux que j’ai vécu dans ma vie professionnelle de multiples évènements où on tentait volontairement de tuer des policiers pour ce qu’ils représentaient. C’est le cas à Viry-Châtillon où on fait brûler des policiers. C’est le cas dans une succession d’émeutes à Villiers le Bel en 2007 où la consigne était donnée de tuer des policiers. Donc il fallait tuer des policiers pour ce qu’ils représentaient. Et le jeudi d’il y a dix jours, quand ce policier a été tué sur les Champs Élysées, c’est la même chose. Il a été tué pour ce qu'il représente. Il porte l’uniforme, il représente la Police nationale et il représente les forces étatiques. Donc, effectivement aujourd’hui, on veut tuer des policiers et ce qui est choquant, c’est que lorsque ce policier brûle, il y en a qui sont contents. Il y a des jeunes gens, des jeunes Français qui sont nés en France, qui sont allés à l’école, qui connaissent les lois de la République, qui sont contents de voir un policier brûle et qui applaudissent à cette image. Et c’est plus que choquant.

Beaucoup parlent d’une Police à bout de souffle, dans la situation qui est la nôtre aujourd’hui, notamment avec la menace du terrorisme. Est-ce-que vous avez vous aussi l’impression d’une police qui est aujourd’hui à bout de nerf ?

C’est une police qui est à bout de nerf, oui. C’est une police qui est usée et qui se sent très en danger. Elle se sent en danger de tous les côtés parce que des délinquants veulent les tuer ou des terroristes veulent les tuer. Elle se sent en danger dans leur bureau parce qu’elle n’a pas nécessairement le soutien de sa hiérarchie. Le policier de base se sent quand même très peu soutenu ; très peu compris et très peu soutenu.

Et la police se sent démunie face à l’institution judiciaire. Par exemple, un policier aujourd’hui qui dirait : « Si on me lance un cocktail Molotov dessus, alors je suis en état de légitime défense et je peux tirer sur celui qui veut me lancer le cocktail Molotov parce qu’entre sa vie et la mienne, l'agression étant injuste, je peux m’en défendre. » Mais tout de suite immédiatement après, il penserait : « Oui mais, si je tire et si je tue un manifestant, je perds mon travail, on va me poursuivre, l’administration ne sera pas là dernière moi, parce qu’elle estimera que je suis à l’origine d’émeutes encore plus violentes et de toute façon la Justice me poursuivra. »
Donc ils se sentent vraiment, complètement pris. Ils sont écrasés par les pressions de toutes sortes. Être policier a toujours été un métier difficile mais aujourd’hui, c’est un métier kafkaïen. C’est impossible !

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