Visite du pape : ces (autres) stèles commémoratives qui ont été oubliées

Laura Mauranne Marseille

La péripétie, relatée par le journaliste de Valeurs actuelles Amaury Brelet, peut paraître anecdotique. Elle est pourtant ô combien emblématique. « Un clandestin guinéen d’une vingtaine d’années visé par une OQTF, qui tentait sans billet de passer un point de filtrage du stade Vélodrome à Marseille où le pape s’apprêtait à célébrer la messe, a été interpellé vers 13 h 45, samedi, et placé en rétention administrative. » (Une rétention administrative qui a pris fin le lendemain en raison d’une irrégularité de procédure.)

Bref, on apprend que ceux-là mêmes que le pape exhorte à accueillir ont été tenus à l’écart de sa messe. Allez comprendre. Bien sûr, ce n’est pas le pape qui a pris personnellement cette décision, mais ceux qui étaient chargés, avec son accord, d’organiser son voyage ont jugé, pour sa sécurité, qu’il fallait refouler ce migrant. Qui n’avait peut-être aucune mauvaise intention. Les organisateurs étaient guidés avant tout par le principe de prudence. On peut les comprendre. Sauf que l’éviction du pauvre Guinéen, en l’espèce, heurte les esprits par son incohérence : pourquoi les mécanismes de filtrage et de défense visant à assurer la sécurité du vélodrome deviendraient-ils inadmissibles à l’échelon du pays ? La protection des peuples, et donc du quidam moyen, a-t-elle moins de valeur que celle du pape ?

Trois autres stèles commémoratives oubliées... 

On comprend donc, à la lecture de ces lignes, que cette grand-messe, bien sympathique, était loin d'être un bain de foule spontané. Et au-delà du Vélodrome, c’est dans un Marseille potemkinisé que le pape a circulé. D’abord parce que les 5.000 policiers et gendarmes mobilisés, la bulle de protection aérienne afin de prévenir toute menace venant du ciel et les gendarmes maritimes déployés sur la côte ont fait de la ville une forteresse. Paradoxal pour délivrer un message d’accueil inconditionnel.

Ensuite, parce que le circuit a été soigneusement choisi. Par deux fois, vendredi soir et samedi matin, le pape a vanté Marseille comme « modèle d’intégration ». Il a même, dans un élan allégorique, qualifié la ville de « sourire de la Méditerranée ». Mais si le pape s’est recueilli devant la stèle dédiée aux migrants morts en mer (initialement érigée pour les marins disparus), trois autres stèles commémoratives liées, chacune à leur façon, au drame migratoire ont été oubliées.

Tout d’abord, le mémorial des rapatriés d’Algérie. Pourtant, cet imposant monument en forme d’hélice - c’est par bateau que les pieds-noirs ont été contraint de fuir -, œuvre du sculpteur César, est difficile à éviter : 9 mètres de haut, un poids de 20 tonnes. Sommés de choisir entre la valise ou le cercueil, fuyant la guerre, les pieds-noirs, avec les harkis, ont été les premiers demandeurs d’asile… dans leur propre pays. Qui les a rejetés et méprisés. « Qu’ils aillent se réadapter ailleurs », avait éructé Gaston Defferre, maire de Marseille à l’époque. Méconnaître la plaie algérienne, les souffrances, les rancœurs, l’esprit de revanche des colonisés sur les colonisateurs, en Algérie et ailleurs en Afrique, c’est se priver d’une grille de lecture essentielle des migrations. On pourrait remonter d’ailleurs plus avant, jusqu’aux sources de cette colonisation, à laquelle n’était pas étrangère, même si ce n’était pas la seule raison, la volonté de mettre un terme aux razzias barbaresques, depuis des siècles, sur les côtes européennes : le pape François a pourtant sûrement entendu parler des deux ordres religieux, les mercédaires et les trinitaires, qui s’employaient à racheter les esclaves chrétiens.

Cousines assassinées

Vient ensuite la plaque de la gare Saint-Charles, à la mémoire des cousines Laure et Mauranne, âgées de 20 et 19 ans, assassinées à l’arme blanche, le 1er octobre 2017, par un terroriste islamiste tunisien qui faisait l’objet d’une mesure d’expulsion du territoire et n’aurait donc jamais dû croiser le chemin des deux jeunes filles.

Citons, enfin, la plaque en hommage au docteur Alban Gervaise, près de l’avenue Saint-Jérôme. Ce médecin militaire, professeur agrégé de radiologie de 40 ans, était arrivé à Marseille quelques mois auparavant. Il a été égorgé le 10 mai 2022 alors qu’avec son bébé dans la voiture, il allait chercher ses deux aînés à l’école catholique Sévigné. Mohammed L., le « déséquilibré », était de nationalité française, connu des services de police pour trafic de stupéfiant et a dit agir « au nom de Dieu ».

Marseille n’est pas plus un modèle d’intégration que les villages de Crimée visités par Catherine II n'étaient des modèles d’opulence.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

34 commentaires

  1. Si le pape aime tant Marseille, qu’il y implante le Vatican pour accueillir tous ces pauvres malheureux migrants qui arrivent par bateau. Je suis sûr qu’il prendra du temps pour les aider entre 2 règlements de compte à la Kalashnikov sur fond de stupéfiant.

  2. Excellent article, ô combien pertinent. Il fallait écouter, hier, l’émission, sur la 5, sur le pape, l’accueil, la charité, le radicalisme de catholiques d’extrême droite…
    MHV

  3. Au-delà du message Papal universel il y a des faits et des victimes et pour nous protéger (car nous sommes de potentielles victimes ) seul une action des forces de l’ordre de nos élus et de la justice doivent régler le problème pour accueillir et réguler en fonction des capacités des pays souverains. Secourir Oui mais l’accueil doit être assujetti aux us et coutumes et des institutions nationales . Chacun son rôle
    Les Français sans distinction de religion qui travaillent et paient des impôts contribue largement a cette solidarité. Il eût été souhaitable que le chef de l’église catholique le dise pour raffermir les cœurs

  4. Le sourire de la Méditerranée, n’est-il pas celui-ci inflige à nos compatriotes et soldats en Algérie par le FLN, connu aussi comme le sourire kabyle ?

  5. Il est des morts que nous sommes fermement priés d’oublier. Notre Très Saint Père est-il victime ou agent de la désinformation ?

  6. Manifestement ce pape a été programmé avec un logiciel communiste, impossible pour lui de considérer certains faits. Et il ne faut pas plus compter sur son hôte macron pour tenter de l’éclairer.

  7. « Marseille modèle d’intégration » ? quand on peut se faire égorger à tout moment , quand les kalachnikovs crachent
    plusieurs fois par semaine , quand les braves gens fuient les cités ? « Sourire de la méditerranée  » avant oui plus
    maintenant.

  8. Merci Mme CLUZEL de faire ce rappel . Marre de nous faire culpabiliser !! Nous avons donné l’indépendance il y a 60 ans à une grande partie de l’Afrique et ils en ont fait quoi ?? On se fait virer actuellement comme des malpropres du Mali du Niger et j’en passe et on doit encore donner et supporter ?? Quand ils auront transformé l’Europe comme l’Afrique que ferons nous ??

  9. Il semble que Bergoglio a pour conseil en communication le cabinet mackinsey, le même que Macron. il n’est donc normal que leurs discours soient semblalbles, préparés par les mêmes pour le même objectif, détruire la nation française.

  10. Quand on tourne la tête sur les exactions de ces chers migrants fuyant la guerre et ayant tout laissé au pays , travail , maison, femmes , enfants pour vivre de rapines dans ces grands territoires riches qui leur ouvrent les portes …. On se croirait réellement au temps des pirates barbaresques qui considéraient notre pays comme un magasin gratuit à piller , valeurs, denrées ou esclaves ( hommes et femmes) !!!!

  11. OK, François a fait du François, un petit peu de ci, un petit peu de ça, pas trop de tralala, juste ce qu’il faut pour flatter son image de Pape des pauvres, et des immigrés.
    Puis, vit le point d’orgue, la partie lamentable du show, la visite des Macron, venant se confesser après les excès franco-britanniques.
    Manu attentionné, soutenant son grand-père François, Brigitte ayant troqué son habit de reine, pour celui de première communiante, les Borgia de retour à la Cour du Vatican.
    Père, pardonnez-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font.

  12. Refouler un migrant qui souhaitait voir le pape mais c’est du racisme , de la discrimination . Quand à sa visite il est clair que l’on a tout fait pour qu’il ne voit pas ce qui se passe en réalité à Marseille , ils se sont empressé de bien nettoyer les lieux pour son passage et combien de forces de l’ordre pour le protéger . Au pays des bisounours la connerie et le mensonge n’ont pas de limite .

  13. La gauche polpotiste glorifie ce pape très jésuite qui oublie les souffrances des indigènes et glorifie ces hordes de barbares. Peut-être que nous verrons à la messe tous ces lfistes et européens verts.

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