Un mobilier relooké pour Notre-Dame ! Pour le meilleur ou pour le pire ?

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Le diocèse de Paris a présenté, le 23 juin, le futur mobilier de la cathédrale Notre-Dame : « Un mobilier entièrement relooké », selon la formule de BFMTV. Mgr Laurent Ulrich a retenu les projets de Guillaume Bardet et Ionna Vautrin, deux artistes et designers français. Des projets audacieux qui, apparemment, ne font pas l'unanimité.

L'archevêque de Paris a voulu « donner à notre cathédrale un mobilier liturgique d’une noble simplicité, qui soit le support le plus respectueux et le plus digne pour notre prière [...]  ». On ne saurait lui reprocher l'intention. L'abbé Christian Venard est moins indulgent, qui tweete : « Archéologisme, conservatisme des années 80, fixisme post-conciliaire, les mots m'échappent pour qualifier la pauvreté artistique de tout cela... »

Il faut admettre que le mobilier en bronze, à la fois sobre et massif, les chaises design, l'autel et le pupitre aux formes futuristes ont de quoi surprendre. « Ma ligne directrice, mon cahier des charges personnel, c’est un travail autour de l’immuable », a déclaré Guillaume Bardet. Quant à Ionna Vautrin, qui a dessiné les chaises en chêne massif, elle a voulu qu'elles « dialoguent avec le mobilier liturgique ». Nous ne nous hasarderons pas à émettre un jugement : des goûts et des couleurs, on ne discute pas, c'est bien connu. Mais tout ce mobilier favorisera-t-il le recueillement ?

Car, après tout, avant d'être un lieu touristique, une cathédrale est un lieu de prière, elle a été construite pour rendre hommage à Dieu. Ce n'est pas parce qu'Emmanuel Macron a souhaité que Notre-Dame fût ouverte, en 2024, pour les Jeux olympiques qu'elle a perdu son caractère sacré. Mgr Ulrich, qui présentera ce projet à la Commission nationale du patrimoine et de l’architecture le 23 juillet prochain, assume son choix et fait même preuve d'enthousiasme : les visiteurs vont être « surpris » par une cathédrale « quasi neuve », assure-t-il.

Si la dimension religieuse n'est pas absente de ses propos, on peut estimer qu'il accorde beaucoup d'importance aux touristes, français ou étrangers, qui visitent la cathédrale, presque plus qu'aux fidèles qui s'y rendent pour rendre hommage à Dieu. Les visiteurs arpenteront un parcours épuré avec une circulation plus aisée – ce n'est pas rien, à Paris ! – qui « épousera l'ensemble du mystère de la révélation chrétienne [...] mieux compréhensible pour permettre aux visiteurs d'approfondir le sens de cette histoire juive et chrétienne », rapporte BFM, sous-titre « Une circulation simplifiée ».

Celui qui croit au Ciel et celui qui n'y croit pas, comme dit le poète, eussent aimé que l'archevêque de Paris, à défaut des médias, mît davantage l'accent sur la destination religieuse de la cathédrale, qui n'est pas seulement un musée ni, comme la tour Eiffel, un lieu de visite incontournable pour les touristes. On peut souhaiter que Notre-Dame accueille, comme avant l'incendie, 15 millions de visiteurs chaque année, voire davantage. Mais il n'est pas sûr que ce mobilier liturgique contribue à vivifier le caractère sacré de la cathédrale. Combien, parmi les visiteurs, y connaîtront, comme Paul Claudel, une conversion fulgurante ?

Philippe Kerlouan
Philippe Kerlouan
Chroniqueur à BV, écrivain, professeur en retraite

Vos commentaires

40 commentaires

  1. Les nuls en charge du projet ont fait appel à deux designers à la mode ces derniers mois pour meubler Notre-Dame.
    Ils ont confondu une cathédrale et un bureau en open Space.
    Il se trouve qu’on vit dans un pays où les compagnons, donc veux qui ont construit les cathédrales, existent toujours.
    Bon, ok, les compagnons ne sont pas des copains du « Tout-Paris » jet-seteur qu’il est bon d’entretenir à coups de millions pour avoir bonne presse, mais ils auraient eu l’avantage de parfaitement se fondre dans le style de la cathédrale tout en coûtant beaucoup moins cher et en offrant probablement une bien meilleure qualité de travail.

  2. Au moins il y aura affluence dans la cathédrale. Non pour prier mais pour « VOIR » ces excentricités. C’est toujours ça!

  3. Il n’est peut être pas nécessaire de s’offusquer : l la croyance reste la croyance, quelles que soient la forme ou la matière du prie dieu où l’on s’agenouille.

  4. Tous les progressistes qui voulaient « une touche de modernité » pour l’apparence extérieure de la cathédrale, ont été chassés par la porte, puisqu’elle est en train d’être reconstruite à l’identique (grâce au tollé général de la population), alors ils rentrent par la fenêtre pour le mobilier. Je crois que malheureusement, ni l’architecte en chef, Mr lefevre, ni le Général Georgelin n’ont leur mot à dire sur ce sujet, et c’est bien dommage, ils doivent être furieux.

  5. Un mobilier quel qu’il soit se doit d’être en accord avec le bâtiment dans lequel il prend place. Dans un bâtiment aux lignes strictes, simples et dépouillées, on mettra du mobilier de même style. Dans un bâtiment datant du moyen âge, on met un mobilier façonné suivant les techniques et le style de l’époque…
    Quand on visite Versailles, on ne va pas voir des cuisines Ikea…

  6. ou comment l’Eglise se laisse formater, mobilier contemporain sans âme; un copier coller.

    les messes seront folkloriques , il sera difficile aux célébrants de rester en équilibre

  7. La woke kulture bobo-gaucho fait son entrée dans Notre-Dame… Un Monseigneur oblige !
    Il fallait bien s’attendre à quelque chose de se (mauvais) genre.
    Déjà Macron L’antéchrist ayant voulu relooker la Cathédrale afin de la faire entrer dans le nouveau siècle, très vite et heureusement ré-expédié dans sa démence par les défenseurs du patrimoine.

  8. Faute d’avoir réussi à faire disparaitre la flèche de Violet Le Duc pour marquer de son nom l’histoire d’un monument historique majeur comme Notre Dame, E. Macron laissera au final la trace de son passage, au travers d’un design du XXI pour les siècles à venir…

  9. Un mobilier de pompes funèbres, de crematorium !
    A l’image de « l’art » contemporain, conceptuel ! Inutile de se pencher sur les concepts, c’est l’argent qui mène le monde ! On a mis 100 ans à construire ND, 1/h à la détruire par le feu, triste symbole de cette volonté de faire du passé table rase !

  10. C’est original et comme pour nombre de monuments Parisiens le temps donnera ses lettres de beauté à ce mobilier.

  11. Eh bien, la qualité de ce mobilier est d’être en parfaite cohérence avec l’architecture de Notre-Dame, révolutionnaire à l’époque, sans aucune copie du passé « roman » des basiliques ; architecture uniquement conçue pour répondre à une intention claire : le plus haut et le plus grand possibles (grâce à la croisée d’ogive et au fer), le plus vitré possible (une fine ossature), quitte à ce que toute la structure soit apparente et même rejetée à l’extérieur de l’édifice (les contreforts). – – – – – – – – – – – –
    Tout cela au grand dam et hurlements de la société conservatrice de l’époque qui exigeait la démolition de cette « horreur ultra-moderne ». Heureusement, l’évêque Maurice de Sully a tenu bon et a fait poursuivre le chantier – – – – – – – Je retrouve ici ce dépouillement, cet inattendu. Et l’expérience me plaît. D’autant plus que le mobilier n’abîmera jamais le bâti ; il pourra de nouveau être remplacé par les générations futures. J’espère qu’elles garderont cet esprit très innovant qui nous a valu le chef d’oeuvre « Notre Dame de Paris ».

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