Ukraine : situation gagnante pour Joe Biden ?

Joe Biden

On savait qu’une négociation réussie avec la Russie à propos de l’Ukraine était attendue avec gourmandise par le gouvernement américain pour redorer le triste bilan de Joe Biden, à quelques mois des élections de mi-mandat. Or, en cela, les récentes avancées de Vladimir Poutine sur le « pivot géopolitique » qu’est l’Ukraine semblent faire davantage ombrage au président américain, pas assez « gros bras » pour tenir son homologue.

Outre-Atlantique, les fidèles de la ligne Brzeziński, ou du camp de la démocratie et du nouvel ordre mondial, retiennent leur souffle. Le Grand Échiquier se joue sous nos yeux. Mais depuis 1997 et le célèbre essai politique, les États-Unis (notamment à travers l’OTAN) ont perdu de leur superbe. L’American way of life ne fait plus rêver. Dans l’opinion internationale, d’ailleurs, on le ressent : lassitude vis-à-vis de l’interventionnisme à tout va, chute dans la confiance en ces gouvernants décadents et corrompus prêchant l’inverse de ce qu’ils font. L’Afghanistan est passé par là. Trump aussi.

Dès lors, comment Joe Biden est-il jugé par l’opinion américaine sur ce sujet ? Finalement, le dernier atout joué par Poutine range la majorité de l’opinion américaine derrière son président. Il faut dire que la rhétorique des médias fonctionne à plein. Car force est de constater que tous, de droite comme de gauche, ne parlent plus que de ça. Comme en Europe, du reste. Exit le Covid, les courriels du fils Biden relatifs à une affaire de corruption avec… l’Ukraine, les procès Clinton, les convois de la liberté partis la semaine dernière du sud de la Californie pour regagner Washington, DC. Seul Poutine - le Grand Satan - compte.

Si, jusqu’à présent, l’ensemble de la politique Biden était vu comme un échec (tant côté démocrate que républicain), la réponse à apporter à Vladimir Poutine recentre le débat public, au risque de diviser le camp républicain lui-même. Pain béni pour « Sleepy Joe » ?

Aussi, pour la presse américaine, dans ce conflit, deux camps s’opposent-ils dans l’opinion : le camp du bien - bien sûr majoritaire - regroupant les anti-Poutine, et le camp du mal, sans surprise, les pro-Trump. À gauche, c’est on ne peut plus clair. Pour Nancy Pelosi, la présidente (démocrate) de la Chambre des représentants, il s’agit d’un « geste diabolique de la part de Vladimir Poutine. Il reste un homme du KGB, sans doute l’un des hommes les plus riches du monde […] Ceci, mes amis, est notre moment. » Et d’ajouter: « Je pense que le point sur lequel nous nous accordons tous est que cette attaque des Russes sur l’Ukraine est une attaque à l’encontre de la démocratie. » Démocratie, démocratie, on connaît la chanson.

Et lorsqu’en conférence de presse, un journaliste demande à Jen Psaki, porte-parole du gouvernement, ce qu’il en sera des prix de l’énergie, étant donné la montée rapide de celui du gaz, ces derniers jours (4,82 dollars le gallon en Californie), il s’entend rétorquer : « Vous avez entendu le président Biden la semaine dernière. Être fermes sur nos valeurs ne sera pas sans coûts. »

Les « pro-Trump », et plus largement les anti-Washington, incarnent, eux, le rebut. Car Trump, mal lui en a pris, vient d’avoir des mots favorables à l’égard du président russe. Interrogé récemment par téléphone, l’auteur de The Art of the Deal expliquait : « C’est un coup de génie » de la part de Poutine. Selon lui, la stratégie russe devrait plutôt inspirer le gouvernement américain dans la gestion de sa frontière sud avec le Mexique.

Mis dans le même sac, le journaliste Tucker Carlson s’interroge, quant à lui, sur les conséquences du conflit pour le peuple américain, les « coûts » promis par Biden : hausse du prix de l’énergie, effets en cascade si l’article 5 de l’OTAN venait à être activé et position du dollar. Car celui-là pourrait bien perdre son rôle de monnaie de réserve internationale suite aux sanctions économiques et, de fait, entraîner l’économie américaine à sa ruine.

Joe Biden joue sa dernière carte. Le coup de poker diplomatique sera-t-il possible ?

Gaëlle Baudry
Gaëlle Baudry
Chroniqueuse à BV, spécialiste des Etats-Unis, consultante indépendante

Vos commentaires

29 commentaires

  1. une fois de plus les américains inoculent leurs poisons dans leur intérets……!!! c est eux qui on créer le probléme en ukraine comme il le font partout…..ne pas oublier que c est les Russes qui nous protégerons de l islamisme……

  2. Que mépris en ces gouvernants décadents et corrompus prêchant l’inverse de ce qu’ils font. Les Valeurs de Biden-manie, c’est idem que Macron : ne pas tenir les engagements pris envers les Orthodoxes de Russie, et un Président Ukrainien ancien comédien de 41 ans, à mon avis de leur mouvance pro occidentale, avec le wokisme, lgbt, transgenre. Rien pour plaire à l’orthodoxie russe. Macron est allé pour négocier, et qq jours après Poutine envahissait. Y a comme un problème côté ouest !

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