Trump épouse le sunnisme et relance la course aux armements
Le complexe militaro-industriel aura organisé le plus performant des voyages présidentiels : près de cinq cents milliards de contrats d’armement sur dix ans avec l’Arabie et les pays du Golfe. Mieux encore : en organisant pour Trump, dans le faste, un sommet des dirigeants islamo-arabes (Arab Islamic American Summit), le roi Salomon (pardon, Salman) a mis à la disposition du président américain un marché exceptionnel : cinquante-cinq États représentant 1,5 milliard d’êtres humains.
Et les 55 pays présents de réaliser que la manne pétrolière, combinée à la machine américaine, peut leur rapporter gros en contrats d’armement, et de développement.
Pour Trump, la règle du jeu était simple : après avoir manié le sabre (bombardements en Syrie et en Afghanistan), et après avoir coupé la tête de son ennemi (le patron du FBI), il descendait sur le tarmac en compagnie d’une femme jeune, belle et « modeste » (Arab News), ayant ainsi démontré sa force, sa cruauté et sa masculinité. Et, après avoir dit des mois durant « sa » vérité sur l’islam, il a démontré son courage. Il lui suffisait alors de servir le miel (un excellent discours « trumpien ») pour réussir son coup.
Une nouvelle dynamique a été initiée : en regroupant sur un thème (le « terrorisme ») près de deux milliards de Terriens (États-Unis inclus), il sacrifiait l’Iran sur l’autel de la famille Kagan ("Les Kagan sont de retour ; les guerres vont suivre" de Robert Parry, Les Crises, 15 mars 2017). À n'en pas douter, la production hollywoodienne de Riyad avait pour objectif d’humilier deux cibles : Docteur Evil (Poutine) et Mini-Me (Hassan Rohani, lequel avait mal choisi la date de sa réélection, ignorée des médias). Une OTAN islamo-américaine est donc en train de naître… sans l’Europe, décidément.
Pour Salman, comme pour son brillantissime ministre des Affaires étrangères, Adel al-Jubeir (عادل بن أحمد الجبير), il fallait recréer une puissante Umma sunnite, hostile à l’Iran, sous la protection des États-Unis. Il fallait aussi tâcher de rectifier le tir en souplesse sur les accointances saoudiennes avec le djihadisme, en faisant quelques gestes. Par exemple en faisant inaugurer par Trump un tout nouveau centre conjoint contre le terrorisme (espionnage cybernétique, traque des financements). Salman, dans son discours de l’Arab Islamic American Summit, est d’ailleurs allé assez loin dans la critique contre les islamistes, tout comme il s’est « mouillé » en signant avec Trump une « Déclaration conjointe de vision stratégique », englobant codéveloppement et lutte contre le terrorisme.
Y avait-il de la taqiya dans l’air ? Sand doute, mais il s’agissait surtout de calmer le trouillomètre de plusieurs régimes en perte d’altitude. Le monstre djihadiste se renforce à l’intérieur des 55 pays concernés et l’Iran – ami des Russes et de leurs armements - fait peur à des pays dont les armées, même suréquipées, sont incapables de se battre. Les Saoudiens, dont les réserves pétrolières diminuent, ont déjà le 4e budget militaire du monde, et recherchent maintenant un nouveau plan d’affaires. Trump semble avoir le sien : recréer l’Empire ottoman à la mode américaine. À voir le visage tendu du ministre des Affaires étrangères turc, concentré sur le discours du président, on pouvait se le demander.
Après la réception inouïe de Riyad, Trump vient d’arriver lundi en Terre sainte. Il est désormais le premier président des États-Unis à avoir prié au Mur des Lamentations, très loin des soucis de Washington. Il en a besoin…
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