Sanctions contre la Russie : la stratégie kamikaze

bruno le maire

Ils sont partis la fleur au fusil. Insouciants et sûrs d’eux, car la guerre serait courte, la victoire certaine, sans aucun doute. D’Ursula von der Leyen à Emmanuel Macron, ils l’ont proclamé haut et fort : face à l’invasion russe de l’Ukraine, l’Europe sort enfin de sa léthargie et va renaître plus déterminée, plus unie, plus puissante. Et les Russes vont payer le prix fort : pas d’engagement militaire direct mais une « guerre économique et financière totale » qui va provoquer « l’effondrement de l’économie russe », annonçait Bruno Le Maire, le 1er mars dernier.

Le ministre, tel un prophète de l’Ancien Testament, dressait la liste des malheurs qui allaient s’abattre sur la Russie : effondrement du rouble, réserves de change russes « en train de fondre comme neige au soleil », « trésor de guerre de Vladimir Poutine » réduit « à presque rien », augmentation de l’inflation et queues de Russes devant les banques. Et pour ceux qui n’étaient pas assaillis par les mêmes visions, Le Maire déclarait : « Le rapport de force économique et financier est totalement en faveur de l'Union européenne, qui est en train de découvrir sa puissance économique. »

Et puis, les jours sont passés, le ministre rabroué et le doute a commencé à s’installer. Le 24 mars dernier, Hervé Morin, ancien ministre de la Défense et président de la région Normandie, se livrait à des prédictions bien différentes sur France Info : « Ce que je crains, c'est une déflagration économique avec des conséquences sociales colossales dans les prochaines semaines si la guerre continue. » Et d'ajouter : « J'ai le sentiment qu'Emmanuel Macron n'a pas pris conscience de ce mur qui est en train d'arriver face à nous. » En réalité, Macron le sait parfaitement et ses équipes doivent, en ce moment, multiplier les incantations pour que l’onde de choc n’arrive pas avant le 24 avril prochain. Raison pour laquelle l’accélération du calendrier des élections législatives serait la bienvenue.

Car, cette fois-ci, les sanctions occidentales, associées aux conséquences directes de la guerre, vont avoir un effet boomerang extrêmement violent sur des économies européennes déjà fragilisées par la pandémie. À tel point que certains spécialistes craignent de graves troubles politiques et sociaux. Crise migratoire et humanitaire, avec une estimation de 5 ou 6 millions de réfugiés. Crise énergétique : le journal Le Monde estimait, le 11 mars dernier, la dépendance de l’Union européenne aux hydrocarbures russes à 43,6 % pour le gaz et à 48,4 % pour le pétrole. Sachant que la situation est extrêmement variable d’un pays à l’autre : la République tchèque dépend ainsi à 100 % de la Russie pour le gaz, la France autour de 20 %. Industries, chauffage, électricité : l’augmentations du coût des hydrocarbures commence à fortement impacter les économies européennes.
Le 18 mars dernier, le quotidien économique allemand Handelsblatt s’inquiétait d’une « rupture imminente » pour l’économie allemande, très dépendante du pétrole et du gaz russes.

Crise alimentaire : lors du sommet européen de Versailles, les 10 et 11 mars derniers, Emmanuel Macron déclarait que l'Europe et l’Afrique seraient « très profondément déstabilisées sur le plan alimentaire » dans les 12 à 18 mois à venir. C’est, en réalité, toute la sécurité alimentaire mondiale qui est en danger, avec la crainte de révoltes de la faim.

Une accumulation de crises qui, loin de renforcer l’unité des Européens, pourrait, bien au contraire, les diviser dans la mesure où ils ne partagent ni les mêmes risques ni les mêmes intérêts. Les opinions publiques auront, probablement, elles aussi des visions divergentes, à la fois d’un pays à l’autre, mais aussi par rapport à la politique de leurs gouvernements. Le 11 mars dernier, dans Le Point, Alain Juillet, ancien patron du renseignement à la DGSE, s’interrogeait : « Est-ce que les Français sont prêts à accepter des hausses vertigineuses ? Sont-ils prêts à dégrader leur niveau de vie pour l'Ukraine ? Les gilets jaunes ont bougé pour moins que cela. Et on sait bien que lorsque ça vous touche directement au portefeuille, l'enthousiasme est moins fort. »

Aussi, et en opposition avec les déclarations grandiloquentes des dirigeants européens aux premiers jours du conflit, on peut s’interroger sur le modèle stratégique choisi : la destruction de l'économie russe au prix du crash des économies européennes. La stratégie kamikaze.

Frédéric Martin-Lassez
Frédéric Martin-Lassez
Chroniqueur à BV, juriste

Vos commentaires

82 commentaires

  1. ON pleurait l’abandon de l’Europe par Obama,et la détestation qu’en avait Trump, »Sleepy Joe » au contraire vient nous soutenir on l’insulte.Il faudrait savoir si l’invasion de l’Ukraine n’est qu’une erreur de Poutine ou si ce n’est que le premier stade d’une confrontation planétaire déja programmée par la Russie et la Chine .Dans la deuxième hypothèse le renfort américain ne sera pas de trop compte tenu du dénuement militaire de l’Europe

  2. En 2017, Je pensais Bruno Lemaire intelligent et force de proposition. En un mot : Éligible.
    Finalement, c’est bien un Enarque. Petit gestionnaire sans grande vue ni imagination.
    Il fait même une Macronite aigüe. Il se met à raconter des bêtises.
    Poutine est notre ami. Il est seulement parti mettre de l’ordre dans ce pays de toutes les perversion qu’est devenue l’Ukraine.
    Biden, Zelensky, labo bactériologiques, GPA, Donbasse.
    L’Ukraine est devenue les écuries d’Augias de l’Europe.

    • C’est aussi le pays le plus pourri et corrompu d ‘Europe , drogue , prostitution , traffic de voitures , véhicules de chantier style bulldozer , blanchiment d ‘argent , réseaux de traffics en tout genre y compris des pillages de comptes aux arnaques aux mariages et j ‘en passe et des meilleurs .

  3. Tout ce que prévoit Lemaire n’arrive pas. C’est un prophète qui n’arrête pas de se tromper.
    De cette façon, en l’écoutant, on peut prévoir l’avenir en se disant que va se produire le contraire de ce qu’il prédit.

  4. Boomrang, Macron et ses acolytes ne semblent pas connaître l’engin et ses effets. Malheureusement ils entrainent tout le pays avec eux.

  5. Le 10 avril premier coup de semonce pour macron , le 24 à 20h , il faut que ce destructeur en chef soit battu , tous aux urnes et tous contre macron .

  6. Moi ce qui m’interpelle c’est que tout est fait pour que Macron le fossoyeur de notre pays, de notre peuple, enjambe l’élection présidentielle et soit reconduit pour 5 ans. Sans compter qu’il manoeuvre pour noircir le tableau au maximum après avoir noirci les situations de notre pays dans tous les domaines. Compte tenu de la haine qu’il suscite chez le plus grand nombre, il n’est pas sain de le laisser faire. Au point où on en est, TSM : Tout Sauf Macron, c’est vital !…

  7. Bruno Le Maire se retira du comité Fillon à la suite de mes révélations de février 2017 au Salon de l’Agriculture. Je lui fis savoir que Stéfanini- directeur de campagne de Fillon- avait été condamné par la C.A. de Versailles à mois avec sursis pour recel de prise illégale d’intérêt et que Dame Fillon serait condamnée pour recel d’abus de biens sociaux ( Revue des 2 Mondes); j’avais expédié au TGI des dizaines d’élus RPR pour des faits similaires. J’ai vainement sollicité un livre dédicacé…

  8. Et la corruption de Zelinsky et son rejet des accords de Minsk , et les 14000 morts au Dombas qui ont provoqué cette guerre, personne n’en parle. Le peuple paiera, comme d’habitude, qu’il ne pleure pas car il a tout pour comprendre véritablement ce qui se passe et pourquoi ce conflit ne s’arrête pas.

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