Saint-Valentin, grivoiseries et couillonnade
La Saint-Valentin, c’est la fête des amoureux. Sans doute un recyclage des lupercales, ces fêtes romaines des plus anciennes où deux jeunes hommes favorisaient la fécondité des femmes rencontrées en les fouettant avec des lanières de peau du bouc sacrifié pour l’occasion. Le pape Gélase Ier est passé par là, a dépaganisé le fourbi et institué le 14 février fête des fiancés et des amoureux. La tradition veut que l’on échange avec l’être aimé un message ce jour-là.
En France, la sainteté de Valentin ne s’est pas encore effacée, contrairement à saint Nicolas transformé en père Noël par notre époque consumériste. Mais les marchands du Temple exploitent le filon. La Saint-Valentin est devenue un simple prétexte commercial pour vendre tout et n’importe quoi, pas qu’un voyage à Venise ou un sextoy, même quand le lien semble ténu avec l’amour. En 2017, un opérateur téléphonique mobile surfait sur la vague. Les billets et les cartes échangés entre les amoureux sont maintenant remplacés par les textos et messages vocaux, il faut vivre avec son temps ! Ou des sextos et des images ou des vidéos licencieuses.
Est-ce le téléphone portable de Benjamin Griveaux qui est à l’origine du scandale ? L’ex-sbire de DSK a-t-il été, comme son mentor, rattrapé par son excès de licence ? L’abandon, par le poulain du Président de la course à la mairie de Paris, est-il un aveu de l’authenticité de cette vidéo gênante à cause de l’adultère qu’elle implique ? D’un point vu légal, quand DSK était présenté comme l’auteur présumé d’un viol, Benjamin Griveaux est surtout la victime soit d’une diffamation, s’il s’agit d’un montage, soit d’une violation de sa vie privée, l’adultère n’étant plus pénalisé.
Les procès médiatiques et sur les réseaux sociaux bafouent l’équité et les droits de la défense, c’est évident. Les affaires François Fillon ou Jacqueline Sauvage montrent la maladie de notre société où la polarisation conflictuelle sur un bouc émissaire se propage à grande vitesse. Innocent ? Coupable ? La question n’est pas là, le mimétisme abolit la raison. Plus que jamais, le René Girard pessimiste d’Achever Clausewitz doit nous prémunir contre nous-mêmes en tant que lyncheurs potentiels – nous le sommes sans doute tous. Les réseaux sociaux offrent aussi des perles, comme ce pépiement d’un compte parodique du défunt et génial Jean Rochefort :
Étienne Dorsay
@E_Dorsay
« Cédant à l'empressement endémique de touiter, j'allais rudoyer ce #Griveaux pour lequel je ne déborde pas de sympathie.
Mais en prenant quelques secondes de recul non contractuelles, je découvre que la réalité est plus complexe.
Sauvez le monde, mangez un réseau social. »
Non, d’abord, c’est indigeste, et on y croise dans la boue des perles comme la vôtre, Étienne Dorsay !
La chute de Benjamin Griveaux ne saurait réjouir ceux qui voudraient rehausser la qualité du débat démocratique bien malmené. Notre époque préfère l’apparence à la substance. Les talents de communication sont bien plus utiles pour accéder aux responsabilités qu’une capacité de discernement et de décision. C’est la tare de la démocratie depuis qu’elle existe, mais comme il n’est pas de moins mauvais régime…
Exit Benjamin Griveaux, vae victis ! S’il est bien l’auteur de cette vidéo, cette « couillonnade » (comme on dit dans le sud de la France) lui permettra peut-être d’éviter un revers cinglant auquel il semblait destiné, mais montrera qu’il n’est pas assez prudent pour être en responsabilité.
Bonne fête à tous les amoureux !
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