Repentance : qui évoquera la rue d’Isly, le 26 mars 1962 ?

Rue d'Isly

Dans la rhétorique officielle actuelle, la République remplace la nation, notre nation, la France. C’est, bien sûr, terriblement pervers. Le mot « république » désigne deux choses : la chose publique, la politique, faisant suite à l’organisation de la polis grecque et à l’invention du débat. Ce sens n’est plus guère usité. Et l’ensemble des institutions qui constituent et gouvernent un État dans un pays qui n’est pas une monarchie héréditaire. Les deux sens entraînent une ambiguïté. Mais, surtout, cette lorgnette qu’induit le choix de ce mot, en se focalisant sur la tête, passe par pertes et profits le peuple. « Le peuple, c'est ce sur quoi s'exerce le pouvoir », selon Michel Onfray. Il est réifié par cette République qui a l’hypocrisie de le prétendre souverain.

En ce 26 mars, funeste anniversaire, il convient de se souvenir que la République a fait tirer sur son peuple, sur des manifestants pacifiques français, en 1962, à Alger, rue d’Isly. Simple bavure ? Elle était organisée en amont : il n’est pas innocent de confier à des tirailleurs non formés pour le maintien de l’ordre des missions de ce type, avec des ordres stricts. Vitalis Cros, préfet de police en charge, a avoué : « La nouvelle que nous redoutions et espérions à la fois arriva, les tirailleurs avaient ouvert le feu. »

Le révisionnisme c’est, bien sûr, de ne pas en parler, d’occulter ce sang versé dans l’Histoire officielle, comme celui des victimes de la tuerie d’Oran. La République n’a jamais reconnu aucune responsabilité et a poussé l’ignominie jusqu’à enterrer les cadavres sans les rendre à leurs familles pour qu’ils ne soient pas comptés. Ce révisionnisme officiel n’est pas neuf. La République refuse toujours d’admettre le sang français qu’elle a fait couler. Il est encore des personnes pour encenser publiquement la Convention dont l’un des fidèles généraux, François-Joseph Westermann, écrivait à propos de la répression en Vendée : « Je n’ai pas un prisonnier à me reprocher. J'ai tout exterminé. » Il s’est même trouvé un récent ministre de la République pour déplorer que l’œuvre de la Révolution (l’éradication du catholicisme) ne soit pas achevée.

Mais la repentance de la République ne saurait s’adresser à ces manifestants d’Alger : ils étaient des séditieux dans un contexte de guerre civile. Elle préfère imputer à ces victimes et à leurs familles des crimes contre l’humanité fantasmés. Par contre, envoyer son ministre de l’Intérieur déposer une gerbe au monument en l’honneur des assassins de pieds-noirs et de harkis ne lui pose pas de problème. Encourager l’Algérie – pauvre pays bradé à des brigands qui le mettent en coupe réglée depuis bientôt soixante ans - à poursuivre ses discours victimaires sur les drames de la colonisation sans exiger la moindre réciprocité, le moindre travail de mémoire un peu honnête, voilà une générosité suicidaire.

Nous voyons le résultat de cette culpabilité univoque, de cet ethno-masochisme structurel dans l’incapacité de s’assimiler d’une partie de la population d’origine maghrébine vivant en France. Vous aimeriez vivre chez celui qui serait le (prétendu) bourreau de vos parents ? Le ressentiment entretenu artificiellement par cette repentance inappropriée ne saurait être qu’un ferment de division, un facteur de délitement de la nation. Que la vérité se fasse partout.

Je n’éprouve pas de nostalgie d’un passé colonial révolu que je n’ai pas connu, ni ne souhaite justifier la colonisation en général ou en particulier. J’ai juste honte d’une décolonisation si mal faite que les cicatrices sont toujours béantes, et mon incompréhension devant le prisme idéologique de nos élites reste totale.

Pour ne rien rater

Revivez le Grand oral des candidats de droite

Les plus lus du jour

L'intervention média

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois